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Sauternes : La Tour Blanche passe au bio

Auteur

Michel
Sarrazin

Date

20.10.2021

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Cet établissement emblématique, 1er grand cru classé en 1855 des vins liquoreux en Sauternes, mais aussi école de viticulture et d’œnologie réputée, s’était engagé il y dix ans dans une démarche environnementale. Le voilà qui entame cette année une démarche de conversion en bio. Miguel Aguirre, son Directeur d’exploitation, revient sur ce changement profond qui impacte la qualité du vin, l’environnement du domaine, mais aussi la formation des élèves.

Pourquoi vouloir passer au bio Miguel ?

J’ai une sensibilité particulière au bio car j’ai géré le lycée agricole d’orange en bio pendant 6 ans. Je suis arrivé à La Tour Blanche en 2016, et j’ai voulu partager cette sensibilité avec les équipes. A l’issue de l’année test en 2020, les équipes ont voulu y aller. Ils se sont prouvé qu’ils étaient capables de le faire. Et sur l’année 2021 ils peuvent être fiers de ce qu’ils ont accompli. Un salarié était là depuis 20 ans et il m’a dit : « Miguel, j’ai beaucoup appris ». Une autre raison est qu’on développe beaucoup d’évènementiel au milieu des vignes. Ce serait incohérent d’amener le visiteur au milieu de vignes traitées.

Quel a été votre calendrier ?

Déjà en 2010 , nous avions décidé de travailler en bio les parties du vignoble qui étaient aux abords des habitations et plus particulièrement celles qui étaient proches du lycée. En 2011, nous nous sommes engagés dans le SME (Système de Management Environnemental). En 2014 nous étions certifié HVE 3. Puis en 2020, nous avons effectué des tests sur l’intégralité du vignoble. En 2021, nous avons fait la demande officielle de conversion. Le premier millésime certifié bio sortira en 2023.

Est-ce que cela va changer votre modèle économique ?

Les niveaux de rendement sont déjà bas. Mais avec le recul sur les 10 dernières années, sur les parties qui étaient en bio, on s’aperçoit qu’on n’a pas eu de perte de rendement. Si le modèle économique change ce n’est pas sur les rendements mais sur le travail de la vigne. Avant le passage en bio, nous étions partis dans le propre avec des produits qui étaient finalement moins efficaces que la bouillie bordelaise et que le souffre. En conventionnel on est dans le curatif, en bio on est dans le préventif. Le changement de modèle économique passe davantage vers une conduite du vignoble par le zéro herbicide et le travail du sol pour avoir des rendements viables. Lorsqu’on passe en bio, c’est un peu plus de temps de travail et donc un peu plus de main d’œuvre : les charges sont plus importantes : il y a un peu plus de temps de travail (+ 20/25 % pour le travail du sol) , et vous consommez davantage de gasoil (+30 %). On a donc investi dans du matériel de désherbage et on devrait acquérir un enjambeur électrique. Le changement de modèle économique passe aussi par notre volonté de lutter contre les aléas climatiques. Ce qui mine la Tour Blanche c’est bien les aléas climatiques et pas le passage en bio.

Les élèves de l’école de viticulture de La Tour Blanche sont-ils sensibilisés au bio ?

On sensibilise les étudiants de BTS à l’approche globale de gestion du château. Tous les élèves de bac pro passent dans les vignes, 7 heures tous les dix jours pendant 30 semaines. Ils y passent presque 200 heures par an. C’est important de commencer à enseigner le zéro glyphosate. Ce sont des futurs ouvriers qualifiés qui sont sensibilisés au bio et à l’environnement. On a mis en place avec la ligue de protection des oiseaux une identification des chauve-souris qui vivent ici et sur leur action qui fait baisser la population du ver de la grappe.

D’autres projets Miguel pour La Tour Blanche ?

Oui, une boutique. Elle vient traduire cette volonté de développer l’oenotourisme. Elle fera 100 m2 avec un certain standing. Jusqu’à présent nous avions développé de l’oenotourisme sans pouvoir vendre car on n’avait pas d’outil de vente. Elle mettra en scène tout le savoir qu’on transmet pendant les visites. Les travaux seront achevés le 1er mai 2022. La Tour Blanche appartient au Conseil Régional de la Nouvelle Aquitaine, c’est lui qui finance le projet.