Accueil Aux Pays-Bas, un projet communautaire autour de la vigne

Aux Pays-Bas, un projet communautaire autour de la vigne

Auteur

AFP

Date

14.11.2017

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En ce dernier jour des vendanges, au pied de barres d’immeubles et de voies de chemin de fer à La Haye, des amateurs récoltent dans un jardin communautaire les dernières grappes de Johanniter, un cépage proche du riesling aux arômes d’agrumes, avec une pointe d’amertume.

Dans un silence quasi-religieux, interrompu seulement par le roulis des trains passant au-dessus de leur tête, quelques dizaines de vendangeurs cueillent et trient le raisin sous un beau soleil d’automne dans ce vignoble urbain, loin du brouhaha de la ville.

Lancé en 2013 par Tycho Vermeulen, « De Haagse Stadswijngaard » (« Le vignoble urbain haguois ») rassemble amateurs de viticulture et habitants du quartier pour des ateliers, des débats et des soirées autour de la vigne dont le fruit devient vin et les feuilles sont farcies.

Sur ce terrain de 1.000 mètres carrés, 650 plants sont entretenus toute l’année par quarante passionnés qui louent dix pieds chacun et reçoivent des cours autour du vin et de la vigne.

« C’est intrigant qu’il y ait une entreprise viticole dans le centre de La Haye », remarque Marie-José, venue découvrir ce vignoble urbain. « Je n’y croyais pas au début. J’aime être dehors, faire quelque chose de mes mains et travailler dans le jardin. Et ici, c’est un peu comme un jardin. »

Cette année, la récolte de la coopérative devrait permettre de produire un peu plus que la saison passée, soit 600 litres de vin. Un blanc légèrement fruité pour le Johanniter, un rouge aux tanins fins pour le Rondo et un rosé corsé pour le Souvignier gris.

« La quantité et la qualité sont bonnes, donc je suis un vigneron heureux pour le moment », assure Tycho, 42 ans.

Ce résultat est lié à la combinaison d’une température favorable – la ville est « toujours un peu plus chaude de quelques degrés » par rapport au reste du pays – et de cépages choisis pour leur résistance, explique-t-il.

« Nous devons jouer avec le sol parce qu’il est un peu contre nous », en recourant à « notre propre stratégie de fertilisation, avec du fumier, etc », ajoute Tycho Vermeulen.

La vigne comme prétexte

Outre son implantation en milieu urbain et à moins de dix kilomètres de la plage, ce qui fait de ce vignoble un projet communautaire hors du commun, c’est que la vigne est un prétexte. Pour partager et pour se rencontrer.

Les riverains organisent entre autres un atelier culinaire pour apprendre à préparer les sarmas, ces feuilles de vigne farcies de viande hachée ou de riz.

Le quartier compte une population majoritairement d’origine étrangère, en particulier turque, mais aussi marocaine notamment. « Ils ont un lien historique avec la production de raisins, avec les feuilles pour les sarmas, ce genre de choses qui peuvent nous connecter » les uns aux autres, souligne Tycho, cheveux bouclés poivre et sel et lunettes épaisses.

« Nous cherchons des manières d’utiliser la vigne pour tendre la main vers cette communauté (étrangère) d’une manière plus tangible », ajoute-t-il.

Pour Pieter Bakens, bottes jaunes en caoutchouc et pince coupante à la main, le vignoble urbain communautaire de La Haye (« De Haagse Stadswijngaard ») est une occasion de rencontrer d’autres passionnés de vin comme lui mais aussi « un beau projet multiculturel ».

Le secteur du vin est encore récent aux Pays-Bas. Au total, 160 hectares y sont consacrés à la culture viticole, des plants gérés par 90 passionnés, selon le Bureau central des Statistiques (CBS).

Mais le vignoble urbain de La Haye est particulier. L’idée n’est pas la recherche du profit, souligne Tycho Vermeulen.

« Ce que nous apportons à cette ville, c’est une histoire intéressante, nous lui donnons de l’attention – et de la beauté », dit-il, sourire aux lèvres. « Et nous voudrions encore approfondir le concept. »