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Enchères : un champagne de 1840 repêché dans une épave

Auteur

La
rédaction

Date

02.05.2012

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Oubliée au fond d’une épave en mer Baltique depuis les années 1840, une cargaison de champagne bien conservé a été repêchée par des plongeurs suédois à l’été 2010. Onze des bouteilles jugées « buvables », et bien mieux que ça, seront vendues aux enchères en juin.

Les 162 bouteilles repêchées avaient toutes été débouchées, dégustées puis rapidement rebouchées pour conserver leur frêle pétillement: « Une émotion très forte », se souvient l’historienne de la maison champenoise Veuve Clicquot, dont plusieurs bouteilles figurent au butin.

« Dans une atmosphère de laboratoire et un silence absolu, on a découvert un nez extrêmement puissant puis une bouche d’une fraîcheur inouïe avec des arômes de fleurs, d’agrumes, de bergamote », explique Fabienne Moreau, qui a participé à la dégustation aux côtés de l’expert international Richard Juhlin.

En tout, 79 bouteilles sont propres à la consommation. Les autres, abîmées par l’eau de mer pourtant peu salée en Baltique, iront au musée, affirme Lina Dumas, chargée du projet pour le gouvernement des îles Aaland (Finlande) auquel appartient l’épave et son contenu.

Seules deux bouteilles de cette pêche miraculeuse ont déjà été vendues, en juin dernier, pour un total de plus de 50 000 euros. Le 8 juin, onze autres seront mises aux enchères à 10 000 euros pièce sur l’archipel d’Aaland par la maison française Artcurial, retenue à l’issue d’un appel d’offres international, au profit de la sauvegarde de l’environnement et de l’archéologie marine.

Goût sucré pour les Russes

Six de ces bouteilles proviennent de la maison châlonnaise Juglar, de belle réputation à l’époque mais depuis disparue, quatre sont des Veuve Clicquot élaborées du vivant de « madame » Clicquot, première femme à avoir dirigé une maison de champagne, la dernière est un flacon de Heidsieck.

Après cette vente, « les autres bouteilles seront soit vendues au fil des années, soit dégustées », affirme Lina Dumas. Quand les plongeurs ont remonté la première bouteille à la surface, ils ont eu la surprise de voir sauter le bouchon. Du champagne ! Pour découvrir sa provenance, il a fallu observer la marque à feu imprimée sur la base du bouchon. A l’époque, les étiquettes n’existaient pas.

Pour dater le naufrage de la goélette, dont le nom et l’itinéraire restent un mystère, Fabienne Moreau a retrouvé un modèle de marque, sur les bouteilles Veuve Clicquot de la cargaison, qui a été créé en 1841. Impossible donc que le navire ait coulé avant.

Des traces de ces ficelles, qui étaient utilisées pour fixer le bouchon, sont également visibles. Or, cette pratique disparaît dès 1850 lorsque la maison Jacquesson met au point un système de fil de fer torsadé pour remplacer le chanvre, explique-t-elle.

A 50 mètres de fond, le champagne a été conservé « dans des conditions idéales », fait-elle valoir : « obscurité, calme et une pression de cinq bars, identique à celle à l’intérieur des bouteilles ».

Le vin pétillant, très sucré, était sans doute destiné à des consommateurs russes, note l’historienne. « Aujourd’hui il est fondu » et équilibré par une belle acidité, selon elle.

Laurie Matheson, experte en vin chez Artcurial, espère que les futurs acheteurs ne se contenteront pas d’exposer leurs bouteilles « sur une cheminée ». L’acheteur l’an dernier des deux premières bouteilles de ce trésor rare était un restaurateur français installé à Singapour, marié à une Russe, qui les destinait à leur anniversaire de mariage, souligne-t-elle avec plaisir.

Gersende RAMBOURG