Accueil L’œnotourisme, une « niche » toujours en quête de maturité

L’œnotourisme, une « niche » toujours en quête de maturité

Auteur

La
rédaction

Date

19.09.2012

Partager

Déambuler au milieu des vignobles, acheter quelques pieds de vigne ou encore visiter des caves : l’œnotourisme a le vent en poupe mais, selon les professionnels, il doit se structurer pour devenir un secteur à part entière avec des retombées significatives pour les viticulteurs.

« C’est une niche » qu’il faut porter à « maturité », explique Paul Dubrule, président du Conseil supérieur de l’œnotourisme. « Beaucoup de viticulteurs vivent assez difficilement », rappelle M. Dubrule, également co-fondateur du groupe hôtelier Accor qui finance avec l’organisme public FranceAgriMer un prix national de l’œnotourisme, dont la troisième édition est en cours.

La filière est « très en retard par rapport à ce qui se passe dans d’autres pays comme les Etats-Unis, l’Afrique du Sud et même l’Espagne », confirme Didier Arino du cabinet de conseil Protourisme. Et ce alors même que « la France est par définition une destination œnotouristique », avec de très nombreuses propriétés ouvertes au public, souligne le spécialiste.

Mais « aujourd’hui, c’est une nébuleuse qui apparaît complexe et réservée aux initiés », déplore-t-il. Pourtant, les bonnes idées fourmillent : vente de rangs de vigne à des particuliers qui auront leurs propres bouteilles et viendront faire les vendanges, parcours pédestres dans les vignobles, visites de caves, sans compter l’hébergement, l’organisation de spectacles et les fameuses routes des vins.

Selon les dernières données d’Atout France fournies par Protourisme, près de 10 000 caves accueillent plus de 7, 5 millions de visiteurs dont 2, 5 millions d’étrangers, les destinations favorites étant l’Aquitaine, l’Alsace, la Bourgogne et la Champagne.

« Palaces de la viticulture »

Damien Bouchard, viticulteur sur le domaine de son père Pascal Bouchard à Chablis en Bourgogne, est régulièrement sollicité par des agences de voyage. « La demande est là, il suffit de la saisir », mais encore faut-il pouvoir y répondre. « On pourrait faire beaucoup plus », affirme le viticulteur qui envisage d’aller plus loin dans la démarche.

Et les retombées peuvent parfois êtres immédiates. Grâce à l’organisation de promenades dans son vignoble, un viticulteur a pu « augmenter ses ventes au caveau d’au moins 30% » à l’issue du parcours, rapporte M. Dubrule, lui-même viticulteur dans le Lubéron.

Mais pour aider le secteur à se développer, il faut aussi « des expériences plus coûteuses qui marquent le territoire », explique-t-il. De véritables « palaces de la viticulture », comme le fabricant de cosmétiques à base de vin Caudalie ou l’œnoparc du Hameau Duboeuf, dans le Beaujolais, avance M. Dubrule.

Pour se structurer, le secteur doit adopter des logiques de territoire autour d’une marque et d’une destination, confirme Protourisme. M. Arino parle de « resorts » de l’œnotourisme, des complexes comprenant à la fois le château, l’hôtel, le restaurant et la boutique. « On a assez peu de sites touristiques dédiés au vin », souligne-t-il, citant de son côté l’exemple du village de Bages dans le Médoc en Gironde.

Autre projet majeur, l’ouverture à Bordeaux début 2015 d’un centre culturel et touristique du vin, chiffré à 63 millions d’euros et qui prévoit d’accueillir plus de 400 000 personnes par an.

La profession doit aussi « relever le défi des nouvelles technologies », à l’image du conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux qui a lancé une application sur smartphones, indique M. Arino.

Selon M. Dubrule, l’œnotourisme a encore « une dizaine ou une quinzaine d’années » avant d’atteindre l’âge mûr.

Cécile De Corbière