Accueil Champagne Joseph Perrier : une rentrée chargée

Auteur

Yves
Tesson

Date

17.09.2020

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Benjamin Fourmon, qui a succédé à son père à la tête de Joseph Perrier en 2018, vient de présenter le nouveau circuit de visite de ses caves. Avec un investissement de deux millions d’euros, il ne s’agit pas d’une intervention cosmétique mais d’une rénovation en profondeur dont le résultat vaut le détour. Côté vins, une cuvée Brut nature est venue enrichir la gamme, témoignant là aussi de la capacité de la maison à innover tout en respectant l’ADN initial de la marque.

Musée historique introductif, carte géante de la Champagne et des parcelles qui approvisionnent la Maison, éclairages mettant en perspective la profondeur des galeries, salle de dégustation installée dans l’ancienne cuverie en béton, ravalement des façades en carreaux de craie et aménagement de jardins dans la cour intérieure : le nouveau circuit touristique de la maison Joseph Perrier a de l’allure !

Il faut avouer que la Maison dans ce domaine a une belle carte à jouer. Joseph Perrier est l’unique maison installée à Châlons en Champagne. Un bel écrin : on a rebaptisé la petite ville aux canaux majestueux et aux vieilles maisons à colombages, du qualificatif sympathique de « Venise de la Marne ».

Il y a aussi une histoire à raconter car au XIXe siècle, Châlons, et en particulier la colline crayeuse du petit Fagnières, était l’un des principaux cœurs de l’innovation dans le monde de la bulle. La ville comptait huit maisons de champagne, dont la maison Jacquesson, qui, tout en développant les premières plaques de muselets, du haut de ses 800.000 bouteilles expédiées chaque année, rivalisait dans les années 1850 avec Moët & Chandon. Elle était aussi la patrie de Jean-Baptiste François, un pharmacien resté célèbre pour avoir mis au point une méthode scientifique permettant de quantifier le sucre nécessaire à la seconde fermentation et limiter ainsi la casse des bouteilles.

Joseph Perrier s’est implanté ici en 1826, un an après la création de sa marque, alors que ses locaux d’Avize devenaient insuffisants. Fort d’un succès international, il ne tarde pas à prolonger les anciens caveaux gallo-romains, adossés à l’ancien relais de poste, en creusant de larges galeries sur un seul niveau, parfaitement géométriques et éclairées grâce à une invention astucieuse : des réflecteurs en fer blanc placés au fond des puits d’aération. L’accès de plain-pied, à la différence des crayères de Reims, facilitait les expéditions, d’autant qu’une voie ferrée ne tarda pas à renforcer l’axe routier qui conduisait à Paris. Le commentaire du journal l’Illustration du 23 août 1862 décrit ainsi une maison où règnent « les meilleures conditions d’ordre, de surveillance et d’économie ».

Aujourd’hui, ce lieu magnifique exige un entretien permanent. À la suite de la tempête de 1999, la Maison Joseph Perrier a dû replanter 5000 arbres en surface pour éviter que les caves ne soient régulièrement inondées. On a aussi pris l’habitude de sonder chaque année les voûtes. Un effort financier qu’il faut saluer alors qu’ailleurs la tentation est souvent grande d’abandonner ces magnifiques galeries pour ne plus utiliser que des bâtiments climatisés.

Le nouveau Brut nature de Joseph Perrier

On l’aura compris, si la maison veut faire peau neuve, c’est toujours dans le respect de son ADN initial. Un peu comme cette cuvée Brut Nature qui vient enrichir sa gamme de champagnes. « Dans cet assemblage mêlant Chardonnay, Pinot noir et Pinot Meunier, il y a tous les terroirs historiques de la Maison avec des vignerons qui travaillent pour nous depuis parfois plusieurs générations » confie Nathalie Laplaige, la chef de caves. « Prenez les Chardonnays, on a utilisé ceux de Bassuet dans le Vitryat qu’on retrouve dans l’ensemble de nos cuvées non millésimées et qui donnent ce zeste de citron en fin de bouche, ceux de Cumières plus puissants et corsés, et ceux de Chouilly et d’Avize pour l’élégance et la fraîcheur. » L’idée trottait dans la tête de Benjamin Fourmon depuis son arrivée en 2014. À l’époque, ce n’était pas vraiment la tendance, même si aujourd’hui chacun sait que le Brut nature constitue un élément indispensable pour qui veut séduire le secteur de la gastronomie. Prix recommandé 38 €.