Accueil Terroirs et Vignobles Côtes-de-Gascogne, nouvelle vague blanche ?

Auteur

Laure
Goy

Date

09.04.2019

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A l’occasion d’un évènement de promotion qui se tenait à Paris tout récemment, les représentants syndicaux et les producteurs de Côtes-de-Gascogne ont voulu (re)faire découvrir les vins blancs (secs, moelleux et doux) de leur territoire et mettre leurs cépages locaux à l’honneur, invoquant notamment le gros manseng comme « cépage d’avenir et en devenir ».

« Les Côtes de Gascogne représentent 90% des blancs dans les appellations du Sud-Ouest », explique Alain Desprats, en guise d’introduction le directeur. Cette IGP viticole du Gers, située à mi-chemin entre Bordeaux et Toulouse, au cœur du Sud-Ouest, représente aujourd’hui 12 000 hectares de vignes en production sur la même zone de production que l’Armagnac. Construite pour répondre aux attentes d’un marché jeune (cœur de cible entre 20 et 50 ans), avec des blancs à l’aromatique très reconnaissable (thiols, agrumes, fruits exotiques), l’IGP Côtes-de-Gascogne avait trouvé, jusque-là ses aficionados hors du territoire français (70% à l’export). Il faut rappeler que les blancs, en Côtes-de-Gascogne, c’est 85% des volumes de l’IGP, profil atypique dans les appellations du Sud-Ouest.

Gros Manseng, sous les feux de la rampe

Après avoir travaillé sur la construction de ces vins blancs tendance, « frais, fuité, léger », dont les prix oscillent en moyenne entre 5 et 8 €, les Côtes-de-Gascogne veulent maintenant démontrer qu’une dynamique de montée en gamme est en marche. Notamment par la revalorisation des cépages blancs historiques de la zone, comme le gros manseng. « C’est le 2ème cépage le plus planté en Gascogne en 2017, après notre emblématique colombard. Le gros manseng représente 2 400 hectares dans le vignoble, soit 20 % de l’encépagement total », expliquent Alain Desprats et Olivier Dabadie, le président de la section interprofessionnelle des Côtes-de-Gascogne. Singulier et autochtone de cette région verte (il pleut 600 mm par an en terres gasconnes), aromatique et plus structuré que certains de ses cousins, il a l’avantage d’être travaillé en sec comme en moelleux. Plus petits rendements que ses cousins colombard ou ugni blanc (le rendement maximum est de 120 HL/hectare en IGP Côtes de Gascogne), l’utilisation du gros manseng permet aux blancs gascons de se repositionner sur le marché français. « La demande des français en blancs moelleux et doux a progressé de 44% en cinq ans, une consommation souvent associée à l’apéritif, plébiscitée par les jeunes de 20-30 ans », explique les représentants des Côtes de Gascogne. Image fruitée, accessible, gourmande mais fraîche par l’acidité naturelle, ces vins moelleux et doux convaincraient donc de nouveaux amateurs chaque année. Une dynamique qui permet aux producteurs de faire le choix de certaines cuvées à plus petits rendements et une typicité un peu plus personnelle.

Moins mis en valeur, le petit manseng, cépage aux grains plus petits (également utilisé en Gascogne pour 400 hectares, mais aussi en Pacherenc et dans toute la zone du Piémont Pyrénéen). Avec ses peaux plus épaisses, ses jus à l’allure exotique, on peut le travailler à tous les stades de sucres, jusqu’aux liquoreux. Il pourrait être une piste d’évolution positive pour ces blancs gascons.

Trois cuvées gasconnes à retenir

Parmi les propositions, voici trois cuvées qui ont tapé dans le palais, pour votre printemps.

Réserve 2016, domaine de Pellehaut (13 €)
A Pellehaut, il s’agit de 350 hectares de vignes (2,8 millions de bouteilles par an), 120 hectares de prairies pour l’activité d’élevage bovin, 2 hectares de chênes truffiers…. Le tout géré par Mathieu et Martin, deux frères discrets, animés par une idée d’agriculture circulaire : les pâtures pour les bovins, le fumier des bovins pour la vigne, et le raisin pour le vin, pour résumer (grossièrement). Depuis quelques années, plus aucun engrais chimique ne serait utilisé sur le domaine.
Dans Réserve blanc, c’est le chardonnay (65%) qui s’allie avec du petit manseng, issus tous les deux de vieilles vignes, pour un résultat rond, charnu. La prouesse technique de vinification est de garder la récolte précoce de chardonnays à zéro degré pendant un mois, le temps que les petit mansengs arrivent à maturité et qu’on puisse les vendanger, pour que les deux raisins macèrent et fermentent ensemble. Résultat, c’est le beurre frais qui se marie avec une coupe exotique, très charmeur. Il inspire des cuisines de crustacés snackés, de volaille rôtie aux fruits, pourquoi pas un fromage affiné à pâte cuite.

Jardin Secret 2018, Villa Dria (6,50 €)
Ce 100 % gros manseng, travaillé en vin moelleux par le vigneron Jean-Pierre Drieux (également président du syndicat des Côtes de Gascogne) est une jolie balance aromatique entre les fruits jaunes (pêche, notes abricotée), des allures exotiques sucrées (mangue rôtie) et une certaine acidité finale. « Cette cuvée a connu des ventes de plus de 50 % en 5 ans, la demande est surtout française », explique le vigneron. « C’est super avec une cuisine asiatique, des accords salés-sucrés, mais aussi avec une belle tranche de foie-gras gersois », promet Jean-Pierre Drieux. Le vigneron et son équipe accueillent les visiteurs tous les jours de la semaine dans sa cave récente et sur le vignoble de 75 hectares (certifiés HVE niveau 3), pour expliquer et déguster, de préférence sur rendez-vous (y compris les groupes).

Orféo 2018, Domaine Séailles (8,50 €)
Manseng signifierait « cépage de la maison », la « mans » ou « manse » étant la maison du maître. Autrement dit, selon les gascons, le manseng serait donc le raisin préféré des maîtres de la maison. A vous de vous faire votre idée maintenant.
Issue de gros manseng (80%) et de petit manseng, cette cuvée a débuté son histoire le 5 novembre 2018, à la date de la vendange. Les raisins avaient eu le temps de passeriller sur souches (sécher sur pied) pour donner une concentration aromatique (exotique, abricot sec, miel) douce, confite, mais avec une belle fraîcheur. Le domaine de Séailles, avec ses 26 hectares, travaillés en agriculture biologique aujourd’hui par l’œnologue Julien Franclet, fait partie des petits poucets (en IGP Côtes de Gascogne, la taille moyenne d’une entreprise viticole est plutôt autour de 100 hectares), mais conquiert par le niveau de qualité des vins (découvrez également la gamme Presto en blanc et en rouge).