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[Trophées Cognac Vignoble Engagé] Collectifs Maison de Cognac – catégorie Initiatives Collectives

La distillerie de Gallienne, à Javrezac (Charente), où un prototype d’alambic équipé d’une boucle externe de chaleur alimentée par une chaudière électrique a fait l’objet de toutes les attentions ©MMPJ

Auteur

Olivier
Sarazin

Date

23.06.2023

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Cognac - Les maisons Boinaud, Hennessy, Martell et Rémy Martin ont uni leurs efforts. Elles expérimentent une distillation alternative dite « à la vapeur ». Les premiers résultats sont prometteurs

Chaque année après les vendanges, tout le pays du cognac distille. L’opération dure jusqu’au 31 mars. Elle consiste à transformer un vin blanc acide et peu alcoolisé en une eau-de-vie limpide qui ne deviendra cognac qu’au terme d’un long séjour en fût de chêne… Ce miracle répond à un cahier des charges draconien. Le mode de double chauffe charentaise à « feu nu », dans de petits alambics en cuivre, a été défini dès 1936. Il est gourmand en énergie : gaz naturel ou propane. Bon an mal an, comptez 560 gigawattheures (GWh), soit l’équivalent de la consommation domestique annuelle d’une ville moyenne comme Pau.

Vers la décarbonation
Évidemment, la filière souhaite dépenser moins et mieux. Et elle n’a pas attendu la crise énergétique pour essayer de réduire sa dépendance aux énergies fossiles ! On considère que les émissions de gaz à effet de serre d’une distillerie proviennent à 85 % du combustible utilisé. Les professionnels l’ont bien compris, en se dotant de brûleurs plus économes. Bien sûr, il ne s’agit là que d’un premier pas vers la décarbonation. En 2018, le Bureau national interprofessionnel du cognac (Bnic) a stimulé la recherche et le développement en lançant un appel à projets. Négociants et bouilleurs ont retroussé leurs manches. Martell a notamment conçu un dispositif expérimental de chauffe à la vapeur. Le procédé – sans gaz, sans flamme, mais avec de l’eau sous pression – fait appel à une boucle externe alimentée par une chaudière électrique. L’invention a d’abord été testée à la distillerie de Gallienne, à Javrezac (Charente), où le prototype a fait l’objet de toutes les attentions. « Les résultats sont prometteurs », s’est enthousiasmé Christophe Valtaud, le maître de chai de Martell. En 2020, le projet a trouvé trois autres partenaires. L’expérience a été éprouvée à la distillerie Boinaud, à Angeac-Champagne (Charente), pour les maisons Rémy Martin et Hennessy, dont les modes de distillation diffèrent un peu de celui de Martell. Il s’agissait de tester la chauffe avec les lies naturelles du vin.

Des eaux-de-vie goûtées avec soin
Les premières eaux-de-vie produites à Javrezac et à Angeac-Charente ont été analysées et goûtées par un collège d’experts. Leurs caractéristiques organoleptiques sont à ce jour conformes aux attentes. Si les prochaines dégustations sont satisfaisantes, il sera possible de soumettre le procédé à l’Institut national de l’origine et de la qualité (Inao), puis de modifier le cahier des charges de l’appellation, qui ne cite que le seul mode de chauffe « à feu nu ». Ce changement pourrait demander un à deux ans de démarches administratives. La candidature du collectif des sociétés Boinaud, Hennessy, Martell et Rémy Martin aux premiers Trophées Cognac vignoble engagé est présentée par le Syndicat des maisons de négoce (SMC). Ce dernier note que les premières expérimentations ont permis de « réduire de 70 % les émissions de gaz à effet de serre ». On notera enfin que la filière cognac, à l’initiative d’autres négociants, encourage le recours au biogaz et teste aussi la distillation à l’hydrogène.