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[Millésime Bio] Christophe Ferrandis entre Corse et Mediterranée

Auteur

Frédérique
Hermine

Date

31.01.2018

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Le vigneron corso-marseillais du Clos Signadore joue en bio certifié depuis 2013 sur les deux tableaux des cépages corses et méditerranéens.

Christophe Ferrandis a grandi en Corse (son grand père paternel était vigneron) mais il est marseillais et fait la navette régulièrement entre ses vignes de Patrimonio et le continent. Pas facile de s’installer dans l’île mais à 26 ans, avec l’aide de la Safer, il récupère 5 hectares de vieux niellucciu de 40 ans sur deux mamelons de marnes bleues et schistes calcaires dans la plaine de Poggio d’Oletta, près de Patrimonio. Après des études viti-oeno, il a fait ses armes à Pibarnon et a racheté des vignes à l’ancien chef de culture du domaine Orenga.

Lorsqu’il crée son domaine, il l’appelle Signadore, « celui qui éloigne le mauvais œil ». On est en 2001. Il devra finalement arracher les vielles vignes qui ne produisaient plus et replanter progressivement du vermentinu pour les blancs et du niellucciu pour les rouges et les rosés en pressurage direct comme les blancs. « Mais je suis d’abord un faiseur de rouges avec pour motivation majeure la maturité avant tout, même si il faut vendanger sous la pluie comme en 2002 et 2005, et en perdant 30% de la récolte car il faut reconnaître que le niellucciu n’est pas facile- dur à la vigne et au chai, précoce mais mûrissant difficilement. La fenêtre est étroite car si il n’est pas mûr, il peut être rustique et austère; Cela implique d’être autant vigneron que vinificateur ».

Un sacrifice et une prouesse

Christophe Ferrandis a banni dès la création du domaine désherbant et engrais chimique mais le bio n’était pas une religion, il y avait une obligation de résultats et de bon vin avant tout : « c’est mon importateur canadien qui m’a convaincu d’aller jusqu’à la certification mais en 2010, ça a été un sacrifice. J’ai récolté très peu de vin, heureusement que j’avais mis des bouteilles en réserve, 300 à 600 par an les années précédentes. Et en étant seul sur le domaine, c’était une prouesse; aujourd’hui, on est entre 2 et 4 à l’année ». Il est certifié bio depuis 2013 mais pour ce qui est de la biodynamie, le vigneron considère qu’il s’agit encore d’une « chapelle trop contraignante surtout à la vigne même si en cave, je suis le calendrier lunaire ».

En 2016, Christophe Ferrandis a perdu plus d’un hectares parti avec les inondations et le vigneron de Patrimonio ne décolère pas. Car pour lui, si il perdu ses vignes, c’est la faute au non entretien des berges mais « dans la réglementation corse, impossible d’intervenir sur un cours d’eau. Et quand on ne sanctuarise pas le maquis, l’homme peut vivre intelligemment avec la nature et contribuer à l’entretenir. Je veux bien entretenir mais je n’ai pas les moyens de remettre en état ou de replanter sur des kilomètres des aulnes à la place de peupliers pour mieux tenir la terre. La problématique est le même pour créer des pare-feux dans le maquis; il faut l’accord des propriétaires mais les problèmes d’indivision empêchent souvent tout travaux » Christophe Ferrandis a aussi un projet de cave au milieu des vignes, plus moderne et optimisée que son hangar mais sur un site classé, les contraintes sont lourdes.

Une bibliothèque de cépages sur la côte

Le vigneron barbu et parfois bourru hiérarchise ses vins sur deux gammes, A Mandria – la bergerie en corse (16-25€) et ceux élevés en demi-muids, jusqu’à 24 mois pour le Clos Signadore rouge (47€) avec un engagement de réserve sur le modèle du rioja. Ces dernières années il a racheté 2 hectares sur la côte orientale à Borgo pour jouer des cépages plus méditerranéens comme le minustellu, le genovese, l’aleatico, le riminese, le bianco gentile. L’idée est de disposer d’une bibliothèque de vieux cépages corses et méditerranéens. Les parcelles ont été vendangées pour la première fois cette année. Le vin rouge, élevé en cuve, juteux et croquant sur des notes de fruits noirs bien mûrs, de pruneaux et de réglisse sur une belle trame acidulée, sortira en Vin de France mais Christophe Ferrandis ne lui a pas encore trouvé de nom.