Lundi 9 Décembre 2024
Glenda et Frank Kalyk achètent le château Picoron en 2015
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09.07.2024
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Un lieu et la fraîcheur des vins constituent tous les ingrédients pour parfaire la réputation de Picoron, un domaine lové dans l’appellation la plus périgourdine du bordelais. La gardienne du temple, œnologue, s’appelle Camille Lanyou. Etat des lieux en cette pépite de Castillon.
Des bois, des prés, des vignes, un paysage vallonné, polycole et des familles, le lieu est un concentré de l’appellation Castillon-Côtes-de-Bordeaux. Le Château Picoron est d’abord un coup de foudre, celui de Glenda et Frank Kalyk, un couple d’Australiens. Nous sommes en 2015, l’architecte d’intérieur et l’avocat d’affaires pensent un lieu – et un projet - pour leur retraite. Glenda aime chiner en France et apprécie particulièrement la rive droite de Bordeaux. Sur la commune de Sainte-Colombe, Picoron est à vendre, l’aventure commence. La belle demeure et ses quelques hectares de vignes ne demandent qu’à vivre. A cheval entre l’Australie et ce domaine, le couple installe une œnologue pour faire du vin et proposer un gîte d’exception. « L’idée est de faire vivre le lieu, de proposer des séjours au cœur de ce domaine et de faire des vins qui sont l’expression de cette veine calcaire », souligne Camille Lanyou. Millésime 1989, la Béarnaise a fait ses études à Toulouse avec des stages chez Laplace en Madiran, chez Claire Villars-Lurton à Ferrière ou chez Courbis en Cornas. Un tour à Madagascar, une vinif au Chili, la cave de Plaimont et enfin Bangkok dans l’import de vins, la jeune femme s’est forgée une certaine idée du vin, de la production à la commercialisation. « Et les propriétaires de Picoron sont des créatifs, des bâtisseurs, c’est une grande chance », ajoute Camille. De quoi s’épanouir !
Le terrain de jeu compte 4,5 hectares de merlot et un chai « de poupée pour faire du sur-mesure », se réjouit l’œnologue. Epaulé du technicien Frédéric Bléas, Camille convertit le vignoble en bio (labellisé sur le millésime 2024), pratique la biodynamie (sans rechercher de label), rejoint l’association Castillon Caractères (présidée par Stéphane Derenoncourt) et élabore des cuvées à faire frissonner les peupliers. D’abord trois cuvées en Produit de France promptes à sortir des sentiers battus du bordelais et à répondre au caricatural Bordeaux Bashing (à Picoron, c’est plutôt Bordeaux Bashung…). Le Blanc de Noirs, No Lemon No Melon, est une définition de fraîcheur, de tension et ça cartonne ! Le rosé, Madam I’m Adam, est racé et acidulé, un rosé d’apéritif comme de gastronomie. Nouveau palindrome, Tattarrattat (cf. Ulysses de Joyce), la cuvée carbo sans soufre avec une palette aromatique autour de la cerise, entre la bigarreau et la cœur de pigeon : une bombe. « On s’essaye au sans soufre mais on se refuse à faire des vins barrés », prévient Camille Lanyou dans un accent qui la ramène au sud-sud-ouest. Portés par un packaging intelligent et décomplexé, ces trois vins à 15€ donnent le ton (de l’esprit de la maison) sinon le la (de ce qu’il faut faire pour se démarquer), des vins d’une grande accessibilité avec de la fraîcheur, de la matière et de l’intensité aromatique. Les trois autres vins sont en appellation Castillon-Côtes-de-Bordeaux. Mon Nom (18€) est sur le fruit, un merlot qui n’a vu que l’inox, d’une grande suavité et fort d’une très belle acidité que délivre le sol calcaire : une expression de Castillon sur la pureté. Né de l’Eden (25€) est une sélection parcellaire sur un calcaire affleurant avec un élevage de 24 mois en fûts (petite partie pour le fût neuf). La profondeur du fruit noir et cette noblesse du touché tannique sont une promesse de garde, un grand classique de Castillon qui regarde vers le Clos Puy Arnaud ou le Domaine l’A. Le Bon Nobel enfin (28€), une autre sélection parcellaire de terrasses avec une vinification intégrale. C’est un vin sur la démonstration, explosif, tapissant le palais de notes réglissées et de fleur de sureau : une (très) grande bouteille.
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