Accueil Jean-Michel Bardet, nouveau chef exécutif de Moët & Chandon !

Jean-Michel Bardet, nouveau chef exécutif de Moët & Chandon !

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Auteur

Yves
Tesson

Date

04.02.2023

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Prenant la succession de Marco Fadiga, devenu chef exécutif de Dom Pérignon, le chef cuisinier Jean-Michel Bardet réalisera les accords de la Maison Moët & Chandon au Trianon, au cœur d’Epernay, et au Château de Saran, l’ancienne demeure familiale, perdue au milieu des vignes de la Côte des blancs.

D’où vient votre vocation de cuisinier ?

Rien ne m’y prédestinait, car mes parents n’étaient pas du tout de la partie. Mais devenir cuisinier était un rêve d’enfant ! Chez moi, dans ma cuisine, vous trouverez encadré un dessin de gâteau que j’avais réalisé lorsque j’étais à l’école primaire ! C’est ainsi qu’après la troisième, au lieu de rentrer en seconde, j’ai enchaîné sur un BEP restauration à Menton, sur la côte d’Azur. Ma mère est corse, vous comprendrez que la Méditerranée constitue la colonne vertébrale de ma cuisine, d’où ma passion pour les agrumes, l’huile d’olive, mais aussi le juste produit, la juste cuisson … J’ai commencé à travailler très tôt, à 17 ans. D’abord au Yatch Club de Monaco. Cette première expérience m’a permis de découvrir les codes de la haute gastronomie, mais aussi du grand monde, l’art de recevoir … J’ai eu ensuite la chance d’apprendre auprès de chefs étoilés ou non, mais qui étaient tous des passionnés. On s’imprègne de leur manière de cuisiner et lorsque l’on devient soi-même chef, on conserve leur technique tout en y ajoutant son ADN. J’ai connu Londres, Paris, Megève, l’Asie…  J’ai réussi à mon tour à décrocher des étoiles, au restaurant The Ocean à Hong Kong, au Moulin de l’Abbaye à Brantôme et au Domaine du Colombier à Malataverne.

Pourriez-vous citer trois chefs qui aujourd’hui sont des références dans votre manière de travailler ?

Il y a d’abord Emmanuel Renaut avec lequel j’ai collaboré au restaurant « Les Flocons de Sel ». Sa cuisine d’émotions et de moments m’inspire, de même que son goût pour les promenades à la rencontre des artisans locaux et à la découverte des herbes sauvages. Chez Guy Krenzer que j’ai côtoyé au Lapérouse, j’ai aimé la rigueur, les fiches techniques, ce besoin d’analyser pourquoi telle méthode fonctionne et telle autre non, bref, le côté très cadré et technique typique des MOF. Enfin, je ne peux omettre Olivier Bellin pour qui j’ai travaillé à Hongkong. Un Breton qui arrive à mettre le terroir dans une assiette avec une puissance incroyable. Ce côté brut me plaît beaucoup. En fusionnant ces trois approches, celle du terroir, de la technique et cette capacité à écouter ses émotions et à saisir le moment, on parvient à composer des plats extraordinaires.

Qu’est-ce qui vous a poussé à rejoindre Moët & Chandon ?

Je suis un fan inconditionnel de champagnes. L’importance de la Recherche Développement dans le poste proposé m’a beaucoup séduit. J’aime ce travail dans le travail. A 48 ans, pouvoir continuer à apprendre des choses tous les jours, quelle chance ! J’ai aussi été séduit par la démarche originale qui consiste à construire ses recettes autour du vin et non l’inverse. Pour y parvenir, j’ai la chance d’être épaulé par le chef de caves, Benoît Gouez, grâce auquel je suis en mesure de comprendre au plus près le style de la maison, sa philosophie. Travailler directement avec l’auteur d’un vin, c’est encore mieux qu’avec un sommelier ! J’aime enfin le challenge qui consiste à mettre en scène dans l’assiette l’histoire du millésime, le raconter, si le climat a été sec, la récolte difficile…

© James Bort

Pouvez-vous nous donner un exemple de recette que vous avez conçue pour l’une des cuvées de la maison ?

J’ai travaillé sur le Grand Vintage Collection 1999. L’objectif était de mettre en évidence son aspect crépusculaire, l’idée de chromaticité, où la lumière mais aussi les saveurs se décomposent. J’ai créé pour lui un turbot sauvage en peau de truffe noire, associé à une purée de topinambour au beurre fumé ainsi qu’à un fumet d’arrêtes façon Dashi, très réduit, pour donner de la texture et du caractère au vin. J’ai aussi imaginé une pintade fermière, dont la cuisson est très légère. Elle est accompagnée de salsifis confits qui rappellent la sécheresse de l’été 1999. 

Quel élément vous a d’abord frappé lorsque vous avez découvert la Champagne ?

La lumière, la beauté d’Epernay et cet étagement avec Hautvillers qui domine la ville. J’ai eu la chance d’arriver à la mi-octobre, lorsque les vignes ont encore cette couleur or, qui pour moi fait écho à la robe du champagne. La longueur des caves m’a aussi impressionné, et l’histoire incroyable de ce vin. Ce dernier aspect est très important pour moi, connaître l’histoire d’un produit, c’est comprendre pourquoi il a été fait, et mieux maîtriser son essence.