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Corrèze, une nouvelle appellation de poche

AOP Corrèze ©Fédération des vins de la Corrèze

Auteur

Isabelle
Bachelard

Date

09.03.2023

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La tradition viticole du département de la Corrèze s’est relancée tout doucement au début des années 80. L’AOP Corrèze est reconnue depuis le 22 février 2023 au niveau européen pour ses vins rouges, blancs et de rares vins de paille.

Les vignerons corréziens présents au dernier salon de l’agriculture à Paris étaient tout sourire, heureux de pouvoir revendiquer le label européen AOP, appellation d’origine protégée, suite à la publication le 22 février au Journal Officiel de l’Union Européenne. L’AOP Corrèze devient ainsi la 750e indication géographique reconnue en France, et la 3 500e au niveau européen.

De l’IGP à l’AOP pour les vins corréziens

De 2009 à 2017, les vins produits en Corrèze bénéficiaient d’une Indication géographique protégée (IGP) mais le passage au niveau supérieur a été plus long que prévu. En effet, non contents de produire des vins blancs secs et rouges, les Corréziens ont une tradition particulière, celle des vins de paille (ou « paillés ») et les vignerons du Jura n’ont pas vu l’arrivée de concurrents du meilleur œil – même si les volumes sont sans comparaison. C’est donc seulement le 3 mai 2017 qu’a été votée la reconnaissance de l’appellation d’origine contrôlée (AOC) Corrèze pour la France, devenue à l’échelle européenne appellation d’origine protégée (AOP) depuis le 22 février 2023. Une dénomination géographique complémentaire « Coteaux de la Vézère » est également prévue et réservée aux vins tranquilles rouges et blancs secs.

Une histoire qui renait

Les témoignages archéologiques dans la région de Beaulieu, Meyssac ou de Brive attestent de la culture de la vigne à l’époque gallo-romaine. Tout le Limousin apparait concerné par cette culture mais c’est dans la région de Brive qu’elle semble être la plus développée. Yrieix (Aredius), le plus connu des saints limousins mentionne dans son testament au début du VIe siècle des vignobles sur 17 paroisses du bassin de Brive. La culture de la vigne s’est développée à partir du XIIIe siècle, avant d’entrer littéralement dans l’économie locale au XVIIe. « L’Etat des paroisses de l’élection de Brive », établi entre 1660 et 1675, mentionne que dans de nombreuses paroisses viticoles « le principal revenu est le vin. ». En 1777, par peur de perdre leurs principaux revenus, les moines cordeliers de Donzenac déposent plainte, car le tracé de la route royale doit traverser l’enclos où ils produisent un vin de bonne qualité. Le vignoble corrézien a atteint son apogée au XIXe siècle, avec 16 735 ha (1840) avant de décliner comme partiquement partout en France avec l’arrivée du l’oïdium en 1851, du mildiou en 1880 et surtout du phylloxéra en 1885 et du développement du chemin de fer. Les usages viticoles ne sont alors maintenus que pour l’autoconsommation, en particulier dans la zone de production de vins de paille, au sud du département.

Des cépages atlantiques

Pour les rouges, le cépage principal est le cabernet franc, parfois assemblé avec le cabernet sauvignon et le merlot. En blanc on trouve du chardonnay, du sauvignon et du chenin blanc. Pour élaborer le vin de paille, tous les raisins sont autorisés, à condition d’être cueillis puis séchés sur des claies. Les cépages peuvent être séparés ou pressés ensemble pour faire un vin de paille ambré. Les vins bénéficiant de la dénomination géographique complémentaire « Coteaux de la Vézère » se déclinent uniquement en rouge et blanc sec avec un encépagement qui rappelle l’Anjou (respectivement cabernet franc et chenin blanc)

Un pays de Cocagne au sud du département

Le vignoble de Corrèze est « grand en potentiel » explique Jean Mage, président de la fédération des vins de la Corrèze, car tout le monde ne revendique pas l’appellation. La zone est immense, elle couvre 24 290 ha sur 24 communes. Mais en 2021, pas plus de 350 hl sur 21,43 ha ont été revendiqués. « Si on pouvait aller à 200 ou 300 ha plantés…» rêve Jean Mage, vigneron au domaine de Chirac à Chirac (mais sans lien direct avec l’ancien président de la République). Il rappelle que le département est vaste, qu’il n’y a jamais eu de vignes en Haute-Corrèze, que c’est seulement autour de Brive que les sols et le climat sont adaptés. « Un pays de Cocagne » précise-t-il. L’aire d’appellation est concentrée au sud-ouest du département dans la zone de piémont des bassins de Brive et de Meyssac. Elle s’appuie à l’est sur les contreforts du Massif Central, à l’ouest sur les collines du Périgord et sur le causse de Martel et est bordée par la rivière Dordogne au sud.