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Carré du Palais : Inter-Rhône soupçonnait l’escroquerie depuis des mois

Auteur

Idelette
Fritsch

Date

30.03.2017

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Le Carré du Palais, vitrine des vins des Côtes-du-Rhône à Avignon, était au cœur d’une vaste escroquerie soupçonnée par Inter-Rhône depuis deux ans. Au terme d’une enquête judiciaire de huit mois, l’interprofession qui va se constituer partie civile de façon imminente, sort de sa réserve. Jeudi 30 mars lors d’un point presse, son président Michel Chapoutier réglait publiquement ses comptes avec le « faux architecte » Jean-Marie Renaud.

Le Carré du Palais, la toute nouvelle vitrine des vins de la Vallée du Rhône à Avignon, devait ouvrir le 10 avril dans l’ancienne Banque de France, à l’occasion de « Découvertes en Vallée du Rhône ». Au lieu de quoi, le président d’Inter-Rhône Michel Chapoutier, écope d’un chantier pas fini, d’un architecte en détention judiciaire pour « usurpation de diplôme », « escroquerie », « travail dissimulé » et « blanchiment », et d’une vaste affaire d’escroquerie sur deux ans qui fait « tâche » sur cette vitrine œnotouristique des vins de la Vallée du Rhône. Alors qu’une information judiciaire est ouverte, le préjudice est estimé pour l’heure à 700 000 €.

Le « faux architecte » qui trompe tout Avignon

« Je ne suis pas le perdreau de l’année, mais Jean-Marie Renaud a un tel aplomb que très rapidement, j’ai pensé qu’il était plus désorganisé que tordu », se disculpe Michel Chapoutier qui entamait, jeudi 30 mars lors d’un point presse, sa ronde de doléances pour expliquer les retards pris dans ce chantier.

« Nous pensions, dans le cadre Découvertes en Vallée du Rhône, donner la primeur de cette inauguration à un visitorat composé de sommeliers, cavistes, importateurs, journalistes du monde entier. Mais malgré les vicissitudes, le Carré du Palais sera prêt pour une ouverture de la brasserie, du bar à vins et du restaurant bistronomique cet été, peu avant le festival d’Avignon. Le reste ouvrira à l’automne », affirme Michel Chapoutier qui ne lâche pas pour autant ce projet emblématique des vins AOC de la Vallée du Rhône.

Alors qu’Inter-Rhône va se constituer partie civile dans les prochains jours, son président sort de sa réserve à l’encontre de Jean-Marie Renaud, initialement maître d’œuvre et maître d’ouvrage du bâtiment. « Ces huit derniers mois, nous nous étions engagés à ne rien ébruiter pour ne pas interférer sur l’enquête judiciaire en cours, quitte à prendre sur nous certains agacements face à un Jean-Marie Renaud qui passait pour une victime à Avignon », affirme-t-il. Depuis juillet 2015 pourtant, le « faux architecte » du Carré du Palais était dans le collimateur d’Inter-Rhône.

Deux ans de bras de fer

Problèmes de facturations, de sous-traitance, lenteur dans l’avancée du chantier, etc. « A l’été 2015, Jean-Marie Renaud avait facturé 80% du marché alors qu’il n’avait réalisé que 20% des travaux. Cela a éveillé mes soupçons, détaille Michel Chapoutier qui très vite, s’engagera dans un bras de fer de plusieurs mois avec Jean-Marie Renaud.

S’ensuivront, des courriers réguliers du président d’Inter-Rhône, avec Accusés de Réception « pour lui mettre la pression ». En juillet 2015, les honoraires de l’architecte sont revus à la baisse (de 12%, ils passent à 9% du montant des travaux de phase 1). Au terme d’un audit qui a révélé plusieurs irrégularités, Inter-Rhône rompt, le 29 juillet 2916, le contrat de Jean-Marie Renaud et dépose plainte, en août, auprès de la police judiciaire. Les dysfonctionnements relevés sont ahurissants : outre les soupçons de surfacturation, fausse facturation, surestimation d’honoraires, plusieurs anomalies techniques interrogent sur les diplômes du prétendu architecte : porte d’entrée mal dimensionnée, accès handicapé non conforme, absence d’extraction sur le toit, etc. Les enquêteurs de la Sûreté Départementale, appuyés par le Groupe d’intervention régional (GIR) PACA s’emparent du dossier qui a abouti à l’incarcération, courant mars, de celui qu’on appelle à présent « le faux architecte ».

Alors que le préjudice est estimé à 700 000 euros, le préjudice moral n’a pas encore été estimé. Mais Inter-Rhône pourrait, en se constituant partie civile, avoir trouvé un moyen définitif de se débarrasser d’un Jean-Marie Renaud encombrant, qui possède toujours 22% des parts de la Société civile immobilière d’attribution (SCIA) Carré du Palais. Pour l’avocat d’inter-Rhône, Matthieu Chirez du cabinet Karsenty et associés, « il n’est moralement pas possible que cette situation reste en l’état. Des saisies sur les biens de Monsieur Renaud pourraient être effectuées pour garantir à Inter-Rhône le remboursement de l’intégralité du préjudice ».