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Vignobles Decelle : l’incarnation du fédéralisme viticole

Auteur

Jean-Michel
Brouard

Date

13.03.2020

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A la tête de 4 domaines répartis dans tout l’Hexagone, Olivier Decelle a parfaitement réussi son changement de vie et insuffle au sein de ses différentes propriétés un esprit de fraîcheur et de dynamisme. Rencontre.

Son nom ne vous dit certainement pas grand-chose. Pourtant, il fut un temps où Olivier Decelle était à la tête des magasins Picard. Une arrivée dans les vignes n’étant jamais véritablement le fruit du hasard, c’est sur les conseils d’Eric Boissenot, le grand œnologue bordelais, qu’il décide de se rendre acquéreur du désormais célèbre Mas Amiel dans le Roussillon en 1999. « A l’époque, c’est Jacques, le père d’Eric, qu’il l’avait envoyé faire un rapport à Mas Amiel pour en estimer le potentiel en termes de production de vins secs ». Les conclusions étaient positives et voici Olivier lancé dans son aventure viticole qui ne fera que prendre de l’ampleur au fil des ans. En 2004, Olivier et son épouse Anne jettent leur dévolu sur ce qui est certainement alors la dernière propriété de grande qualité disponible à Saint-Emilion : le château Jean Faure. Grande qualité, certes, mais une belle endormie à qui il fallait redonner tout son lustre. Installés sur place, ils vont pleinement se consacrer à ce défi visant à replacer les vins à leur juste niveau. Un pied dans le Roussillon, un pied dans le Bordelais. Il ne restait plus alors qu’à se pencher sur la carte des vignobles français pour aller poser la main gauche sur la Bourgogne avec un projet commun initié avec Pierre-Jean Villa en 2008. « Nous pensions faire initialement du négoce avec de nombreuses cuvées, nous avons finalement fait le choix d’acheter des vignes dans des appellations accessibles comme Chorey-lès-Beaune et Savigny-lès-Beaune ». Et pour éviter tout déséquilibre, il fallait bien trouver un 4ème point d’ancrage pour la main droite… Ce sera chose faite en 2017 dans le Rhône. L’histoire d’une rencontre avec la famille Chol propriétaire du domaine de Boisseyt. Un coup de cœur réciproque et une vente actée sur le principe en seulement 3 jours.

Une communauté de destins

Ce qui frappe au sein des différents domaines Decelle, c’est l’unité qui peut s’en dégager. Une unité de vision quant au style de vins à produire. Une précision évidente, des vins à la définition nette, beaucoup de fraîcheur. Voici le trait commun que l’on retrouve tant dans la cuvée « Vers le Nord » 2018 du Mas Amiel, un assemblage de grenache et syrah produit au pied d’une falaise calcaire au toucher de bouche particulièrement souple, que dans le château Jean Faure 2016. Un fruité délicieux et suave accompagné d’une trame tannique encore un peu ferme mais dont l’ensemble est doté de beaucoup d’allant. Une même sensation de vins identitaires ressort d’un Beaune 1er cru « Clos du roi » 2017 en Bourgogne ou du Saint-Joseph « Les Rivoires » 2019 toujours en cours d’élevage. Et comme une évidence, la volonté de conduire les vignobles en agriculture biologique. Nicolas Raffy, Directeur de Mas Amiel, a accompagné le passage en bio en 2017 et à la biodynamie. C’est le cas également de Jean Lupatelli qui dirige le domaine bourguignon depuis 2010, date de son passage en bio. Le château Jean Faure n’est pas en reste et Marie-Laure Latorre a repris les rênes de la propriété en 2018, un an après sa certification en bio. Dans le Rhône, c’est Romain, le fils d’Olivier et Anne qui est à la manœuvre et ses aspirations s’inscrivent ici dans la même veine d’un meilleur respect du terroir et du vivant. Tous ceux-là s’entendent bien, voire très bien. Ils échangent entre eux sur leurs expériences et donnent une raison d’être à ce portefeuille de vignobles. Celle de montrer qu’il est possible de transcender le régionalisme par une vision globale partagée. Une sorte de fédéralisme éclairé et fédérateur.