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[PRIMEURS] Nicolas Magie : « il faut réapprendre à boire des bordeaux évolués »

Auteur

Mathieu
Doumenge

Date

02.04.2019

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Durant la semaine des Primeurs, le château La Dominique, grand cru classé de Saint-Emilion, a donné carte blanche à quatre chefs étoilées du Sud-Ouest. Chacun doit signer un plat spécifique pour les clients du restaurant La Terrasse Rouge – en partenariat avec Les Clés de Châteaux / Rolland Consulting. Hier, Nicolas Magie (Le Saint James*, Bouliac – 33) ouvrait le bal. Entretien.

Comment s’est décidé ce plat, « Carré de veau de lait grillé, premières morilles, nuage de café et parmesan, jus réduit » ?
On m’a proposé de signer un plat pendant la semaine des Primeurs, avec une thématique « Sud-Ouest ». J’ai tout de suite répondu oui. C’est important d’être présent sur ce type d’événement. Je suis un enfant du pays, je suis né à Cenon, j’ai grandi ici dans le Bordelais (quatrième génération de restaurateurs, et la cinquième est en marche avec la fille de Nicolas Magie qui s’apprête à suivre les pas de son père, NDLR), et j’ai toujours eu beaucoup d’affinités avec la rive droite – je suis, globalement, plus « merlot » que « cabernet ». Ce sont les vins qui m’ont accompagné depuis mon plus jeune âge ; mon père était un fou de Pomerol, et durant les grands repas de famille on ouvrait toujours de belles bouteilles de Saint-Emilion, de Pomerol, des vins de plus de vingt ans… c’était un grand bonheur et une chance d connaître ça. Pour en revenir au plat, j’ai su que j’allais devoir travailler sur un animal de lait, conforme à la saison, donc on est parti sur du veau du Pays Basque, c’est une viande fine et élégante ; naturellement on l’a associé à la morille, un peu de lard du pays basque avec une touche d’amertume par le café, une touche végétale avec l’asperge, une touche terrienne avec la truffe. On a trouvé que ça allait bien avec les vins de La Dominique, surtout les millésimes présentés hier (2005, 1998). C’est un plat réconfortant, avec du jus, qu’on a envie de saucer – c’est la base de la cuisine française.

A titre personnel, que trouve-t-on dans votre cave ?
Mon souci c’est que je bois vite (rires), donc je garde peu de vins. J’ai beaucoup de vins de Bordeaux et du Sud-Ouest en général, des irouléguys par exemple. Pour moi il est important de manger local et boire local. Si je vais en Bourgogne, je ne vais boire du bourgogne.

Comment travaillez-vous les accords mets & vins au Saint-James ?
J’ai eu la chance de travailler plusieurs années avec un excellent sommelier, Richard Bernard, qui a quitté le Saint-James, aujourd’hui c’est Frédéric Rouglan qui officie en cave, et ce que j’apprécie c’est qu’il est très proche de la région, il aime mettre en avant les vins de Bordeaux, il aime aussi beaucoup venir en cuisine, goûter les sauces à chaque service pour qu’on réfléchisse ensemble aux accords ; récemment on a travaillé un rouget sur l’acidité mais aussi avec de la moelle, on a trouvé un super accord avec un vin rouge de la rive gauche, c’est passionnant. La carte des vins reste le périmètre de Frédéric, j’interviens peu dans la carte des vins, même si je goûte souvent avec lui, notamment pour les vieux millésimes ou les vins au verre (on en a une soixantaine).

Les Primeurs de Bordeaux, cela vous inspire quoi ?
C’est toujours un moment important, même si je trouve que ça a l’air plus calme cette année. Je déguste quelques vins, mais c’est surtout la partie des sommeliers de goûter en primeurs. Il est important que l’on reste attentifs aux vins de Bordeaux, pour les mettre à notre carte. Personnellement j’adore le gamay du Beaujolais, mais je pense qu’il y a tout un travail de rééducation à faire autour des bordeaux, que l’on a tendance à servir trop jeunes : il faut réapprendre à boire des bordeaux évolués, des vins de 15-20 ans, car c’est là qu’ils expriment toute leur complexité et qu’ils se révèlent comme de grands vins de table.

Votre plus belle émotion de dégustation ?
J’ai le souvenir exceptionnel d’un dîner « truffes » avec la famille Mitjavile. On avait ouvert un Tertre-Roteboeuf du début des années 1980 – 81 ou 83 je crois. J’avais préparé un plat avec une truffe noire sublime, que j’avais sélectionnée moi-même auprès de mon producteur et servie en quantité. Il y avait plus de notes truffées dans le vin que dans l’assiette, c’était incroyable ! Ce vin a été une révélation. Mais à part ça, je reste très fidèle aux vins de Pomerol.

Michel Trama ce mardi 2 avril ; Jean Cousseau mercredi 3 avril ; et les frères Ibarbour jeudi 4 avril poursuivent cette semaine Sud-Ouest à la Terrasse Rouge, restaurant du château La Dominique, Saint-Emilion. En partenariats avec Les Clés de Châteaux – vins conseillés par Michel et Dany Rolland.
Réservations 05 57 24 47 05

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