Accueil Dégustation Quels vins avec… une fourme de Montbrison ?

Auteur

Marc
Vanhellemont

Date

03.04.2018

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Elle remonte de façon certaine au début de la féodalité, vers le VIIIe siècle. Mais Pline l’Ancien nous parlait déjà du succès des bleus gaulois à Rome. Et les Arvernes, qui en fabriquaient déjà dans la région avant la conquête de César, devinrent à coup sûr fournisseurs de la cour impériale.

On peut facilement confondre Fourme de Montbrison et Fourme d’Ambert. D’autant plus qu’elles reçurent toutes deux une appellation d’origines commune en 1972. Alors que la Fourme de Montbrison vient du versant ligérien des monts du Forez et la Fourme d’Ambert du versant auvergnat. Il fallut attendre le nouveau décret de 2002 pour les séparer (en 2009, l’AOP). Quant à la fabrication, l’Ambert passe par un égouttage réduit et un salage en surface, alors que la fourme de Montbrison subit un pré-égouttage, suivi d’un broyage et d’un salage dans la masse du caillé. Ce qui engendre une différence de couleur, de goût et de texture. Ce fromage au lait de vache, à pâte persillée, pressée non cuite se présente sous la forme d’un cylindre à croûte orangée haut de 17 à 21 cm, pour un diamètre de 11,5 à 14,5 cm et un poids de 2,1 à 2,7 Kg. Il faut de 20 à 25 litres de savoureux lait récolté sur le Haut Forez pour la fabrication d’une fourme. Le persillage de la pâte est obtenu par l’ensemencement en Penicillium roqueforti. Une opération de piquage pour favoriser le développement du bleu s’effectue à partir du dixième jour après emprésurage. L’affinage se fait en hâloir à température basse et hygrométrie importante durant 1 à 3 mois. Autrefois, les Fourmes de Montbrison s’élaboraient essentiellement dans les jasseries, ensemble de bâtiments de pierre à toit de chaume, les jas, que l’on rencontre encore aujourd’hui sur les pâturages d’altitude des monts du Forez. Lors de la saison d’estive, les fermiers de la vallée et leur famille les rejoignaient avec les troupeaux de vaches. Fabrication et affinage s’y déroulaient tout l’été. À l’automne, les fourmes se vendaient sur le marché de Montbrison. Aujourd’hui, la Fourme de Montbrison est produite à plus de 600 m d’altitude, sur la zone AOC composée de 33 communes des monts du Forez, 28 dans la Loire et 5 dans le Puy-de-Dôme. Quelques rares irréductibles perpétuent toutefois la production fermière à l’estive comme autrefois…

DOMAINE ZIND HUMBRECHT
Muscat grand cru Goldert 2013 (38,50 €)

Blond, les yeux verts, l’Alsacien vient à la rencontre de la Montbrison les bras couverts de présents. Un bouquet de fleurs blanches, du miel du pays, quelques fruits exotiques, un petit coffret de chêne patiné emplis d’épices rares comblent d’emblée la pâte marbrée. Le jasmin et la fleur d’oranger, elle les plante dans son cœur minéral, puis elle saupoudre de cumin et de santal sa crème de noisettes. Les écorces d’orange, le citron confit, le miel, elle en fait une cassate douce et onctueuse. Elle garde la mangue et l’ananas pour la fin, croquant à pleines dents cet exotisme.

DOMAINE PIRON
Chiroubles 2015 Cru du Beaujolais (10 €)

Tout de pourpre vêtu, une corbeille de fleurs au bras gauche, une autre de fruits au droit, le Chiroubles fait une entrée fracassante dans la vie de la Fourme. Groseille, framboise, griotte, violette, jasmin et réséda envahissent sa crème sans vergogne. Son caractère de pierre résiste un moment, mais cède rapidement à de tels empressements. Le beaujolais, transi, veut la mettre en valeur et il y réussit. C’est définitivement conquise que la belle nous offre un mariage des plus aboutis.

DOMAINE DE VIGIER
Cuvée Mathilde 2015 IGP Ardèche (9,90 €)

Teintée d’or cuivré, elle offre un nez puissant où dominent les notes de fruits à chair jaune, épicés d’un rien de cannelle et de cardamome. La Montbrison y reconnaît tout de suite un cœur tendre comme le sien, une âme douce. Bref, un caractère qui convient à son esprit légèrement piquant et qui trouve chez Mathilde du répondant. Les conversations s’engagent instantanément. Et quand l’Ardéchoise parle de ses gelées de coings et de ses confitures d’abricots, la Forézienne réplique avec des crèmes de châtaignes et des veloutés de champignons bien épicés. Alors, complices, elles les associent en duos savoureux qui nous font vibrer.

Cet article a été publié dans la rubrique « Vins & Fromages » – Terre de Vins n°51, janvier-février 2018.