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Margaux, une affaire de femmes

Auteur

La
rédaction

Date

21.12.2011

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Propriétés de la famille Perrodo, les châteaux Labégorce et Marquis d’Alesme (3ème Grand Cru Classé) connaissent un vrai renouveau orchestré par Nathalie Perrodo, qui a pris la relève de son père en 2006, et Marjolaine de Coninck, Directrice Générale depuis 2010. Deux femmes de tête pour deux marques fortes de l’appellation Margaux.

En cette fin d’année 2011, deux vins de l’appellation Margaux arrivent sur nos tables portés par un vent de nouveauté. D’un côté, Château Labégorce 2009, qui pour la première fois depuis deux siècles nous donne à goûter le fruit de la fusion des deux voisins « historiques » Labégorce-Margaux et Labégorce-Zédé. De l’autre, Château Marquis d’Alesme 2009, troisième Grand Cru Classé 1855, qui s’offre un vrai « relooking » de son étiquette en troquant sa traditionnelle couronne contre une vue plus classique et sobre de son château, voisin immédiat du légendaire Château Margaux.

Ces vins qui font l’actualité ont en commun, au-delà de leur appellation, d’appartenir à la famille Perrodo, dont la fille, Nathalie, dirige les vignobles depuis 2006. L’année dernière, cette dernière a proposé à Marjolaine de Coninck de prendre la Direction Générale des deux domaines : depuis, les deux femmes travaillent de concert pour remettre Labégorce et Marquis d’Alesme au sommet des « marques fortes » de l’appellation Margaux.

De père en fille

C’est en 1989 qu’Hubert Perrodo, fondateur du groupe pétrolier Perenco, rachète le Château Labégorce-Margaux. En 2005, il fait l’acquisition du domaine voisin de Labégorce-Zédé, avec l’arrière-pensée de réunir les deux propriétés, comme c’était le cas jusqu’en 1795. Une entreprise ambitieuse, quasi-inédite en Médoc, visant à réassocier deux terroirs complémentaires et leur rendre tout leur lustre. Mais pour réussir ce pari de longue haleine, Hubert Perrodo veut aussi doter son « empire du vin » d’une locomotive de prestige : ce sera Château Marquis d’Alesme Becker, troisième Grand Cru Classé. Lorsqu’il le rachète au printemps 2006, le domaine figure parmi les mauvais élèves du classement de 1855 : le prototype même de la « belle endormie » auquel Hubert Perrodo souhaite rendre ses lettres de noblesse.

Mais la brusque disparition d’Hubert Perrodo en décembre 2006 vient donner un coup de frein aux développements des deux propriétés. Sa fille Nathalie reprend finalement la direction stratégique des domaines viticoles. En janvier 2010, elle annonce la fusion officielle des châteaux Labégorce-Margaux et Labégorce-Zédé (à compter du millésime 2009) sous une seule bannière, Château Labégorce. Un mois plus tard, elle annonce l’arrivée de Marjolaine de Coninck à la Direction Générale des propriétés viticoles de la famille.

Une femme aux commandes

Marjolaine de Coninck arrive armée d’un solide background. Agronome, œnologue, diplômée en économie, elle s’est illustrée dès 1997 dans la gestion de plusieurs propriétés sur différentes appellations bordelaises et européennes. Après avoir pris en 2006 la direction du Château L’Arrosée, Grand Cru Classé de Saint-Emilion, elle rejoint la Direction générale des propriétés de la famille Adams, investisseurs américains ayant six propriétés Rive Droite dont Château Fonplégade. Entre un management « à l’américaine » et une approche parcellaire du travail de la vigne inspirée de la Rive Droite, Marjolaine de Coninck décide en 2010 d’opérer la synthèse de toutes ses expériences en relevant le défi de la famille Perrodo : redorer le blason des « marques » Labégorce et Marquis d’Alesme. Avec, pour cette dernière, un chantier particulièrement vaste.

Très vite, la nouvelle Directrice Générale affiche sa priorité : remettre à plat tout le parcellaire pour aller au plus profond de la connaissance des différents terroirs. Sur les 85 hectares et 126 parcelles que comptent les deux propriétés, près de 40% se sont avérés réclamer une restructuration : car pour Marjolaine de Coninck, « tout part de la vigne, et de la nécessité d’obtenir un raisin parfait ». Ce qui se traduit, pour Marquis d’Alesme, par une limitation de la charge au pied (5 à 6 grappes par pied dans un vignoble à 10 000 pieds/ha), des vendanges manuelles, une double table de tri… Parallèlement, elle décide de s’attirer les conseils d’œnologues reconnus, Claude Gros pour Labégorce et Michel Rolland pour Marquis d’Alesme. Cela lui permet « d’imprimer sa marque » dès son arrivée sur le millésime 2009 en retravaillant les assemblages et les élevages. Et sur le millésime 2010, les chais de Marquis d’Alesme rouvrent leurs portes, inaugurant des cuves tronconiques bois et inox de 70 hl.

Il s’agit là d’une première étape : à l’horizon 2015, Marquis d’Alesme devrait se doter d’un nouveau chai ouvert au public, offrant une perspective sur le château – qui appartient toujours aux anciens propriétaires. Un espace d’accueil, de transmission (sa décoration intérieure devrait évoquer la double culture de la famille Perrodo, la mère de Nathalie étant chinoise) mais aussi un espace de production, dont les objectifs sont déjà clairement établis : d’ici dix ans, 10 000 caisses de Marquis d’Alesme, et 15 à 17 000 caisses de Labégorce. A Margaux, les femmes ne cachent pas leurs ambitions.