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Vendanges sous la lune en Champagne

Petite pause photo en fin de rang (photos : Thierry Perardelle)

Auteur

Thierry
Perardelle

Date

08.09.2017

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Depuis 2008, à Vanault-le-Châtel (coteaux vitryats), le champagne Trepo Leriguier cueille de nuit une parcelle de chardonnay. Ainsi naîtra la cuvée Songe d’une nuit de vendanges 2017.

Hier, jeudi 7 septembre, 20 h 30. Le jour décline tandis qu’une vingtaine de vendangeurs rejoignent le coteau Laubarmont à Vanault-le-Châtel. Souriants, comme le patron Bertrand Trepo. Sur la parcelle de 28 ares, plantée par ses grands-parents en 1991, les chardonnays sont beaux. Certes, ils jouent à cache-cache entre les feuilles, conséquence du gel de printemps en Champagne. « Ce sera un petit rendement, nous produirons peut-être 2 500 bouteilles », analyse le vigneron.

20 h 45. La nuit se pose. Question avant la perception des lampes frontales : pourquoi cette vendange de nuit ? « Le principal avantage est lié à la différence de températures, de 10 à 15 degrés entre le jour et la nuit. Les raisins, comme tous les fruits, sont sensibles à l’oxydation. Ce processus chimique inévitable va effacer le terroir en détruisant certains composés aromatiques sensibles. Une température basse et un pressurage rapide après la cueillette permettent de limiter ce phénomène au maximum, et de garder ainsi la typicité », résume Bertrand Trepo, qui a découvert cette pratique dans la Napa Valley (Californie).

21 h. C’est parti. Sous la belle lune ronde, David, Hugo, Lætitia, Estelle, Cécile et les autres coupent. Efficaces, ils lèveront peu la tête, concentrés, habitués. Déjà le 9e jour de coupe pour certains, la quille demain. Dans les 20 rangs, sur ce sol de craie aux herbes parfois très hautes (zéro herbicide), les grappes rejoignent les seaux puis les caisses. Les insectes volants s’enivrent des lumières frontales, sur les dos courbés pèse le poids des jours et les cueilleurs interpellés racontent l’expérience : « C’est drôle, les grains de raisin sont brillants, dorés. Par contre, ils collent plus aux doigts. On ne voit pas grand-chose et on est agréablement surpris d’arriver en fin de ligne… »

22 h 30. Vendange terminée. Il est temps de rejoindre la lumière, de se poser près de la loge de vigne installée en haut du coteau, de remplir son verre de bulles, de grignoter et trinquer à la santé de tous et de la future cuvée Songe d’une nuit de vendanges 2017. Rare en Champagne. Ils pourront dire « J’y étais. »

23 h. Pendant que les gosiers et ventres des vendangeurs se réchauffent, la vigne ne dort toujours pas. Une équipe débarde les caisses puis il faudra mener le raisin au pressoir. « La vinification qui suivra sera minimaliste », confirme Bertrand Trepo, « pas de bois, pas de terre cuite, juste de l’inox qui n’apportera rien justement. Pour rester au plus près du terroir et de son expression. L’objectif étant aussi de rappeler que les chardonnays du Vitryat savent vieillir. »

Terre de Vins aime
La cuvée Songe d’une nuit de vendanges 2008, actuellement disponible (prix caviste conseillé 48 €). Pour sa fraîcheur (zeste de citron), sa tension, sa longueur en bouche et surtout sa finale (forte minéralité saline). Parfait sur des sushis ou fromages à pâte molle à croûte fleurie (chaource ou brie de Melun).