Samedi 5 Octobre 2024
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05.06.2012
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En période de crise économique, les gestionnaires de fortune rivalisent d’imagination pour proposer des produits financiers originaux, des investissements « passion » comme le vin, destinés aux riches épargnants déçus des rendements de la Bourse et marchés obligataires.
Vin, forêts, manuscrits anciens, chevaux de course, montres, voitures de collection… peuvent faire l’objet de placements, sous forme de part de sociétés ou de Fonds commun de placement (FCP). Le vin – notamment les grands crus – a actuellement le vent en poupe, dans un marché que les spécialistes jugent désormais assaini, après le dégonflement d’une bulle spéculative.
La Financière d’Uzès, une maison familiale de tradition, a ainsi sauté le pas et a lancé un FCP, baptisé « Uzès Grands Crus ». « L’idée est de considérer la bouteille de grand vin comme un placement, une nouvelle classe d’actifs au même titre qu’une action, et de passer d’une logique de consommateur à celle de financier », explique son PDG, Dominique Goirand, qui souligne que son produit est le premier du genre à avoir été déclaré en France auprès de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF).
Déclaré, mais non agréé, souligne un professionnel du secteur : ce fonds est « contractuel », c’est-à-dire destiné à une clientèle avertie d’investisseurs disposant de connaissances spécifiques. Avertie et fortunée. Car il faut pouvoir débourser un minimum de 250 000 euros, prix du ticket d’entrée dans ce fonds.
Les grands crus, achetés par la Financière Uzès, sont choisis selon un cahier des charges précis. « On achète ceux qui nous paraissent sous-cotés suite à une analyse très poussée. Quant à la qualité, on se base sur un panel de 25 dégustateurs. Nous ne recherchons ni les vins de collection, ni les millésimes au-delà de 10-15 ans », explique Hugues Lapauw, analyste chez Uzès Gestion mais aussi diplômé en oenologie.
L’objectif du fonds est d’investir à 75% dans le vin, dont 50% au minimum de grands crus de Bordeaux et Bourgogne, ajoute-t-il. Les vins sont achetés auprès de négociants et surtout sur le Liv-ex Fine Wine Exchange, la Bourse du vin à Londres. La Financière Uzès vise un objectif de rendement supérieur aux obligations françaises à 5 ans, ce qui reste très modérément ambitieux.
La pépite de l’ex-Pink Floyd
Le « label » des autorités boursières françaises confère au Fonds Uzès une respectabilité par rapport aux autres produits spécialisés dans ce même genre d’actifs. Un atout car la concurrence sur ce créneau va en s’étoffant. De nombreux fonds se sont récemment créés dans les pays à fiscalité légère comme le Luxembourg. L’un des plus connus, le fonds luxembourgeois « Nobles Crus », qui prétend « créer de l’émotion dans la finance », investit dans les tout premiers crus millésimés et parie sur les vins rares et très anciens. Ses gérants font état d’une performance, depuis sa création en janvier 2008, de 71, 5%.
D’autres sociétés se développent aussi en France autour du thème du vin, comme « Patrimoine Grands Crus » qui propose de racheter des parts dans une cave, « La Bergère » ou « Patriwine » qui vendent des parts de leur société de négoce de vin.
Des placements qu’il faut toutefois manier avec une extrême précaution, souligne Anthony Calci, un gestionnaire de portefeuille indépendant, qui qualifie ce type de produit financier « d’exotique ».
D’autres « investissements passion » sont aussi proposés en gestion collective, comme dans des sociétés spécialistes des achats de manuscrits anciens et d’autographes, ou dans un fonds investissant dans les montres de collection. Les voitures de collection ont également leur fonds, créé en 2011 par l’ancien batteur des Pink Floyd Nick Mason.
Véronique Kiss
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