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Caroline Frey, premiers pas sur La Lagune

Auteur

La
rédaction

Date

06.08.2012

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Elle se balade. Pas un bruit sur les abords du Château La Lagune. Seul le son des gravillons qui crépitent sous les pas légers et nonchalants de Caroline Frey. Tout semble fluide, facile, sur le chemin blanc qui mène aux chais. Taille de guêpe, genre mannequin en 501, le visage oblong, des joues d’enfant, des yeux bleus que d’épaisses arcades compressent un peu, lui offrant un délicieux semblant d’innocence, cette fée clochette transforme le raisin en vin. Jésus faisait mieux, mais c’est déjà pas mal.

Elle est née loin de Bordeaux, via la diagonale du vide, dans le Champenois, autre région viticole. Millésime 78, CHU de Reims. Le père, Jean-Jacques, est un important homme d’affaires dont la fortune est aujourd’hui estimée à 300 millions d’euros. Il adore le vin. A la fin des années 1980, papa acquiert un domaine au pays de la bulle, le vignoble Germain. Caroline a une dizaine d’années, ce n’est pas son dada. « Durant mon adolescence, dit-elle, je ne me suis pas passionnée pour le vin. Je préférais les chevaux, le saut d’obstacles, j’y consacrais mon temps ». Appliquée, décidée, elle intègre l’équipe de France junior tout en passant un baccalauréat scientifique par correspondance. Ce n’est qu’en 1999 que Mademoiselle F arrête les concours hippiques pour un DEUG de Chimie, année où son père achète les champagnes Ayala et le Château La Lagune, troisième au Classement des Grands Crus Classés 1855. « Le rêve de mon père a toujours été de venir à Bordeaux, d’avoir un jour un Grand Cru dans le Médoc, explique Caroline. Lorsque son ami Alain Ducellier a vendu cette propriété, c’était l’occasion de réaliser son rêve ».

Après la faculté de Sciences, la jeune femme ressent une attirance pour le vin ; elle intègre la fac d’oeno de Bordeaux et tombe sous le charme de son professeur Denis Dubourdieu. Comme dans les films, ce dernier la prend sous son aile. L’étudiante décroche un stage chez Monsieur Dubourdieu. La classe ! Le diplôme en poche, elle rejoint logiquement La Lagune. « Je suis arrivée en proposant à l’équipe en place certaines remises en causes. A tort et à raison. C’est toujours stimulant », confie-t-elle. D’évidence intelligente et rigoureuse, elle fait les choses à fond, comme si le fait d’être née sous une bonne étoile lui imposait de décrocher la lune. « L’objectif est de mettre la barre très haut, replacer les vins de La Lagune à leur prestige d’antan et de développer la cuvée Mademoiselle L ». Le défi est de taille, d’autant que Caroline Frey a pris en 2009 la direction générale de Paul Jaboulet Aîné dans les Côtes-du-Rhône (achat en 2006). A savoir que le challenge « Frey » n’avait pas été concluant pour Ayala – revendu depuis à Bollinger – et que Jaboulet n’est pas au mieux de sa forme… C’est beaucoup pour la fee clochette. Le talent, le travail et le prestige des 90 ha de la lagune devraient avoir raison de ce defi. Sinon l’enfant gâtée pourrait souffrir du syndrome de Peter Pan.

Par Jean-Charles Chapuzet.
Photo Rodolphe Escher.