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La famille Saint-Estèphe, comme un seul homme

Auteur

La
rédaction

Date

14.02.2014

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Retour sur la soirée « Saint-Estèphe Tasting », organisée hier par « Terre de Vins » au Grand Hôtel Bordeaux & Spa. Près de 600 amateurs ont répondu présent pour découvrir toute la diversité des vins de Saint-Estèphe.

A Saint-Estèphe, on sait jouer groupé. Sur les 55 châteaux (plus la coopérative) que compte cette prestigieuse appellation du nord-Médoc, ils étaient 45 à avoir répondu présent à l’invitation de « Terre de Vins » pour l’événement « Saint-Estèphe Tasting » organisé hier soir au Grand Hôtel Bordeaux & Spa.

Une grande dégustation qui a attiré près de 600 amateurs, curieux de découvrir, verre en main, la belle diversité de ce vignoble. Diversité des styles, particulièrement vérifiable sur le millésime 2011, qui était à l’honneur hier (même si certains exposants avaient apporté des millésimes plus anciens pour offrir des perspectives aux dégustateurs). Mais aussi diversité des types de propriétés : avec une coopérative, des grands crus classés, des crus bourgeois, des crus artisans, et des crus ne s’inscrivant dans aucun classement, Saint-Estèphe offre un éventail unique parmi les « grandes appellations » médocaines.
Ce qui permet aux amateurs de déguster aussi bien le top de l’excellence bordelaise (avec un « super second » comme le château Cos d’Estournel, par exemple) comme de dénicher des pépites présentant un remarquable rapport qualité-prix. Le palmarès des saint-estèphes 2011, établi dans le dernier numéro de « Terre de Vins » et consultable en suivant ce lien, ne dit pas autre chose : sur le podium, bien placé entre les « stars » Cos d’Estournel et Haut-Marbuzet, on trouve ainsi le château Petit Bocq, un vin « surprise » à 19 €.

Jeunesse et enthousiasme

Justement, Ramon Rojo, le chef de culture de Petit Bocq, faisait déguster hier soir son vin aux amateurs, très curieux de découvrir cet étonnant « numéro deux » : « on sent beaucoup d’enthousiasme, les visiteurs viennent nous voir pour découvrir notre vin. A Petit Bocq nous voulons faire du vin « pour tout le monde », produire avec humilité un petit vin qui a les ambitions d’un grand. Nous sommes donc ravis d’avoir de si bons retours, surtout de la part de ce jeune public, très féminin ce soir, avec beaucoup de 25-30 ans. »

La jeunesse, l’enthousiasme des amateurs présents : une dimension soulignée par de nombreux représentants de châteaux. Comme Sophie Marc, qui incarne la « nouvelle génération » de Calon-Ségur (3ème Grand Cru Classé) : « cette soirée est un gros succès, les gens sont contents, nous sommes ravis de faire déguster nos vins à de jeunes amateurs. Nous leur présentons le premier et le second vin, en 2011, mais aussi en 2008, pour qu’ils puissent juger de l’évolution de nos vins dans le temps. » Et plus largement, nombreux sont ceux qui ont souligné, comme lors de Bordeaux Tasting en décembre dernier, l’importance de (re)venir à la rencontre du grand public bordelais : « habituellement, nous faisons des opérations de dégustation pour les professionnels […] mais ce soir nous allons vers les consommateurs, le grand public, autant d’acheteurs potentiels », a ainsi souligné à nos confrères de Sud-Ouest Bernard Audoy, du château Cos Labory et président du syndicat viticole de Saint-Estèphe. « C’est notre métier, notre mission d’être présents sur de tels événements, pour faire déguster nos vins au grand public », complète Michel Tesseron, du château Lafon-Rochet.

Les « derniers des Mohicans » ?

Un enthousiasme partagé par Didier Marcelis, le propriétaire du château Sérilhan : ce cru bourgeois « qui monte » à Saint-Estèphe (il vient d’arriver premier sur 256 crus bourgeois dégustés par le Wine Advocate de Robert Parker), conseillé par Hubert de Boüard (Angélus), est passé en dix ans d’une propriété familiale de 9 hectares qui vendait tout en vrac, à une propriété « moderne » de 30 hectares vendant tout son vin en bouteille et en primeurs (60% à l’export). Une trajectoire fulgurante qui témoigne de la vivacité de l’appellation Saint-Estèphe, où de nouveaux visages continuent d’apparaître. Mais Didier Marcelis tempère : « nous sommes les derniers des Mohicans. Sans doute la dernière génération qui peut défendre ce pluralisme de Saint-Estèphe, entre coopérative, grands crus classés, crus artisans, crus bourgeois… Après, avec la hausse des prix du foncier, les difficultés de la transmission entre générations, avec la nécessité d’instaurer une « lisibilité de l’offre », qui sait si Saint-Estèphe pourra continuer à afficher cette diversité, et permettre aux consommateurs de trouver d’excellents vins à 15-20 € ? »
Retrouvez les photos de la soirée « Saint-Estèphe Tasting » très rapidement sur notre site et sur notre page Facebook.

Mathieu Doumenge
Photo : G. Bonnaud pour Sud-Ouest