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Château La Garde : Dourthe réveille son joyau de Pessac-Léognan

Auteur

Mathieu
Doumenge

Date

25.05.2023

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Propriété historique des vignobles Dourthe, acquise en 1990, le château La Garde veut s'inviter en pleine lumière après avoir cultivé une certaine discrétion au cours des 30 dernières années. Ce petit bijou de Pessac-Léognan a de solides arguments.

Dans la famille des vignobles Dourthe, auguste maison girondine fondée en 1840, demandez l'aîné : le château La Garde, vignoble de Pessac-Léognan acquis par le groupe en 1990 et désormais accompagné par sept autres propriétés entre rive gauche et rive droite - dont le Grand Cru Classé 1855 Château Belgrave, exploité en fermage depuis 1979, et le Cru Bourgeois Exceptionnel Château Le Boscq, entièrement passé dans le giron de Dourthe depuis début 2022. Vignoble ancien, dont l'existence était déjà mentionnée sur la carte de Cassini en 1756, La Garde a plusieurs fois changé de mains au fil de son histoire, passant notamment entre celles de la famille Lacoste dans les années 1870 et du négociant Louis Eschenauer dans les années 1920.

Pour la maison Dourthe (qui a changé de gouvernance il y a quelques mois avec le départ à la retraite de Patrick Jestin et la montée en responsabilités de Valentin Jestin et Frédéric Bonnaffous), le château La Garde n'est pas exactement une "belle endormie" mais certainement un joyau qui avait besoin de retrouver tout son lustre. Avec son ensemble de 60 hectares, dont 50 hectares de vignes d'un seul tenant (entourées de prés, zones humides, bosquets, le tout donnant lieu à un audit de la Ligue de Protection des Oiseaux pour dresser un état des lieux de la biodiversité), le domaine est assis sur une mosaïque de 27 types de sols différents, allant de croupes de graves sur argiles - très "Médoc" - à des sections plus calcaires, propices à la production de beaux vins blancs - environ 3,5 hectares de la surface de production actuelle, un chiffre qui pourrait être appelé à progresser.

De nouvelles installations techniques
C'est pour aller au plus près de cette identité de terroir et faire aux vins un supplément de définition que l'équipe Dourthe a lancé en 2018 la construction de nouvelles installations techniques, qui ont vu le jour en 2021 et ont été pleinement exploitées sur le millésime 2022. Ce projet, mené par l'agence d'architecture bordelaise Moon Safari, conjugue son style industriel, vitré et épuré avec les anciens bâtiments datant de 1881-1882, apportant un gain de précision et de confort manifeste dans les vinifications : on est ainsi passé à 34 cuves inox tronconiques et tronconiques inversées, d'une contenance de 60 à 120 hectolitres. Le chai d'élevage souterrain, construit au moment du rachat au début des années 1990, reste lui parfaitement opérationnel, avec l'ajout de six amphores au milieu du parc à barriques, destinées à une cuvée spéciale - voir plus loin.

"Nous avons, au château La Garde, un terroir qui donne des vins naturellement puissants, plutôt faits pour être attendus quelques années", expliquent Valentin Jestin et Frédéric Bonnaffous. "Il fallait pouvoir les rendre plus appréciables dans leur jeunesse, conserver leur identité tout en leur donnant un profil moins démonstratif, plus caressant. Ce nouveau cuvier nous permet d'aller plus dans le détail, de mieux traduire le travail de fond que nous avons fait - et faisons toujours - au vignoble et dans la connaissance de nos sols". C'est aussi pour aller au plus près de cette connaissance des terroirs que l'équipe a lancé, depuis le millésime 2020, le projet "Mosaïque", une photographie du millésime à travers si micro-cuvées présentant à chaque fois une adéquation cépage-terroir, élevées en amphores et produites à hauteur de 1000 bouteilles chacune (300 € le coffret). Merlot sur graves profondes, merlot sur calcaire, merlot sur argilo-calcaire, merlot sur argile, cabernet-sauvignon sur graves profondes et cabernet-sauvignon sur graves et argiles : la dégustation des différents lots est passionnante, une vraie "leçon de lieu" qui se voit sublimée dans l'assemblage final - la somme étant bien souvent, on le sait bien à Bordeaux, supérieure à l'ensemble des parties. Si le 2020 séduit par sa densité mesurée, vigoureuse, portée par des tannins précis, le 2022 affiche une progression de plusieurs étages en termes d'éclat, de percussion, de suavité, de tonicité et de charme. L'apport du nouveau cuvier, et l'arrivée d'un nouveau consultant en la personne de l'œnologue Axel Marchal, se sentent dans ce vin qui, à 19,50 € TTC en primeurs, est d'un remarquable rapport qualité-prix.

Les nouvelles installations se doublent d'une boutique qui est le point de jonction de l'offre œnotouristique (accueil du public du mardi au samedi), et la chartreuse de 1732 subit actuellement des travaux de rénovation pour pouvoir accueillir les professionnels dans un cadre "VIP". Bref, le château La Garde est bel et bien réveillé, et à 25 minutes du centre de Bordeaux, les visiteurs auraient bien tort de se priver de le visiter.