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[Champagne Week] Des Pieds et des Vins, la jeune garde du champagne

Auteur

Joëlle
W. Boisson

Date

23.04.2016

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La champagne, ce ne sont pas que des grandes maisons pluricentenaires, mais aussi de jeunes vignerons qui se lancent. L’association « Des Pieds et des Vins » regroupe plusieurs d’entre eux, avec des cuvées qui méritent le détour. Zoom sur le champagne Timothée Stroebel.

Pour s’installer et créer son propre champagne, il faut parfois faire « des pieds et des vins » ! Cette association née en 2014 regroupe des jeunes vignerons qui ont décidé de vivre ce rêve. Les exploitations sont rarement grandes (parfois même juste quelques milliers de bouteilles !), mais menées avec professionnalisme, passion, enthousiasme, et toujours des histoires humaines attachantes : Agnès Corbon ou Etienne Calsac à Avize, Guillaume Sergent à Vrigny, Aurélie et Loïc Barrat à Villenauxe-la-grande, etc.

Thimotée Stroebel fait partie de ces pépites. Son grand-père venu d’Alsace dans les années 60 s’est arrêté à Villers-Allerand, un village viticole peu connu sur la route de Reims à Epernay. Le terroir, classé 1er cru, y est pourtant intéressant et fort diversifié : calcaires, sables, argiles, multiples expositions, dénivelés, et une tradition de plusieurs cépages. Bref, rien de monotone !
La vigne étant alors abordable, il créa une petite exploitation viticole de 3, 5 ha, livrant ses raisins à la coopérative locale.

Deux générations plus tard, son petit-fils Timothée rêve de passer un nouveau cap, celui de la vinification. La chose n’est pas aisée ! A défaut d’avoir un pactole (et même là…), s’installer, rassembler les vignes dispatchées dans la famille, construire un chai, constituer un stock demande beaucoup de temps, de persévérance, et d’humilité.
L’installation se fait en plusieurs temps : 2001, les vignes ; 2005, la vinification, par touches successives, au fur et à mesure des investissements. Les premières bouteilles arrivent quelques années plus tard. 2009 signe le passage officieux en bio, 2014 l’officiel.
Est-ce une coïncidence si plusieurs cuvées évoquent Héraclite, ce philosophe grec à la théorie d’un monde en évolution perpétuelle ?

Pinots meuniers de haute volée

Le domaine comporte les trois cépages dont 55% de pinot meunier de vignes cinquantenaires qui livrent aujourd’hui du raisin-caviar, 30% de pinot noir pour partie de vieilles vignes, le solde en chardonnay.

Dans ce tout premier village de la grande montagne de Reims, les pinots noirs, « c’est pas de la gnognotte ». Ceux du champagne Stroebel livrent des jus séveux et intenses, qui savent monter en puissance et ne s’effraient pas, chacun dans son style, de passer à table sur le plat de résistance, palombe ou pièce de veau inclus : rosé de saignée « Logos d’Héraclite » (65 €), coteaux champenois « Le vin tranquille » (45 €).

Mais la plus grande originalité vient des vieux pinots meuniers, qui entrent à 100% dans le premier champagne de la gamme, « Héraclite » (30-35 €). La robe montre un petit œil original (reflet rosé très clair visible par transparence) qui témoigne de la maturité et la concentration des raisins employés. Le clin d’œil se poursuit, avec un nez engageant de fruits blancs et raisin frais, mais aussi du bois fin, des épices vanille. La bouche jongle entre le gourmand et une étonnante pointe salée salivante. C’est fruité, sapide, pointu, complexe et désaltérant à la fois. Un champagne épatant sur un cépage et une année majoritaire (2011) peu encensés. Si Héraclite promet une évolution perpétuelle, on attend la suite !