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Vin : quand la Chine menace la France

Auteur

La
rédaction

Date

06.06.2013

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Visée par une hausse des droits de douanes sur ses panneaux solaires importés en Europe, la Chine envisage de répliquer en lançant une enquête « antidumping » sur les vins européens. Une guerre du vin se profile-t-elle ?

Le ton monte entre l’Union Européenne et la Chine. Technologie contre agroalimentaire. Panneaux solaires contre vin. Voyant d’un très mauvais œil la décision de Bruxelles d’augmenter massivement à partir du mois d’août les droits de douanes – de 11, 8% à 47, 6% – sur les panneaux solaires chinois, accusés de bénéficier de « dumping » (vente à perte), Pékin a immédiatement répliqué en lançant, suite à un dépôt de plainte de l’association chinoise des producteurs de vin (CADA), une enquête « antidumping et antisubventions » à l’encontre des vins européens importés en Chine.

Taper là où ça fait mal

L’objectif du pouvoir chinois est simple : taper là où ça fait mal, c’est-à-dire sur l’un des principaux pôles d’exportation de l’Europe vers la Chine. Une procédure d’intimidation qui pourrait se résoudre à l’amiable (Pékin a deux mois pour proposer des solutions sur les panneaux photovoltaïques) mais pourrait aussi déboucher sur un long bras de fer ; d’autant que l’Europe, une fois n’est pas coutume, ne parle pas d’une seule voix. Là où l’Allemagne militait pour une relation en douceur avec le géant asiatique, la France a poussé pour une plus grande sévérité sur le contrôle des importations d’équipements d’énergie. Il n’est donc pas surprenant de voir aujourd’hui la Chine viser les importations de vin, un créneau sur lequel la France occupe une place majeure : la Chine représente en effet le troisième marché – estimé à 140 millions de litres, soit près de 800 millions d’euros – pour les exportations françaises de vin. En France, qui demeure le principal producteur européen, la filière vin représente 500 000 emplois et 7, 6 milliards d’euros d’excédent commercial…

Du côté de la Fédération des Exportateurs de Vins est Spiritueux (FEVS), on manifeste son inquiétude : « Dans un contexte de ralentissement de la croissance mondiale, l’instrumentalisation de notre secteur dans un différend commercial est particulièrement regrettable. Le secteur du vin est un bon exemple d’une activité dont le dynamisme est lié à l’exportation, y compris en Chine » indique Louis Fabrice Latour, Président de la FEVS, dans un communiqué. « Nous espérons vivement que l’Union européenne et la Chine sauront dénouer ces tensions commerciales par la voie du dialogue et de la négociation et nous sommes certains que la France saura les y encourager ».

Subventionné, le vin européen ?

De son côté, Joël Forgeau, Président de Vin & Société, a déclaré : « Nous assistons à un conflit d’ordre économique et géo-stratégique qui concerne le secteur solaire européen. Certes la Chine menace de sanctionner nos vins mais nous sommes confiants en la qualité de nos produits que le monde entier nous envie. Par ailleurs, nous respectons les règles du commerce international et observons qu’une telle mesure devrait être fondée sur des preuves de pratiques de dumping de la part des pays producteurs européens. Or, aucun autre pays producteur dans le monde n’a intenté une telle démarche contre les vins français ou européens ». Enfin, du côté de la Commission Européenne comme du Ministère français de l’Agriculture, on se veut « persuadé » qu’il n’y a pas de dumping ni de subventions sur les exportations de vin vers la Chine ». Reste à voir si les aides européennes accordées aux vignerons pour certains travaux ou aux interprofessions seront bien vues des autorités chinoises…

En attendant l’évolution de la situation, le président français François Hollande a pris la mesure des risques encourus en demandant une réunion rapide des 27 Etats membres pour dégager une « solidarité de vues » sur les relations commerciales avec la Chine.

M.D.