Accueil Les champagnes-courage de Néret-Vély

Auteur

Joëlle
W. Boisson

Date

19.12.2018

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Issus d’un autre univers, les Néret ont construit pierre à pierre, à partir des années 80, leur exploitation viticole, qui produit aujourd’hui une jolie gamme de champagnes à prix canon. Une histoire qui fait du bien.

« Travaillez, prenez de la peine, c’est le fonds qui manque le moins » prônait Jean de La Fontaine dans sa fable Le laboureur et ses enfants. Avec, pour morale, que la valeur travail est toujours récompensée.
Voici une autre belle histoire de travail et de courage, qui trouve aujourd’hui son épilogue dans les jolies bulles Néret-Vély. Un père, agriculteur laitier à Vauchamps, dans la plaine champenoise. Une mère comptable qui, par héritage, possède un tout petit bout de vigne (20 ares à Festigny dans la vallée de la Marne) en coopérative. Et l’envie chevillée au corps de monter un domaine viticole, le pari un peu fou de faire son propre vin. « On n’a pas derrière nous des générations de vignerons et nous avons dû tout construire nous-mêmes, avec nos petits moyens et beaucoup de travail, raconte Carole Néret, leur fille, qui a rejoint le domaine. Mon père peut être fier. Lui qui au départ n’avait jamais fait de vin, regardez où il est arrivé. »

A la fin des années 80-début des années 90, le vignoble de la vallée de la Marne est en pleine expansion. Les Néret décident de quitter la coopérative et de créer un vignoble. Ils prennent des surfaces familiales de vignes en fermage, achètent des bois en aire d’appellation, terrains très qualitatifs mais très pentus. Ils défrichent, travaillent le sol, plantent de la vigne sans compter leur peine, leurs heures et leurs aller-retour car le domaine est basé sur l’exploitation familiale à Vauchamps et les vignes à Festigny, à 25 Km de là. La superficie de vignes passe, en une dizaine d’années, de 20 ares à 5,5 ha, la dernière plantation datant de 2007. « Cette vigne, on l’appelle L’Everest. Elle est tellement pentue qu’à certains endroits il faut presque se tenir aux fils ! Elle est difficile à travailler et ma belle-sœur y monte parfois avec un cheval pour le travail du sol », reprend Carole Néret.

A partir de 1985, la gamme de champagnes se constitue, au départ juste autour de quelques références. « Dès le début, on a tout mis en bouteille. Il fallait autofinancer nos investissements, monter le stock. ça n’a pas été facile. Il y a des années où les banques voulaient nous faire vendre des vignes. Mais mon père comme moi, on est assez têtus, on va jusqu’au bout. »

Vendre dans des foires

Jusqu’en 2008, les ventes progressent en permanence jusqu’à 40 000 bouteilles et permettent bon an – mal an, de financer le développement. Aide-toi et le ciel t’aidera, les Néret choisissent la vente au particulier, sur leur domaine à Vauchamps, mais aussi sur des foires. « On a fait pendant plus de 8 ans le salon du mariage à Nevers, un marché de Noël en Alsace, on vendait à des particuliers et des dépôts dans le Lot – mon père cherchait les adresses sur minitel. Rares sont les fois où on est restés en Champagne, car c’était déjà très sollicité. C’était dur, même si ma mère dit qu’on avait de la chance que tout se vendait bien. Moi j’étais toute petite mais je suivais… et maintenant je fais pareil avec ma fille ! »

Patatras en 2008. Les Néret (comme tout le monde) ne prennent pas la mesure de l’ampleur de la crise, ou du moins pensent que cela va passer. Et cela ne passe pas. Là encore, Aide-toi et le ciel t’aidera, les Néret prennent les devants et comprennent que la consommation change, que les clients veulent des champagnes avec des personnalités différentes. Dès 2011/2012, ils se font aider d’œnologues (Sébastien Goulard, Georges Blanck, Franck Wolfer) pour retravailler différemment leurs assemblages. Puis lorsque les vins sortent, 3 à 5 ans plus tard, planchent sur les noms et les habillages avec une graphiste.

Et voici la nouvelle gamme toute pimpante, où nouveautés thématiques, spécialités de vinification et mono-cépages confidentiels rejoignent l’offre classique. La Futée (29 €), avec des chardonnays élevés en fûts ; L’Extra-brut mature (17,50 €) combinant long élevage sur lies et dosage réduit ; Les Echalas (28 €) sur une approche vieilles vignes en 100 % meunier et sans malo. « Maintenant, on fait de l’épicerie, dit mon père », sourit Carole Néret. « Mais tous ces vins attirent la curiosité. Je savais que pour aller chez les cavistes, il fallait qu’on soit en mesure de proposer ce type de produits. Sans ces cuvées là, je ne me serais senti d’aller à Paris ! » Forte de ces nouvelles cordes à son arc, souhaitons-lui bon succès !

www.champagne-neret-vely.fr

Terre de vins aime :
Blanc de noirs (15,50 €).
Votre porte-monnaie a bien lu. A ce prix, il serait dommage de se priver d’un apéritif tout au champagne. Voici une bulle très plaisante ; un nez fin évoquant le raisin blanc frais ; une bouche fine et plaisante, sans immense longueur mais avec un très joli crémeux.
Extra-brut mature (17,50 €). Absolu hit de la gamme pour son exceptionnel rapport qualité-prix. 7 ans de vieillissement en cave de ces chardonnays offrent une robe couleur miel d’acacia, un nez mature, agréable et complexe. On y retrouve là aussi de fines notes d’acacia, des touches de mirabelle et d’abricot sec, la noisette finement grillée, la brioche. La bouche est cohérente au plan des arômes, une texture veloutée apportée par ces chardonnays matures, tandis que le très faible dosage lui apporte une forme de tension finale.
Les Echalas (28,- €). Dans ce joli flacon à l’étiquette très travaillée, le dernier-né et le plus haut de gamme du champagne Néret-Vély. Surprise, il s’agit d’un 100 % meunier, choisi parmi les plus vieilles vignes du domaine, si pentus que les vignes y sont soutenues au moyen de piquets prénomés échalas. La robe est or soutenue, jolie bulle. Après une première approche un peu fumée, le nez se développe sur des arômes de poire très mûre, de chaume et de rayon de miel. Puis se développent des notes de torréfaction, voire de tabac blond. La bouche est ample, sans aucune agressivité, équilibrant les notes minérales et celles épicées. Impressions de cannelle et d’épices douces, balancées par une très belle fraîcheur (pas de fermentation malolactique) et surtout une belle longueur en bouche.