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Cognac : l’art de distiller avec Bruno Marcadier

Auteur

Jean-Charles
Chapuzet

Date

20.01.2024

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Bruno Marcadier fait partie de ces distillateurs de profession qui compte dans la région du cognac. En pleine période de distillation, il nous raconte ce métier méconnu et prend le pouls de la conjoncture. 

Pouvez-vous nous expliquer ce qu'est un distillateur de profession ?
Nous avons dans la région deux sortes de distillateurs. Il y a les bouilleurs de cru qui sont les vignerons-distillateurs qui distillent uniquement leur récolte et il y a les distillateurs de profession – ou bouilleurs de profession – qui distillent la récolte des tiers. Soit il fait de la prestation de distillation en prenant le vin chez le viticulteur, le distiller avec la méthode souhaitée et lui rendre l’eau-de-vie, soit il achète le vin aux viticulteurs, le distille comme il l’entend, le stocke ou le revend au négoce. L’AOC Cognac comprend autour de 120 distillateurs de profession, soit autour de 1200 ou 1300 alambics pour représenter chaque année un peu plus de la moitié de la production.  

Combien avez-vous d'alambics et comment s'organisent vos journées au cœur de la campagne ? 
Je suis à Segonzac, au cœur de la Grande Champagne, j’ai 15 alambics. Mes journées de 24 heures sont rythmées par deux cycles de distillation. Les viticulteurs ou courtiers nous déposent des échantillons qui partent au laboratoire d’analyses, après on programme le retrait des vins avec les transporteurs, les vins arrivent avec tout le travail administratif que ça engage et enfin on distille. A la dégustation, je détermine le moment où nous gardons les cœurs de chauffe et basculer le reste (les secondes) dans une nouvelle distillation. Je commence mon métier de distillateur de profession 5 à 6 jours après le début des vendanges. Etant aussi viticulteur, c’est une période très chargée. Légalement, nous devons tout distiller avant le 31 mars, sauf dérogation comme cette année, soit le 10 avril du fait des volumes importants à distiller et les inondations qui ont touché certaines distilleries. Je ne distille pas le reste de l’année d’autres alcools, je ne distille que du cognac avec une attention particulière à l’endroit de la qualité et des questions environnementales. Notre métier est aussi d’épauler le bouilleur de cru si jamais il n’a pas la capacité de passer tout le volume. Alors nous trouvons des solutions. 

Enfin, le marché du cognac connaît un ralentissement avec, par voie de conséquence, une baisse des quotas, quelles sont les répercussions sur votre activité et comment voyez-vous les mois voire les prochaines années à venir ? 
Pour l’instant, il n’y a aucune incidence sur mon activité de distillateur de profession car la récolte a été très abondante et, malgré la baisse du quota à 10,5 d’alcool pur, la région s’est accordée à passer le surplus en réserve climatique. C’est une assurance garantie contre les aléas. Bien sûr, nous ne pourrons pas faire comme cela durant des années, l’avenir est incertain, nous attendons qu’une seule chose, que le commerce reparte. Sinon, l’an prochain, nous devrions encore avoir une campagne relativement soutenue mais ensuite, ce sera plus tendu si le commerce ne repart pas.