Samedi 13 Décembre 2025
©F. Hermine
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13.12.2025
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Cette année, quatre signatures du Sud-Ouest viennent partager leur vision du vin à Bordeaux Tasting ce week-end au Palais de la Bourse : le domaine Chiroulet, le Château Les Farcies du Pech, le duo Montus & Bouscassé et le domaine de l'écrivain. Quatre histoires très différentes, mais un même désir : montrer ce que leurs terroirs ont à dire aujourd’hui.
À Chiroulet, tout commence par un souffle : le Chiroula, ce vent pyrénéen qui traverse la Gascogne et donne son nom au domaine. Sur ces coteaux de la Ténarèze, Philippe Fezas poursuit depuis 1995 un travail guidé par son intérêt profond pour la géologie et ce qu’elle raconte du lieu. Chiroulet, c’est une histoire familiale de quatre générations, une manière de travailler sans détours, attentive aux sols et à leur énergie. « Nous voulons faire sentir la relation entre la famille et le terroir », explique-t-il simplement. Ce que Philippe Fezas veut partager ? Une Gascogne sincère, qui ne cherche pas à se mettre en scène, mais à se laisser comprendre. Et après ? Le domaine prépare une nouvelle gamme d’Armagnacs, un travail mené avec la même attention portée aux sols.
Aux portes de Bergerac, Les Farcies du Pech s’étendent sur 15 hectares de vigne et 20 hectares de bois, prairies et vergers. Une respiration rare dans le vignoble, que François-Xavier Lesot revendique comme partie intégrante de son approche. Installé dans une chartreuse du XVIᵉ siècle, le domaine a toujours associé vigne et paysage. « Nos vins doivent garder l’équilibre et la générosité du lieu », résume-t-il. Le vignoble repose sur les sables et graviers du Périgord, avec en sous-sol le Tran, cette argile imperméable qui donne aux vins leur assise. Les vignes, plantées Nord-Sud, captent une lumière régulière. Pas d’effets d’annonce : simplement les conditions d’un rouge structuré et droit.
L’équipe travaille sur une nouvelle cuvée pensée pour des consommateurs plus jeunes, tout en développant des actions sur la biodiversité et l’agroforesterie. Affaire à suivre donc ...
Au Domaine de l’Écrivain, l’approche est claire : travailler deux hectares « comme un jardin », en observant la nature, en appliquant des règles de bon sens, et en laissant le terroir faire son chemin. Loïc Caillard résume l’intention de Monsieur Puzio, propriétaire du domaine : montrer qu’en respectant le vivant, on peut révéler un lieu sans artifice, et mettre en avant le travail du vigneron. Le projet est modeste en surface, assumé dans son rythme, mais ambitieux dans l’idée : produire le meilleur vin possible, le faire connaître, et rappeler que le patrimoine viticole français ne se réduit pas aux régions les plus célèbres. « Il n’y a pas que Bordeaux et la Bourgogne », glisse Loïc, presque comme un sourire. Ici, le vin reste avant tout une histoire de plaisir, de partage, et surtout d’accessibilité : un vin pour être bu, et non sacralisé.
Depuis 2018, le domaine produit environ 8 000 bouteilles par an, autour d’une unique cuvée assemblant merlot et cabernet franc, en IGP Périgord. Le choix de l’IGP n’est pas un repli, mais une manière d’ouvrir le champ des possibles, inspirée par des domaines qui ont fait le choix de la liberté : Trévallon, Mas Daumas Gassac, La Grange des Pères… Aujourd’hui, quatre millésimes sont disponibles — 2018, 2019, 2020 et 2022, auxquels s’ajoute un second vin, Villa Ana 2023. Les vins sont proposés en caisse bois de six bouteilles, une présentation simple et soignée.
Le domaine vient faire découvrir ses trois premiers millésimes. L’idée n’est pas de convaincre à tout prix, mais de raconter une démarche : celle d’un vin pensé sans complication, né d’un travail proche du sol, et porté par l’envie de montrer que de petites surfaces peuvent produire des choses justes.
Depuis plus de quarante ans, les châteaux Montus et Bouscassé avancent avec une idée claire : redonner au Tannat et au Petit Courbu la place qu’ils méritent. Ce travail a été initié par Alain Brumont, aujourd’hui rejoint par Antoine Veiry Brumont, qui pousse l’ambition du domaine vers une approche encore plus précise et plus ouverte. « Nous avons toujours cru au potentiel du Tannat, mais aussi au Petit Courbu, longtemps resté dans l’ombre », rappelle Laurence Brumont. Le résultat : des rouges au caractère affirmé et des blancs secs qui prennent leur place sur les tables de gastronomie. Montus s’appuie sur les galets roulés : des vins tendus, directs, avec une énergie particulière. Bouscassé trouve son équilibre dans les argiles grises : un style plus posé, plus rond, mais tout aussi précis. L’équipe veut montrer un Sud-Ouest qui avance, qui interroge ses pratiques, et qui ne se contente plus d’une image traditionnelle. L’histoire, les terroirs et l’envie d’innover forment un triptyque clair dans leur discours. Travail agroécologique, gestion fine des sols, élevages plus nuancés, œnotourisme renforcé : les chantiers sont nombreux, mais cohérents. L’idée est simple : continuer d’affiner sans renier ce qui a construit l’identité des deux domaines.
Pourquoi Bordeaux Tasting ? « Parce qu’on y rencontre des amateurs curieux, attentifs, prêts à comprendre ce qui évolue dans les domaines. Et parce que, pour Montus & Bouscassé, c’est aussi une façon de représenter le Sud-Ouest dans un contexte bordelais où leurs vins trouvent aujourd’hui pleinement leur place. » conclu Laurence Brumont.
Ces quatre domaines du Sud-Ouest viennent à Bordeaux Tasting avec la même envie : ouvrir le dialogue. Chacun à sa manière, ils montrent que leurs vins ne se résument pas à un style ou à une tradition, mais qu’ils évoluent, interrogent leurs terroirs, et se renouvellent sans bruit. À travers leurs cuvées comme leurs projets, ils dessinent un Sud-Ouest en mouvement, attentif à ses paysages et à celles et ceux qui les travaillent. Rencontrer L'Ecrivain, Chiroulet, Les Farcies du Pech ou Montus & Bouscassé, c’est finalement entrer en conversation avec des histoires qui se construisent encore.

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