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Le Château Poitevin a ses lettres de noblesse

Auteur

La
rédaction

Date

29.05.2012

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Récent vainqueur de la Coupe des Crus Bourgeois, le Château Poitevin (AOC Médoc) trouve dans cette reconnaissance la récompense de vingt ans de travail : ou comment une petite propriété familiale a acquis ses lettres de noblesse…

Quel est donc ce Château Poitevin qui a décroché, le 15 mai dernier, à l’unanimité et non sans créer la surprise, la Coupe des Crus Bourgeois ? Pour découvrir et visiter cette propriété familiale de 42 hectares, il faut traverser toute la péninsule du Médoc jusqu’à l’extrême limite de l’AOC, quasiment aux portes de l’estuaire de la Gironde, entre phares et cabanes de pêcheurs, pour rejoindre la commune de Jau-Dignac et Loirac.

La reconnaissance de 20 ans d’efforts

Ici, le visiteur est accueilli, avec le sourire et en toute simplicité, par Guillaume et Natacha Poitevin, qui savourent leur consécration : « faire partie des Crus Bourgeois était déjà un privilège et une fierté. Cela représente certes un avantage en terme d’image, grâce à l’efficacité de l’Alliance des Crus Bourgeois, mais cela induit aussi une exigence, une constance pour maintenir un certain niveau de qualité. Pour nous, le fait de gagner la Coupe des Crus Bourgeois, c’est la cerise sur le gâteau, la récompense de longues années d’efforts, de travail d’équipe et d’investissements. Mais cela nous pousse aussi à rester humbles, et nous donne encore plus de responsabilités et de devoirs. » Autant dire que malgré ce prix très convoité, attribué par un jury de professionnels du vin, Guillaume et Natacha n’ont pas changé d’un iota : ils gardent les pieds sur terre, et restent fidèles à l’état d’esprit qui les a menés jusque-là.

C’est en 1991 que Guillaume Poitevin a repris les rênes de cette propriété familiale et a métamorphosé le vignoble : « mon grand-père était boulanger, nous raconte-t-il, d’ailleurs la salle de dégustation que nous avons rénovée en 2011 se situe à l’emplacement de sa boulangerie : on y voit encore le vieux four à pain. Comme beaucoup de familles, nous faisions de la polyculture, et donc un peu de vigne. C’est à la fin des années 1950 que mon père a planté les cépages « nobles » du Bordelais pour développer la viticulture. Il livrait toute sa production à la coopérative locale ». Très vite, Guillaume a su qu’il prendrait le relais, avec de grandes ambitions pour le vignoble familial. Après des études en viticulture, il prend la tête de la propriété en 1991, et se retire de la cave coopérative en 1997. Six années durant lesquelles il se perfectionne, affûte sa connaissance des terroirs, achète de nouveaux terrains, replante… En quelques années, le vignoble du Château Poitevin grandit : des 18 hectares possédés à son arrivée, il est passé aujourd’hui à 42.

L’amour du beau raisin

« Mon père m’a transmis un goût du beau raisin, précise Guillaume Poitevin. Même lorsqu’il vinifiait pour la cave coopérative, il avait une exigence de qualité. Je n’ai fait que développer et poursuivre ce qu’il m’a transmis ». Ce développement est passé par d’importants investissements techniques (chais, machines, matériel de vinification) et par une réorientation de la vigne : « il y a 7 ou 8 ans, nous avons décidé de favoriser le merlot, qui représente aujourd’hui 55% de l’encépagement. Nous avons ensuite du cabernet sauvignon, et de plus en plus de petit verdot, qui apporte un supplément de complexité ». Conseillé par l’œnologue Antoine Medeville, Guillaume Poitevin a les idées claires sur le vin qu’il souhaite faire : des vins « sur le fruit, ni trop extraits ni trop élevés, des vins plaisants et harmonieux avec des tanins souples et soyeux, qui peuvent se boire jeunes mais présentent une vraie aptitude au vieillissement ». Pour parvenir à ses fins, le vigneron privilégie d’abord le travail à la vigne, avec des rangs enherbés, des rendements contrôlés, une recherche de la maturité optimale (« il est assez obsessionnel avec cela, et attend toujours au maximum pour lancer les vendanges », souligne son épouse Natacha), mais aussi au chai, avec des techniques comme le microbullage, et des élevages d’un an en barriques d’un ou deux vins. « Faire un vin c’est comme cuisiner, souligne Guillaume Poitevin. La technique est là pour affiner les saveurs, chercher la subtilité, pour sublimer la matière première. Tout part du beau raisin ». Le domaine produit entre 250 et 280 000 bouteilles par an, dont 50% de premier vin, le reste étant partagé entre le second vin Lamothe Pontac, la petite cuvée Moulin de Canhaut et, depuis peu, d’un très agréable Poitevin blanc 100% sauvignon.

Le Château Poitevin 2009, qui a remporté la Coupe des Crus Bourgeois, est tout ce que l’on peut attendre d’un Médoc de bonne facture sur un millésime si réputé : bonne structure, du fruit, de l’opulence, de la longueur, le tout enrobé par un style très soyeux. On peut lui préférer encore le 2010, davantage sur la fraîcheur. La dégustation du 2008, forcément plus classique, et du 2005, qui semble fort bien vieillir, permettent de constater une constance et une régularité dans le travail qui viennent confirmer, si besoin était, que ce Château Poitevin est bel est bien une « valeur à suivre » dans le Médoc. La Coupe des Crus Bourgeois a vu juste.

M.D.