[70 ans du D-Day] La Normandie, terre historique de vins

A l’heure des célébrations du 70ème anniversaire du débarquement de Normandie, les produits traditionnels normands sont à l’honneur. Cidres et fromages nous feraient presque oublier que la région a longtemps produit du vin et qu’on y trouve encore aujourd’hui un domaine très qualitatif.

Le vin en Normandie est intimement lié à l’histoire de la région. Apparu au cours du premier millénaire de notre ère, le vignoble normand a connu une forte expansion au cours de la période de fort réchauffement climatique qui a touché l’Europe de l’an 900 à l’an 1300. On trouve d’ailleurs une représentation de tonneaux de vin sur la tapisserie de Bayeux – réalisée après la bataille d’Hastings en 1066 – dont l’origine normande semble légitime… A son apogée au XIIIème siècle, le vignoble s’étendait sur une grande partie du territoire régional à l’exception du Cotentin et des zones de bocage. Si l’amélioration du climat a permis l’éclosion de ces nouvelles zones de production du nord de la France, c’est sa dégradation au cours des siècles suivants (on a parlé de « petit âge glaciaire ») qui, dans une large mesure, contribuera à le faire disparaître. Ainsi au XVIIIème siècle, le vignoble normand n’était plus qu’anecdotique.

Des terroirs de qualité pouvant ressembler à ceux de la Côte d’or

Le potentiel qualitatif de plusieurs zones de Normandie avait pourtant été précocement identifié. Ceci a permis à certains vignobles, comme ceux d’Avranches et d’Argences, de perdurer jusqu’au XIXème siècle. Mais c’est surtout le vignoble de Vendeuvre dans le Calvados qui fut la pépite de la région. Sa renommée avait d’ailleurs conduit Cassini, célèbre cartographe de Louis XV, à mentionner une « maison de vigneron » sur sa carte de France. Et l’on comprend aisément pourquoi : un micro-climat exceptionnel associant une faible hygrométrie (600mm de pluie par an – soit la région la plus sèche de Normandie) à des vents proches du Foehn permettant de sécher les vignes et donc de contenir les maladies. Associez à cela un sol argilo-calcaire très proche de celui de la Côte de Nuits et des pentes exposées sud / sud-est et vous obtenez un écrin exceptionnel qui fut pourtant abandonné jusqu’à la fin du XXème siècle.

Le domaine des « Arpents du soleil » : le renouveau du vin normand

Après de longues recherches, Gérard Samson, passionné d’histoire et de vins, a cru au potentiel du vignoble de Vendeuvre. C’est donc armé de beaucoup de courage qu’il a ressuscité ce beau vignoble en 1995 en plantant modestement 0, 5 ha de vignes. Bien que confidentiels, ces vins ont toutefois été portés aux nues dès le premier millésime en 1998, un guide célèbre les ayant sélectionnés dans ses pages. Depuis, le vignoble s’est étendu (5 ha aujourd’hui et 6, 5 ha dès 2015) et les récompenses se sont multipliées (Challenge international, prix des Vinalies).

Aujourd’hui, le domaine produit six cuvées presque toutes en « IGP vin de pays du Calvados » avec des cépages aussi inattendus que le Müller-Thurgau ou le melon de Bourgogne. Mais Gérard Samson le reconnaît, ses deux coups de cœur vont à son auxerrois blanc « que certains rapprochent à l’aveugle de célèbres villages de la côte de Beaune » et à son pinot noir, né en 2004, dont « la finesse de tanins et l’élégance pourraient rappeler un Chambolle-Musigny ». Un programme alléchant pour commémorer dignement l’anniversaire du D-Day !

Jean-Michel Brouard