Accueil Antoine Sanzay : « c’est dur, de faire le vin qu’on aime ! »

Antoine Sanzay : « c’est dur, de faire le vin qu’on aime ! »

Auteur

La
rédaction

Date

04.02.2014

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Antoine Sanzay est au Salon des vins de Loire à Angers. Le vigneron saumurois nous a reçus sur son stand pour nous faire déguster ses vins et nous faire partager son histoire, sa vision du vin et du terroir.

Antoine Sanzay a une énergie communicative, une bonne humeur contagieuse et le tutoiement facile. Cela suffit à donner envie de poser les coudes sur la table pendant de longues minutes pour l’écouter parler de ses vins, et surtout les goûter. Présent au Salon des vins de Loire qui se déroule jusqu’à demain au Parc Expo d’Angers, le vigneron saumurois nous a reçus sur son stand pour nous raconter sa trajectoire, entamée en 2002. Dix-neuf ans après le décès de son père, survenu en 1983 dans un accident de voiture (le vignoble était entre-temps géré par des proches de la famille), Antoine a repris les rênes de la propriété, qui s’étend aujourd’hui sur 11, 40 hectares en appellations Saumur (1, 1 ha) et Saumur-Champigny (10, 3 ha). Dix-neuf longues années durant lesquelles Antoine a pris le temps de grandir, et de réfléchir, avant d’incarner la sixième génération à la tête du vignoble familial. Et de produire, pas à pas, millésime après millésime, un vin qui lui ressemble : « Quand tu débutes, c’est le vin qui te fait : tu as tout à apprendre, tu reproduis des choses que l’on t’a enseigné. J’ai trouvé mon chemin au fur et à mesure. Aujourd’hui, je peux dire que je fais mon vin. Et c’est dur, de faire le vin qu’on aime, le vin qu’on aime boire ! »

Mais c’est quoi au juste, le vin qu’il aime, Antoine Sanzay ? Le vin qu’il veut faire ? Des vins ciselés, précis, qui préféreront tendre vers l’austérité que vers la démonstration ou le « show off ». Des vins en adéquation avec une certaine « philosophie », aussi. « Je suis passé du conventionnel au bio (dernière année de conversion, NDLR), je veux des sols aérés, vivants, que je travaille différemment selon les conditions du millésime, avec de micro-doses de cuivre appliquées pour accompagner la croissance de la plante. Je minimise mes interventions, pas de levurage, du soufre au millimètre. Je veux que mes vins aient de la tenue, je veux que ça « claque ». Et surtout je les accompagne tout le temps, je suis à l’écoute. Même en limitant les interventions, le vin ne se fait pas tout seul. » Soucieux que chaque vin soit « la juste photo de l’année », Antoine déclare préférer les millésimes difficiles, où le soleil ne dicte pas sa loi : « c’est là que mes jus sont le plus en cohérence avec les conditions du millésime ».

Les Poyeux, question d’équilibre

Rien de mieux que de déguster pour illustrer un propos. En commençant par la cuvée Domaine 2013 (prix indicatif 12 €), un vin vinifié en cuve béton, soutiré depuis deux mois, qui exprime un joli fruit, tout en évidence. Suivi d’une nouvelle cuvée, La Haye Dampierre 2013 (prix indicatif 20 €), issue d’un terroir qu’Antoine réservait jusque-là à la coopérative. Un terroir sablo-limoneux, légèrement argileux, qui donne un vin (passé 6 mois en fûts de 4-5 ans) énergique, croquant, avec un côté noyau très séduisant.

Mais c’est la cuvée Les Poyeux qui porte vraiment la signature d’Antoine Sanzay (prix indicatif 25 €). Un terroir de deux hectares orientés sud / sud-est, sol argilo-calcaire, voisin des sables du Clos Rougeard, dont les vignes ont 50 ans en moyenne (huit parcelles d’âges différents). Sur ce terroir, le vigneron se livre à une sélection drastique, réservant le top de la qualité. « J’ai fait la première cuvée Les Poyeux en 2008, à l’époque où je trouvais enfin mon style. Au début, j’étais sur l’extraction, je voulais épater. C’est en 2007 que j’ai vraiment trouvé ma « touche » pour mes vins. Dans le cas des Poyeux, je procède à un élevage de 16 à 18 mois en fûts de 3-4 vins, puis je finis en cuve, pour les lier. Je bouche au moment des vendanges, deux ans après ». Dégusté sur les millésimes 2013, 2012, 2011, Les Poyeux allie puissance, équilibre, fruit vibrant, finesse des tanins, et surtout un côté juteux, sanguin, qui appelle une belle viande rouge.

Fin de la dégustation avec le saumur d’Antoine Sanzay, Les Salles Martins 2013. 100% chenin comme il se doit, issu d’un terroir très calcaire et de vignes de 40 ans en moyenne, ce blanc recherche l’acidité mais la dompte avec un élevage en fûts de 600 litres. Un vin vif et équilibré. L’équilibre, une notion toujours centrale dans les productions d’Antoine Sanzay.

Mathieu Doumenge