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Accords mets et vins : champagne et cuisine étoilée

Auteur

La
rédaction

Date

17.09.2013

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La bulle sera donc gastronome en cette rentrée. En moins d’une semaine, deux marques, Nicolas Feuillatte et Alfred Gratien et un groupement, Les Champagnes de Vignerons, jouent la carte de la gastronomie en associant dans leur dégustation millésimes et cuisine de chefs étoilés afin de rappeler que le champagne, roi des cocktails et des fêtes, a aussi sa place à table.

Simone Zanoni (cf. photo), chef doublement étoilé au Trianon Palace à Versailles, avait élu domicile à La Table Ronde, le temps d’une escale dans cet amphithéâtre culinaire de poche (il n’y a que seize places) pour mettre en scène un menu soulignant les nouveaux millésimes de la maison Nicolas Feuillatte avec l’année 2005 comme fil conducteur.

Si l’accord fut subtil à trouver sur le consommé givré de tomates cœur de bœuf à la verveine et ses langoustines royales avec la cuvée Brut Chardonnay (il est toujours délicat d’associer les liquides entre eux), le foie gras poêlé sur sa tarte d’amaretti aux pêches accompagné d’un caramel à la cardamome le trouva aisément sur la Cuvée Spéciale (40% chardonnay, 40% pinot noir, 20% pinot meunier), très équilibrée, l’acidité du vin venant déglacer à froid le gras sucré du mets.

Accords parfaits en ce qui concerne le tartare de bar de ligne aux deux poivrons et effiloché de tourteau sur son lit de guacamole avec un Grand Cru Chardonnay ainsi que pour le veau du Limousin cuit au beurre de sauge, crème d’ail et sauce Madeira, accompagné de baby légumes croquants avec la cuvée Palme d’Or 2002, le dernier millésime datant de 1999 pour cette cuvée d’exception au vieillissement de 9 ans minimum, créée à la demande de Nicolas Feuillatte, afin de célébrer sa passion pour une cantatrice.

Et lorsqu’on demande au chef Zanoni en quoi réside le secret de ces accords, il répond, sans le faire, qu’avec une telle complexité aromatique, il serait difficile de passer à côté. Et, de fait, les saveurs complexes, mais jamais mélangées, de sa cuisine semblent appeler les arômes des cuvées comme autant d’échos.

La fumée du havane pourrait même se marier, selon David Henault, chef de cave de Nicolas Feuillatte, avec la cuvée 225 brut qu’il qualifie de « coin du feu » car marquée par les arômes des fûts de 225 litres où elle est élevée.

C’est ce même mariage aérien que l’on retrouvait dans les accords lors de la dégustation des champagnes Alfred Gratien au Laurent avec Alain Pégouret (une étoile au guide Michelin) et Philippe Bourguignon (meilleur sommelier de France et actuel directeur).

Ne cherchez pas d’accords en bouche entre ces rouelles de pieds de porc et pomme de terre servies avec un Blanc de Blancs 2007 (cuvée créée en 2001 pour La Wine Society à Londres), ni entre cette délicate bouillabaisse froide en gelée fondante et le millésime 2000 (64% chardonnay, 25% pinot noir, 11% pinot meunier) ou entre cette noix de ris de veau rissolée au sautoir aux girolles poêlées et la cuvée Paradis rosé 2006 (53% chardonnay, 37% pinot noir), ils sont ici sublimés, au sens premier du terme, c’est-à-dire, à l’état gazeux. La finesse des saveurs répond à la suspension dans les effluves de ces cuvées.

La fermentation en petits fûts de chêne de 228 litres d’au moins quatre vins de Chablis, marque du savoir faire de la maison Gratien, n’y est sûrement pas étrangère comme aime à le rappeler Nicolas Jaeger, dont la famille y tient la fonction de chef de cave depuis quatre générations.

Du côté de la marque collective Les Champagnes de Vignerons, on a parié sur la pédagogie en demandant au chef Akrame Benallal (1 étoile au guide Michelin pour sa table parisienne éponyme) d’associer mets et catégories de champagnes pour créer un jeu de sept familles. S’il est trop tôt pour dire si cette approche ludique sera payante avec les générations futures, on peut regretter que les recettes du jeu n’aient pas été retenues pour les accords lors de la dégustation. La cuisine de marché proposée n’était pas à la hauteur de vins qui auraient mérité bien mieux, comme les cuvées Révélation 2009 (100% pinot meunier) d’Alexandre Le Brun, Vintage 2005 (44% chardonnay, 56% pinot noir) de Chassenay d’Arce, Lady brut premier cru 2004 (85% chardonnay, 15% pinot noir) de Paul Goerg ou Grands Vintages (30% chardonnay, 70% pinot noir) d’Eric Rodez.

Fort de ses 5000 adhérents, chaque dégustation des Champagnes de Vignerons est toujours l’occasion d’y découvrir quelques perles.

Texte et photo Jean Dusaussoy