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Banque et vin : le CCSO sur les rangs

Auteur

La
rédaction

Date

10.04.2012

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Entretien avec Bernard Francisoud, directeur du Crédit Commercial du Sud Ouest, autour des relations (ô combien stratégiques…) entre secteur bancaire et secteur viticole.

Bernard Francisoud, 61 ans, a commencé au Crédit commercial de France à Lyon puis a bourlingué dans toute la France. C’est ainsi qu’il s’est retrouvé compagnon du Beaujolais mais aussi de la Jurade de Saint-Emilion (33) ! Il a travaillé dans les Côtes du Rhône, à Paris où il était responsable commercial du Crédit commercial de France. Arrivé en 1999 à Bordeaux, il est directeur général du Crédit Commercial du Sud Ouest, et éclaire de son regard de banquier un monde du vin en pleine mutation.

Dès la page d’accueil de votre site internet, on voit que CCSO s’intéresse au monde du vin. Pourquoi cet engagement sur un secteur dominé par le Crédit Agricole ?

Nous avons toujours été dans le milieu du vin. Sur la partie viticulture, on est équipé également pour accompagner le client à l’export. Nous avons des agences très puissantes dans le milieu : c’est le cas de notre agence de Saint-Emilion par exemple. Nos salariés savent comment fonctionnent les exploitations. On finance tout ce qui va autour de l’exploitation (aménagements des chais, barriques, cuves, bouchons…) et on aide à aller à l’export pour aller chercher des marchés. Par exemple sur la Chine.

Le CCSO, Crédit Commercial du Sud Ouest, a été implanté en Aquitaine en 1991. Quelle est la singularité de cette banque ?

C’est une banque qui a 21 ans. Elle a été créée par le Crédit commercial de France, qui a décidé de transformer une partie de son réseau en agences. Certaines agences avaient 100 ans ! Le CCSO a vécu sa vie d’une façon différente du CCF, qui a été acheté par HSBC en 2000. Nous sommes donc devenus une filiale du groupe anglais. A cette époque, j’ai lancé par mal de « wine and cheese » en Dordogne ! On faisait venir un œnologue et on regroupait tous les Anglais. On était dans les années 2000 à 2008. Je représentais la banque, l’oenologue expliquait comment on goûtait le vin. C’était très sympa comme approche. Evidemment, on avait une offre particulière car avec HSBC, on était une banque locale adossée à un grand groupe. Notre ligne est « La banque qui réussit aux gens d’ici ». Nous couvrons l’Aquitaine grâce à une assez forte implantation du CCSO sur l’Aquitaine nord mais aussi sud où nous venons d’absorber la banque Pelletier.

Ce qui nous différencie, ce qui fait partie de nos gênes, c’est que nous sommes une banque à capital humain. Pour nous, l’individu est primordial. C’est le moyen de nous différencier. Nos conseillers ont moins de gens à suivre que dans d’autres établissements. On fait près de 80 millions d’euros de chiffre d’affaire, et 10 à 11 millions de résultats. Nous sommes 475 personnes pour 90 000 clients. Nous sommes en fait une banque de détail, implantée dans le tissu du particulier et de l’entreprise. Nous sommes vraiment des locaux.

Que représente aujourd’hui le monde du vin pour CCSO ?

Le secteur viticole pèse lourd dans la zone de Bordeaux. Cela représente le 6ème de nos encours, entre 15 et 20%. C’est important. Ce n’est pas négligeable et on essaie de progresser. On travaille beaucoup sur le système de la recommandation. Et les guichets qui sont implantés sur la zone viticole ont des objectifs de croissance.

Le vin occupe l’actualité financière par ses grands crus, dont la santé est insolente, et les petits châteaux qui sont à la peine. Quelle est la réalité des dossiers que vous suivez ?

Notre réalité n’est pas celle des grands châteaux, mais celle qui est intermédiaire. Les grands châteaux n’ont pas toujours de grands besoins. Je n’ai pas vu d’autres secteurs dans lesquels j’ai vu des bilans pareils. Nous, nous nous intéressons à la gamme de 15€. C’est la masse des châteaux dont nous nous occupons. Ils s’en sortent plutôt pas mal grâce aux millésimes 2009 et 2010. On sent que l’état de santé s’est restauré après une période noire en 2009 et 2010. Pour tous ces châteaux, nous représentons une autre alternative, un autre choix.

Les grands châteaux de Bordeaux investissent dans des chais, dans la vigne, dans le patrimoine, comme ils l’ont fait au XVIIIème siècle. Est-ce stratégique pour le monde de la banque ?

On essaie nous aussi d’avoir dans notre clientèle ces châteaux mais ils sont difficiles à attraper ! Ils ont souvent leur banque à Paris et gagnent aussi énormément d’argent. Certains qui font 100 de chiffre d’affaire ont 70 de résultat…

Les amateurs argentés investissent de plus en plus dans le vin. Bonne ou mauvaise affaire pour le secteur bancaire ?

Cela dépend vraiment qui est l’acheteur. Nous avons vu de doux rêveurs, des gens qui pensaient qu’ils allaient passer le prix de la bouteille de 10 à 100€. En réalité, on constate des déboires dans ces domaines, avec des gens qui ont acheté des propriétés trop chères ou n’ont jamais réussi à augmenter le prix de la bouteille. On préfère donc quelqu’un qui aura la fibre ou la capacité à gérer. Sur les quelques châteaux qui viennent d’être achetés par les Chinois dans le Bordelais, on constate également que ces acheteurs n’utilisent pas de crédit. Ce n‘est pas au bénéfice du commerce local…

Propos recueillis par Rodolphe Wartel