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Château de Camensac : une nouvelle identité

Auteur

Michel
Sarrazin

Date

01.02.2019

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5ème Grand Cru Classé 1855 (Haut-Médoc), le château de Camensac qui semblait s’être assoupi pendant les années 90 et avait fini par décevoir certains de ses détracteurs, sort de sa torpeur. Depuis 2005, ses propriétaires, Céline Villars-Foubet et Jean Merlaut, ont pris des décisions courageuses pour le remettre au niveau de son rang.

Co-propriété, depuis les années 1960, de la famille Merlaut et de Enrique Forner (Marques de Caceres), Camensac est devenu l’entière propriété de l’une des petites-filles de Jacques Merlaut, Céline Villars-Foubet, et de Jean Merlaut, fils de Jacques.

A cette époque, la réputation des vins de Camensac n’est pas au beau fixe, malgré sa présence au classement 1855. Céline Villars-Foubet développe une analyse lucide et sans concession : « si ce château s’était bien porté, il n’aurait pas été à la vente ». En cause, « Camensac, un peu coupé du milieu viticole bordelais et de son émulation, n’a pas suivi l’évolution qualitative des années fin 80 et 90 ». Il « est resté sur une manière traditionnelle et sur une logique de production ». Et d’ajouter : « dans les grands millésimes, on avait des choses honorables. Mais dans les millésimes plus difficiles, il y avait entre 0 et 20% de second vin, ce qui est faible (50% maintenant) ». On était aussi dans une « logique de petit prix et 90 % de la production partait en Grande distribution ». Une politique assumée « qui permettait à un acheteur d’avoir un cru classé à un prix très accessible ».
Toutefois, Camensac devant « honorer son rang », les deux nouveaux propriétaires prennent des décisions courageuses.

Des changements décisifs, une équipe renouvelée

Jean Merlaut, propriétaire également de Gruaud Larose (2ème cru classé de Saint Julien) mais aussi négociant, s’occupera donc avec rigueur de la partie financière. Céline, déjà propriétaire du Château Chasse-Spleen à Moulis, sera présidente. Son mari devient directeur général.

Dès 2005, « la part du second vin augmente et monte à 40% », sur un très beau millésime pourtant. On sélectionne donc et on pratique avec rigueur les assemblages, avec l’aide d’œnologues talentueux – tout d’abord Michel Rolland, auquel succèdera, en 2006, Eric Boissenot. Céline Villars-Foubet ne tarit pas d’éloges sur « son » œnologue : c’est un « passionné, extrêmement fort et modeste ; il laisse les équipes des châteaux signer leur production. Dès 2006, date de la première intervention d’Eric, la rusticité de Camensac avait disparu. La signature de Camensac est retrouvée: la texture velours et soyeuse est de nouveau là ».

Dans le même temps, un audit du vignoble est conduit, avec une étude parcellaire précise qui conduit à arracher et replanter 25 ha. « On est au bout du projet ». Il n’y a pas de petit Verdot actuellement sur la propriété mais avant d’envisager d’en planter, il faut « conforter l’itinéraire technique mis en place : on doit confirmer les choix pour le moment. »

Parallèlement, l’équipe technique se renouvelle et s’étoffe. En 2014, l’œnologue Claire Thomas-Chenard (qui s’est illustrée à Saint-Emilion au sein des vignobles du groupe AG2R-La Mondiale) est recrutée pour occuper le poste de directrice de production. Une « focale vignoble lui est demandée pour achever de ramener Camensac à son rang ». Puis, en 2017, Mélissa Avril est, elle aussi, recrutée et est chargée de l’accueil oenotouristique et de la promotion du château dans les salons.

Le château de Camensac soigne aussi sa communication. Tout d’abord via une nouvelle étiquette qui reprend le thème de la « résille » et que l’on retrouve dans l’alignement des nombreuses ampoules qui éclairent le chai à barriques. Puis par un joli site web, totalement refondu, agrémenté par des textes empreints de poésie écrits par Didier Arnaudet, écrivain et critique d’art, et des photos signées Sabine Delcour.
Avec ce nouveau cap, Camensac est prêt à relever de nouveaux défis. En ligne de mire, la campagne des primeurs 2018 : un beau millésime qui arrive à point puisque, en 2017, le gel de printemps n’avait pas permis d’avoir une récolte. En 2018, « il ne fallait pas trop extraire et notre travail au chai est resté soft : juste un délestage c’est tout ». Les équipes annoncent « un vin prometteur », que Terre de Vins dégustera dans les prochaines semaines en primeurs.

Sous la houlette de la nouvelle équipe, il aura donc fallu une douzaine d’années pour voir Camensac se transformer et revenir à un niveau digne de son rang. Le style approximatif des vins des années 90 n’est plus : ils ont laissé la place à des « vins plus modernes », séduisants et élégants. Jacques Merlaut, le cofondateur du groupe Taillan, celui-là même qui fut à l’origine de l’histoire familiale et décédé en 2008, serait assurément fier de cette nouvelle direction.

www.chateaucamensac.com