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[Cavistes Dating] Au carrefour de l’achat en ligne et du commerce de proximité

Auteur

Mathieu
Doumenge

Date

27.03.2017

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L’organisation de Cavistes Dating, événement « Terre de Vins » qui met aujourd’hui à Paris 40 cavistes en relation avec 66 propriétés, est l’occasion d’examiner l’évolution des actes d’achat des consommateurs, entre explosion du web et résistance du commerce de proximité.

C’est quoi finalement, un caviste ? Un marchand de vin ? Face à la multiplication des canaux d’achat, de la grande distribution à l’explosion du e-commerce, les opérateurs de proximité ont beaucoup souffert ces dernières années. Pourtant hier soir, Jean Guizard, créateur de Mégavins à Montpellier et président de la Fédération des Cavistes Indépendants, a pris la parole pour rappeler que les cavistes sont « l’un des rares commerces de proximité qui progressent. » Il n’empêche qu’à une époque où 70% des vins se vendent en grande distribution, où l’achat dématérialisé se déploie à grande vitesse et où beaucoup d’amateurs de vin se sentent encore intimidés à l’heure de pousser la porte d’un caviste, l’équation demeure difficile à résoudre.

« Une méfiance vis-à-vis des acteurs du web »

Julius Friedrich, représentant la société « Grands Vins Privés » pendant notre événement, l’admet volontiers : « nous avons beau avoir plus de 600 vins référencés (France et étranger) et nous positionner sur un renouvellement régulier de la gamme, la rencontre directe avec le vigneron reste trop rare. Nous sommes avides de découvrir de nouvelles propriétés, de belles pépites de toutes les régions, et en étant basés à Bordeaux cela s’avère plus forcément plus compliqué. D’où l’intérêt d’un événement comme ‘Cavistes Dating’, qui nous permet aussi de casser une certaine méfiance qu’ont encore quelques vignerons vis-à-vis des acteurs du web. Je salue aussi la belle idée du free tasting, qui pendant les moments de pause nous permet de goûter des propriétés que nous n’avons pas forcément en rendez-vous ».

Autre opérateur du web, et non des moindres, Cdiscount, représenté par Max Rey. Pour rappel, Cdiscount est aujourd’hui le co-leader de la vente de vin sur le web, avec Vente-privée.com. Si l’on parle chiffre, cela représente 4 millions de bouteilles par an 4000 références vin & alcool, un chiffre qui devrait pratiquement doubler d’ici la fin de l’année. « J’ai eu deux rendez-vous ce matin, un bordeaux que je connaissais déjà mais qui a présenté un très joli 2015, et un vin d’Alsace qui produit un beau riesling, tendu, minéral… Une jolie découverte. C’est un plaisir de pouvoir échanger en direct avec des viticulteurs, qui ont souvent une méconnaissance du monde du web et des opportunités que cela peut leur offrir – visibilité, référencement, facilités de livraison dans des temps records, notamment grâce à notre offre à 20 € par an qui permet une livraison gratuite à volonté en 24 heures. Le seul rempart finalement est celui du contact direct. C’est pourquoi nous travaillons énormément sur les fiches techniques, l’accompagnement, le conseil. Mais ce qui est paradoxal, c’est que conseil ou non, beaucoup d’acheteurs restent intimidés à l’idée de pousser la porte d’un caviste. »

S’adapter aux nouveaux modes de consommation

De l’autre côté de la barrière, comment est vécue cette émergence forte de l’achat de vin sur le web ? Stéphane Alberti, qui dirige la cave Vin Passion en Auvergne (600 références, 2 magasins), reconnaît « qu’il faut s’adapter à ces nouveaux modes de consommation. Nous-mêmes avons créé un site vitrine important, qui référence tous nos vins, il faudrait qu’on le transforme en site marchand mais cela demande une autre logistique. En attendant, nous jouons pleinement notre rôle de commerce de proximité ». Vainqueur hier soir de la dégustation à l’aveugle de la « bouteille mystère » et élu en 2014 meilleur caviste de France, Stéphane a l’intelligence de s’adapter aux évolutions nécessaires de son métier : « la plus-value du caviste est la qualité et la précision de sa sélection, qui doit correspondre au lieu où il se trouve, à sa clientèle, et donc à se situer dans les bonnes gammes de prix. C’est mon cas, où j’ai la chance d’avoir une clientèle de connaisseurs, assez exigeants. Il faut toutefois être attentif aux évolutions de consommation : la jeune génération d’aujourd’hui revient vers les cavistes, mais si elle a été éduquée au vin, c’est grâce à leurs parents qui eux, achetaient souvent leurs bouteilles en grande distribution pendant les Foires aux Vins. Les temps changent, les attentes changent, et c’est à nous de tirer notre épingle du jeu en étant implacables sur notre sélection. Un week-end sur deux, je suis dans le vignoble ou sur un salon professionnel, je viens même de passer trois semaines aux Antilles pour sélectionner les meilleurs rhums… C’est un métier où il faut toujours être mobilisé. En tout cas un événement comme ‘Cavistes Dating’ nous permet de changer nos habitudes, de sortir de notre réseau habituel, et de bénéficier d’un effet de surprise.

En parlant de surprise… Vainqueur hier du concours de la Bouteille Mystère, Stéphane a l’intention d’utiliser son chèque coyage pour partir en Corse, histoire d’explorer encore mieux ce vignoble qu’il affectionne particulièrement. Quand on aime le vin, on ne se refait pas…