Accueil Château Corbin : le charme discret d’un grand cru classé

Château Corbin : le charme discret d’un grand cru classé

Auteur

Jean-Michel
Brouard

Date

19.03.2018

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Cette propriété est l’une des valeurs sûres de l’appellation, un statut acquis au prix d’efforts importants entrepris depuis près de 20 ans.

2019 marquera un anniversaire important dans cette très belle propriété de la rive droite. Ce sera en effet le 20eme millésime chaperonné par Anabelle Cruse. L’occasion de revenir sur deux décennies de travaux colossaux entrepris sur le domaine. Son histoire est assez classique puisque pendant près de 30 ans, ce domaine familial n’a pas reçu toute l’attention dont il aurait dû faire l’objet, notamment en termes d’investissements. La tâche qui attendait donc Anabelle Cruse était colossale. Devenue pleinement propriétaire des lieux avec son mari en 2007, elle va s’atteler à redonner de sa superbe au vignoble de 13 hectares d’un seul tenant situé sur le haut du plateau de Saint-Emilion ainsi qu’aux bâtiments. Un vaste programme de rénovation va ainsi s’étaler jusqu’en 2016, date de la livraison du nouveau cuvier. Doté désormais de 18 petites cuves en béton contre 10 auparavant, il témoigne de la volonté affichée de conduire le crû vers une précision toujours plus fine. Les vinifications peuvent en effet être conduites avec une approche parcellaire plus poussée. Le millésime 2016 est le premier à en bénéficier et est annoncé par Anabelle Cruse comme le plus beau jamais produit à la propriété. En attendant, les précédents millésimes ont montré que les travaux avaient porté leurs fruits avec des vins gagnant sans cesse en élégance et en profondeur.

Un grand cru classé à la hauteur de son rang

Le classement de château Corbin en grand cru classé remonte à 1954. Et les derniers millésimes ont montré que cela était amplement mérité et que le potentiel est encore grand. Sur ces terres à dominance argilo-sableuses et argileuse, les merlots dominent en maître et représentent 83% de l’encépagement. Mais les cabernets-francs s’expriment aussi très bien et ont remplacé notamment certains malbecs et certains ceps peu qualitatifs qui avaient été plantés dans les années 1970. La sélection des raisins est aussi l’une des clés de la qualité croissante des vins. Généralement, les jeunes vignes (et le cas échéant les parcelles matures qui ne donneraient pas entière satisfaction) sont orientées vers la production d’un second vin, Divin de château Corbin. Pas question ici de faire un pastiche de château Corbin. Anabelle Cruse assume pleinement son choix de déclasser Divin en simple Saint-Emilion (et non en grand cru) pour pouvoir être plus libre dans l’expression de cette cuvée (le vin peut être embouteillé plus rapidement sur ses arômes primaires). Du fruit, du fruit et encore du fruit, voici la ligne directrice qui est parfaitement respectée et qui, comme sur le millésime 2015, donne un plaisir immédiat et s’avère extrêmement souple en bouche. Le grand vin, lui, est doté d’une race incontestable. Le 2009 se goûte ainsi aujourd’hui très bien. Flatteur avec ses notes de réglisse, ses tannins présents lui confèrent une certaine épaisseur sans lourdeur. 2012 a peut-être un peu moins de fond mais il étonne par sa chair et une sensation sphérique en bouche. 2015 joue pour sa part les excellents élèves et fera date. Son nez profond, ses notes chocolatées mêlées de fruits noirs s’accompagnent de beaucoup d’ampleur et de puissance. Mais l’émotion est peut-être encore plus grande sur le millésime 2014, absolument délicieux. Quelques notes d’agrumes (écorce de pamplemousse) gourmandes trahissent la belle fraîcheur de bouche. Quelle énergie ! Les touches florales ne font qu’ajouter à sa complexité… Assurément, tous les efforts menés ici depuis près de 20 ans, et notamment toute la politique de respect accru de l’environnement récompensé par les certifications ISO 14001 et HVE niveau 3, ont fait de Corbin un domaine très sérieux et qui compte dans le paysage de la rive droite.