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Mumm, Perrier-Jouët : les grandes manœuvres environnementales

Auteur

Joëlle
W. Boisson

Date

18.05.2017

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Les champagnes Mumm et Perrier-Jouët viennent de certifier l’intégralité de leur vignoble maison. Au-delà, c’est tout un faisceau d’actions qui est mené en faveur de l’environnement. Mi-volontaire, mi-incitée, la filière viticole champenoise avance à grands pas.

Les 283 hectares de vignobles des Maisons Perrier-Jouët et Mumm (Groupe Pernod-Ricard) viennent officiellement d’être reconnus Haute Valeur Environnementale* et Viticulture Durable en Champagne*, apportant un acteur de plus dans la dizaine de grands vignobles champenois et la cinquantaine de vignerons déjà certifiés. Au total, ce sont désormais plus de 3300 ha, soit 10 % de la surface du vignoble champenois convertis officiellement sous un label environnemental. De l’aveu de Stéphane Varet, directeur des approvisionnements et du vignoble de Mumm / Perrier-Jouët, ce n’est pas la barre infranchissable que l’on croit. « En fait, les 123 points de la certification étaient pour bonne part déjà en route dans notre vignoble mais il fallait les formaliser ».

Quelles sont les grandes différences avec la viticulture classique ? « Les pratiques durable et HVE augmentent significativement le travail du sol, d’où une charge de travail plus lourde et plus pénible, et les premières années une délicate baisse de rendement de 10 à 15 % », reconnaissent Stéphane Varet et son collègue Bernard Pineau (Responsable Viticulture Durable au sein de Martell Mumm Perrier-Jouët). Pour les deux managers, la grande inconnue concernait surtout les réactions des employés. Mais les salariés qui travaillent sur le vignoble ont tout de suite adhéré au projet, devenant même force de proposition dans l’achat et le développement de nouveaux matériels.

Mumm et Perrier-Jouët viennent ainsi d’acquérir le premier pulvérisateur « confiné », encore à l’état de prototype. Ce matériel révolutionnaire est équipé de panneaux récupérateurs ; il capte les produits de traitement non retenus par les feuilles, évitant leur dispersion dans l’atmosphère. L’idée est si simple qu’elle paraît évidente, mais le prototype est encore à l’étude car il est plus lent qu’un appareil classique, traite moins de rangs à la fois, et peut être potentiellement dangereux dans les pentes (poids déséquilibrant). Dès cette année, Mumm et Perrier-Jouët mèneront de nombreux tests dans les zones « sensibles » : proximité des écoles et des habitations. Mieux vaut prévenir que guérir !

Au delà, c’est toute une réflexion environnementale qui est en route pour le vignoble. Mumm Perrier-Jouët s’est fixé pour objectif de planter 1 km de haies par an pour favoriser la biodiversité et mieux isoler les vignes des habitations. Plus encore, la journée Responsib’ All Day qui réunit chaque été tous les employés du groupe a été organisée cette année en collaboration avec la ville d’Epernay. L’objectif est d’éduquer et sensibiliser les collaborateurs à la biodiversité, et particulièrement le rôle des abeilles, dans le cadre du lancement d’une carte interactive par la ville auprès des habitants (ateliers de sensibilisation, construction de ruches, plantation de haies mellifères).

Porter la bonne parole

Mais le travail ne s’arrête pas à la périphérie des villes. Le rôle implicitement assigné à un groupe comme Mumm Perrier-Jouët est d’entraîner dans le sillage de son vignoble les 1500 ha que représentent ses achats de raisins auprès de viticulteurs champenois.
Là se trouvent les véritables leviers de basculement du vignoble car de nombreux petits viticulteurs-vendeurs au kilo sont encore réticents. Là se trouvent aussi de vrais enjeux économiques. Mumm et Perrier-Jouët assument un important rôle pédagogique (conseil, suivi personnalisé, prise en compte au cas par cas des coûts générés par un passage en viticulture durable…), mais ne toucheront pas au sacro-saint prix du raisin. « Il n’y a pas de raison d’apporter une prime à ce qui deviendra à terme la norme de production du vignoble », tranche Michel Letter, directeur général adjoint des deux marques. Il touche là du doigt le problème éternel de l’externalisation du « coût » de l’environnement !

Ci-dessous : Le référentiel « Viticulture durable en Champagne » est doté depuis fin 2016 d’un logo, qui peut figurer sur la contre-étiquette.

*La certification Haute Valeur Environnementale (HVE) est un référentiel applicable à toutes les productions agricoles qui « permet de mesurer la performance environnementale autour de quatre thématiques-clé : la biodiversité, la stratégie phytosanitaire, la gestion de la fertilisation et la gestion de la ressource en eau ». Viticulture durable en Champagne est pour sa part un référentiel technique mis en place par le Comité Champagne. Très proche du HVE, il est conçu spécifiquement pour la production viticole de champagne dont il intègre certaines spécificités, avec 4 grands objectifs « maîtriser le recours aux intrants ; préserver le terroir, ses paysages et sa biodiversité ; gérer de manière responsable l’eau, les effluents, les sous-produits et les déchets ; réduire la dépendance énergétique ainsi que l’empreinte carbone de la filière. »