Accueil Vins volcaniques d’Auvergne, pour le retour du printemps

Auteur

Laure
Goy

Date

04.04.2018

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Alors que la neige fond et que les bourgeons ressortent, on vous propose une petite balade en Auvergne. Ses fromages et volcans sont déjà bien connus, qu’en est-il de ses vins frais, typés et originaux ?

Rendez-vous dans le Puy-de-Dôme, en plein centre de la France. Au pays des vieux volcans, le paysage naturel est grandiose. Et les vignes bien présentes depuis des siècles. Au pied de la chaîne des Puys et de ses 80 volcans, s’étendaient alors jusqu’à 45 000 hectares de vignes à la fin du 19ème siècle, plaçant le vignoble auvergnat troisième de France par sa surface.
Un siècle plus tard, les ravages du phylloxera, les changements industriels, la pression urbaine et démographique en banlieue de Clermont ont participé à la réduction drastique du vignoble, n’offrant désormais plus que 400 hectares.
S’allongeant sur 80 kilomètres, du nord au sud de Clermont-Ferrand, en suivant les versants Est de la chaîne des vieux volcans et les cinq crus spécifiques reconnus (Madargue, Châteaugay, Chanturgue, Corent, Boudes), la première appellation de la Loire (à sa source) réunit 35 vignerons indépendants et les coopérateurs de la Cave Saint-Verny.

Vignes résistantes

Morcelées entre vergers, potagers, villages médiévaux, zones de lotissements et d’activité, les parcelles de vignes et leurs vignerons résistent. Elles attirent même des jeunes, venus parfois de très loin. Fous ces Gaulois ?

Au domaine des Trouillères, Jean-Pierre Pradier, une des figures déférentes dans la reconnais-sance du vignoble auvergnat, vient de passer les rênes au jeune Mikaël Hyvert et à sa compagne, venus tout droit de… Tahiti ! « En arrivant ici, cette terre de volcan m’a plu. Elle me rappelle l’île sur laquelle je travaillais. Je me suis vite senti chez moi », explique le jeune vigneron installé à Corent.

Plus au sud, au domaine de Miolanne, également en bio, Laure Cartier et Jean-Baptise Deroche ne sont pas non plus originaires d’Auvergne. Pourtant, ces terroirs au caractère typé les a charmé : « Nous adorions aller randonner sur les vieux Puys volcaniques, et nous aimions cette région auvergnate pour cette nature encore sauvage et préservée. Quand l’installation a suivi son cheminement dans nos têtes, après mon passage chez Romanin (Beaux-de-Provence, NDLR) et un an en Nouvelle Zélande, l’attrait pour les pierres ponces, la typicité des sols et ces vins d’expression, vraiment sur le fruit, nous a conquis », confie le vigneron lors de notre passage.

La géographie semble en effet propice à la culture de la vigne dans cette partie de l’Auvergne. Au 5ème siècle d’ailleurs, on la plantait déjà. Protégée à l’ouest par la chaîne des Puys, créant un effet de foehn, les précipitations sont moins importantes ici et permettent des étés plus chauds et plus secs qu’à l’ouest de la région. Quant à la richesse du sol, plusieurs millénaires d’activités volcaniques ont permis de faire ressurgir des granites, basaltes, marnes, des mélanges d’argiles plus ou moins profondes, une véritable mosaïque de terroirs.

Grâce à cette poignée d’irréductibles vignerons (Alesia est juste à côté…), les Côtes d’Auvergne obtiennent l’Appellation d’Origine Contrôlée le 16 novembre 2010. Dans le cahier des charges, les cépages historiques sont préservés : gamay d’Auvergne en cépage principal au caractère très poivré et qui se ramasse seul pour les rosés et certains rouges, ou s’assemble avec du pinot noir (il faut l’avoir planté à 50 % minimum) dans d’autres cuvées rouges. Côté blanc (10 % du vignoble), c’est tout pour le chardonnay, dont l’expression dans le verre et le rapport qualité-prix sont souvent bluffants. Confirmation par Pierre Desprats, le directeur de la cave Saint-Verny, la seule coopérative des vins d’Auvergne : « Nous sommes assis sur une mine d’or. Seuls sept vignobles dans le monde voient leurs raisins pousser sur des volcans. Et ces sols de basalte, cette minéralité unique, permet de voir naître des blancs extraordinaires. Quant aux rouges à la fois frais, épicés et puissants, ils n’ont aucun équivalent, je ne cesse de l’affirmer. Je suis heureux de voir la filière des vins d’Auvergne s’organiser, grâce aux vignerons indépendants et aux coopérateurs qui avancent ensemble. Et aussi grâce à des jeunes qui décident de s’installer ici et de planter de la vigne » explique le directeur auvergnat, fier de l’être.

Cuvées de Volcans pour le printemps

Si vous vous baladez dans ce vignoble volcanique, laissez-vous surprendre par les vignerons. Voici un avant-goût, et une sélection de quatre cuvées pour vos assiettes de printemps.

Yvan Bernard, Oppidum 2016 (9 €)

On vous l’écrivait un peu plus haut, les blancs d’Auvergne sont des pépites, au rapport qualité-prix défiant toute concurrence. Chez Yvan Bernard, le chardonnay est cultivé en bio sur des basaltes et calcaires, dans ce site historique proche de la vallée de l’Allier, avant d’être ramassé manuelle-ment, et vinifié en douceur. Résultat dans le verre : un vin blanc à la fois minéral et généreux, un velouté de bouche légèrement crémeux (pêche-abricot) et une finale agrumes, marquée par ses cailloux originels, et une belle floralité. A servir à l’apéro avec une truite de l’Allier, ou un cantal entre-deux.

Annie Sauvat, Petite Folie 2017 (7,50 €)
Alors que le soleil revient et que les prairies verdissent, cette cuvée rose deviendra votre gourmandise de printemps. Annie Sauvat travaille, avec ses parents, sur 10 hectares de vignes au village vigneron de Boudes, le cru le plus sudiste des Côtes d’Auvergne. Dans ce rosé, le gamay est vinifié en gardant un peu de sucre naturel, pour une explosion de fruits rouges en bouche, gour-mande et framboisée, et une légère sensation sucrée en finale, sans lourdeur aucune. Un bonbon !

Domaine Miolane, Volcane 2017, 6,60 €
Côté rouge, le pinot et le gamay se rencontrent à part égale dans cette cuvée certifiée bio, pour un jus très frais, et tout en épices : réglisse, poivre frais écrasé, baies roses. Il faut le découvrir avec les premières grillades dans le jardin.
Ou en s’arrêtant au domaine, entre mi-juin et fin septembre, où un bar à vins éphémère naît entre 11h et 15h, devant le grand chai en mélèze. On y déguste les vins du domaine bien sûr, mais aussi ceux « des copains », comme les vins du Mas de Gourgonnier en Provence (tenu par les parents de Laure), l’huile d’olive du Moulin d’Aureille ou encore un riz bio de Camargue produit par un oncle de la famille.

Benoit Montel, Le Sang des Volcans 2015, 17 €
Un coup de cœur de dégustation, pour cette syrah très atypique, à la fois soyeuse, ultra-concentrée en fruits noirs et en épices, et conservant une large ampleur, une grande fraîcheur. La finale est sapide et donne un goût de reviens-y. Pour vos premiers navarins d’agneau, une côte de bœuf aux sarments, ou un bœuf thaï, les invités seront forcément conquis.