Samedi 21 Juin 2025
Portrait de ©Lionel Audoin
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Date
21.06.2025
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Professeur de philosophie, vigneron, chanteur, auteur, Lionel Audoin cultive ses vignes comme un paysan doublé d’un philosophe. Il réfléchit à des pratiques vertueuses, dans un environnement sain et protégé, où le vivant a toute la sa place.
A la faveur d’une mutation à Carpentras, Lionel Audoin découvre le métier de vigneron à Gigondas. Le professeur de philosophie rencontre Eric Hughetto, du domaine La Roubine et c’est une révélation. Durant de longues années il se forme à ses côtés. En 2010, ils s’associent pour créer un négoce, achètent du raisin, assemblent des vins. Enfin, l’acquisition de 4 hectares, dans le nord Vaucluse, planté de marsanne, viognier, grenache et mourvèdre, lui confère le statut tant désiré de vigneron. Dans ce secteur préservé, le travail en agriculture biologique est un prérequis, un mode de pensée, une philosophie.
« Je suis toujours professeur. J’aurai voulu arrêter mais la réalité économique est difficile. Je ne veux pas faire de l’argent avec cela, mais je ne veux pas en perdre non plus. Cela renvoie à la condition paysanne ». Tiraillé entre ses deux univers, Lionel Audoin écoute sa raison. La commercialisation prend du temps même pour une petite production, aux rendements à l’avenant. Le travail à la vigne n’est pas le plus chronophage. Enserrée dans un espace naturellement protégé et arboré, la vigne ne requiert aucun engrais et peu de traitements, effectués à dos d’homme. « Je voulais mettre les mains dans le cambouis. Faire de la vigne un terrain d’exception, de pratiques de nouvelles théories et y être confronté. C’est mon côté paysan ».
Un paysan qui nourrit son esprit. Sur les rayonnages de son bureau, les romans de Jean-Lou Trassard côtoient les essais sur la culture du vivant et la mutation climatique de Baptiste Morizot et Bruno Latour. Pour la viticulture, les ouvrages de Pascaline Lepeltier, Marc-André Selosse, Léa et Yves Darricau s’acoquinent aux BD d’Alessandro Pigniocchi et à l’enquête sur l’histoire enfouie du remembrement d’Inès Léraud et Pierre Van Hove. Les penseurs du vivant font écho au vigneron autant qu’à l’homme. « Je m’intéresse aux relations entre les êtres, aux questions sur l’organisme, la notion de symbiose, cette complexité et cet entrelacement des vivants que la réalité agricole a niés. On a transporté le labo aux champs. Je veux comprendre cette complexité et voir ce qu’on peut en faire », explique le professeur adepte du concept de l’anthropocène. D’ailleurs, Lionel Audoin n’hésite pas à utiliser l’agriculture comme exemple pour ses 200 élèves, qui connaissent sa double activité.
Lionel Audouin cumule les casquettes. Il est aussi le chanteur des Frogs In Throat dont le deuxième album, Earth Fever, est désormais disponible sur les plateformes. Non content de donner de la voix, il est aussi l’auteur des chansons qui mêlent français et anglais. Du rock où les riff de guitare décochent des « Bestioles », « Round Up Rock », « Le blues du sol ». « Je suis un homme de carbone qui fait des trous dans l’ozone, je suis un homme détritus, je fais des tas de rebus, je blanchis les coraux », chante le rockeur. Chassez le naturel, il revient illico.
Les prêles blanc 2023 -16€
Un Côtes du Rhône qui associe marsanne (80 %) et viognier (20%) vendangés tôt pour gagner en acidité et perdre en alcool. Un nez d’abricot, de miel, de genêt en fleur, de reine- claude offre sa gourmandise. Salivant, sapide, sa tension incisive, presque zeste de citron, déclenche de belles sensations.
Nord-Est Côtes du Rhône rouge 2023 - 14€
Encore brut de cuve lors de notre dégustation, il est garni de petits fruits rouges, entre framboise et groseille. Gourmandise, tonicité et mêmes fruits en bouche offrent leur maturité. Les tanins, encore bien jeunes, s’affineront.
Côtes du Rhône rouge 2020
Il patiente et patientera encore, au bon gré du vigneron. Avec deux ans d’élevage en demi-muids, les mourvèdres se sont affinés, tout en gardant une belle concentration de fruits noirs, denses et fondus.
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