Accueil [Sommeliers Dating] La place des vins français vue de l’étranger

[Sommeliers Dating] La place des vins français vue de l’étranger

Alexandre Freguin (photos Michaël Boudot)

Auteur

Jean
Bernard

Date

20.05.2019

Partager

Acteurs de l’événement Terre de vins qui réunit 40 sommeliers et 66 vignerons à Paris ce lundi, Alexandre Freguin au Royaume-Uni, Aristide Spies en Belgique et Loïk Tavernier en Suisse portent des regards complémentaires sur la situation des appellations hexagonales hors des frontières.

Depuis ce lundi matin, 40 sommeliers multiplient les rencontres directes avec des vignerons et les dégustations. Cette approche originale imaginée par Terre de vins en 2016 s’est ouverte à l’international. Ainsi Alexandre Freguin, sacré Sommelier de l’année 2018 au Royaume-Uni, est arrivé de la région de Manchester où il a travaillé au restaurant Moor Hall, un deux étoiles Michelin. « Chez nous, les vins français représentent 30% de nos 700 références à la carte. C’est peu mais cela correspond à ma volonté de prôner à la diversité et à la réalité des orientations d’une clientèle qui a une forte envie de découvertes. En France, mes choix sont assez éclectiques, je suis simplement fanatique des cépages exploités dans leur région d’origine. »

S’il a structuré ses premières expériences en France, son installation en Angleterre lui a permis d’établir plusieurs constats. « L’amateur de vin fait preuve d’ouverture d’esprit et accepte volontiers les conseils que nous pouvons lui prodiguer. Il n’a pas d’idées préconçues et vient au restaurant comme il va au théâtre, pour être ébahi, voyager et goûter des nouveautés. Et sur ce dernier plan, ce n’est pas vers la France qu’il s’oriente tout simplement parce que dans ce registre il peut trouver son bonheur chez un caviste au coin de la rue. »
Parmi ses propres découvertes récentes, Alexandre Freguin cite le champagne Ruppert-Leroy, la cuvée Martin Fontaine et un vin venu de Slovaquie, un blanc de cépage devin produit par le domaine Vino Magula. « Captivé » par l’approche de Sommeliers Dating et l’intérêt « de maintenir un lien étroit entre le vigneron et celui qui met son vin en scène », il va prolonger son séjour en France pour mettre les pieds dans les vignes et les caves.


Aristide Spies


La fidélité de la clientèle wallone

Un éternel sourire aux lèvres, Aristide Spies, le sommelier belge médaillé de bronze du concours mondial en 2013, découvre Sommeliers Dating avec une soif de rencontres qui lui permettront peut-être d’étoffer un peu plus encore l’offre qu’il assure dans deux caves en Wallonie et une autre au Grand duché du Luxembourg. « Chez nous, 75% du catalogue est français et cela correspond à l’intérêt de la clientèle francophone. Les vins sont souvent associés à des souvenirs de vacances dans une région viticole. En Belgique les grands classiques se situent du côté de Sancerre, Chablis et Saint-Émilion mais la curiosité s’exprime aussi et finalement il est assez facile de vendre français sans avoir trop à argumenter, ce qui n’est pas le cas avec des bouteilles venues d’Allemagne ou du Portugal, par exemple. Je pense que la langue commune est aussi un élément favorable. »
Et s’il reconnaît qu’en termes de prix la concurrence vient d’Espagne, il regrette de ne pas trouver dans la production française une véritable alternative au prosecco produit en Italie. Mais de son escapade parisienne il retiendra notamment un vrai coup de cœur pour un IGP Alpilles, un blanc signé du domaine Fontchêne. « Pour les Belges, Alpilles rime avec vacances. Associé à la qualité, c’est un atout pour intégrer notre catalogue… »


Loïk Tavernier

Le marché suisse évolue

Loïk Tavernier a quitté pour quelques heures le domaine de Châteauvieux, à quelques kilomètres de Genève, pour vivre de l’intérieur Sommeliers Dating. Présent en Suisse depuis près de dix ans, il a touché du doigt l’évolution du marché du vin dans la restauration étoilée. « Il y a toujours l’hégémonie des vins français mais la nouvelle génération de clients se montre plus sensible à la production nationale. Un phénomène qui s’accentue et que j’assimile un peu à une approche écologique. Ils cherchent du bio et sont locavores… »
Cependant, le chef sommelier de ce restaurant deux étoiles avoue volontiers que les grands standards, « les valeurs sûres venues de l’Hexagone, les bordeaux, bourgognes et champagnes » n’ont pas trop à pâtir de ce phénomène. Des vins dont il développe l’offre au verre. « Je ne propose que des cuvées de qualité afin d’être apte à répondre à toutes les demandes. Des vins qu’on met traditionnellement sur un piédestal qui côtoient des produits suisses. Si je n’étais que français, on me le reprocherait. Et cette règle s’impose aussi pour l’accord mets et vins proposé en huit plats et autant de vins. »
C’est toutefois le nez et les papilles marqués par de belles découvertes françaises que les trois sommeliers retrouveront leur univers de travail loin de Paris.

Terre de vins remercie ses partenaires Somm’It et France Boissons.