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Cognac « Comptons sur la dynamique de tous les acteurs de la filière »

Auteur

Jean-Charles
Chapuzet

Date

08.09.2023

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Après une quinzaine d’années de folie, le marché du cognac connaît quelques doutes. À l’approche de la vendange du millésime 2023, Johann Landreau nous délivre sa lecture de la situation. En tant que directeur-général du groupe Landreau et vice-président d’Impaact, il est au cœur du combat en accompagnant de nombreux viticulteurs de la région.

Avec notamment votre département Agro et Solutions, vous accompagnez des viticulteurs dans le cognaçais, pouvez-vous nous refaire l’histoire de ce millésime suspendu à une forte pression du mildiou ? 
Les quelques jours qui précèdent la récolte sont souvent signe d’anxiété, d’impatience, un climat d’avant-match règne sur le vignoble... Ce n’est pas mon moment préféré, les scénarios fusent, les prévisions de rendement gonflent et diminuent selon la météo du jour. Mais les jeux sont faits depuis longtemps, l’initiation florale de la campagne précédente, les paliers de production mis en réserve depuis quelques années et la bataille climato-cryptogamique de cette année devrait payer. On parle de récolte du siècle mais restons prudent.

Mais le quota du rendement est faible cette année en raison de la conjoncture…
En effet, ainsi, en grande majorité, le rendement annuel maximum autorisé de 10,50 hl AP/ha devrait être atteint, l’excédent permettra de réaliser de la réserve climatique. Malheureusement il y a quelques secteurs, comme le sud de la Charente-Maritime, qui ont été très touchés par la grêle ou de fortes pluviométries sur mai et juin, ces agressions ont engendré d’énormes contaminations de mildiou, qui, dans certains cas, ont réduit la récolte de façon drastique. 

Est-ce le moment idéal pour juger des nouvelles pratiques environnementales ?
Clairement. Les méthodes agro-environnementales dans la production du cognac ont permis de déplafonner les rendements de manière durable tout en sortant de notre zone de confort. La forte réduction d’utilisation de produits CMR (Cancérigène Mutagène Reprotoxique) par le remplacement de biocontrôle ou de matières actives moins toxiques demande une adaptation fine des méthodes d’applications. La chimie lourde a rendu service dans un sens mais nous avait donné de mauvaises habitudes. L’observation et la formation sont encore nécessaires pour dompter ce nouveau challenge « écolonomique » qui passera par des grands axes comme le digital, la robotique, la génétique et surtout la résilience de tous les acteurs.

L’envol du coût des matières premières, l’affaissement du marché du cognac, quel est votre état d’esprit à l’endroit de la situation économique de la région ? 
L’inflation sur les matières premières correspond totalement aux enjeux de demain. Elles ne peuvent pas être utilisées à l’infini mais nous en avons besoin. Nous prenons tous cette envolée des prix en pleine face. On dit qu’il est intéressant de sortir de notre zone de confort mais entre la hausse des matières premières, les besoins en main d’œuvre qualifiée, les agressions climatiques et un business plan en baisse, il faut avoir le moral. Un bon cognac se fait sur plusieurs années, je ne pense pas que nous devons nous arrêter sur une campagne. Les efforts menés depuis quelques années ont payé, le vignoble se reboise, les rendements explosent, des hectolitres sont mis de côté, la protection de l’environnement devient une priorité. Les méthodes évoluent parallèlement à une croissance folle des surfaces par individu, ce marathon de la performance est fatiguant mais nécessaire. En prenant ces risques je pense que nous construisons l’avenir de la filière sans négliger l’impact sociétal des méthodes. Comptons sur la dynamique de tous les acteurs de la filière afin de grandir ensemble.

Quels sont les signes favorables pour l’avenir à l’approche de cette campagne de vendanges 2023 ? 
Les nouvelles plantations vont donner une bouffée d’oxygène dans la conduite du vignoble. Les belles années ont permis de remettre à flot l’outil de production et les exploitations se sont modernisées. Personne ne s’est endormi, les investissements ont été réalisés. Sans cela la petite tempête programmée aurait été beaucoup plus difficile. La morosité ne doit pas être là, même si la prudence est de rigueur, nous avons la chance d’avoir quelques belles locomotives pour assurer la promotion et la mise en marché de nos belles eaux-de-vie. Prudence, confiance : les racines du cognac sont bien profondes pour continuer de faire rayonner le produit sur tout le globe.