Accueil Au Château de Cérons, un étonnant vin orange bordelais

Auteur

Audrey
Marret

Date

10.11.2020

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C’est une première à Cérons, la petite appellation de vins liquoreux enclavée dans les Graves, dans le vignoble Bordelais. Caroline et Xavier Perromat, au Château de Cérons, lancent une cuvée inédite de vin orange, un vin blanc de macération pelliculaire.

Avant même sa commercialisation, prévue en début d’année 2021, Coucher de Soleil (c’est son nom) a déjà le don de soulever l’enthousiasme : conçue entre les deux confinements, la cuvée s’est avérée être au domaine un formidable antidote contre l’incertitude actuelle, une initiative à l’énergie radieuse dans la grisaille ambiante.
Décidé trois jours avant les vendanges de fin août, le projet a galvanisé toute l’équipe du château autour d’une idée : exprimer une nouvelle facette du terroir, sans se fourvoyer dans un concept marketing sans lendemain. Domaine familial de 30 hectares repris en 2012 par Caroline et Xavier Perromat, le Château de Cérons produit déjà des vins liquoreux sous appellation Cérons et des vins rouges et blancs secs sous appellation Graves. « Nous ne voulions surtout pas faire un vin que l’on dit à la mode, détaille Caroline Perromat. Nous voulions vraiment revisiter notre terroir, avec une nouvelle technique de vinification. Et nous avons été surpris des arômes et des tanins découverts. »

Surprenante amertume

Récoltés à la main sur deux parcelles (environ 50 ares pour une première production de moins de 1000 bouteilles), sauvignons blancs et sauvignons gris ont ensuite été encuvés avec leur peau, pour fermenter comme un vin rouge. « L’extraction n’a pas été aussi poussée qu’un vin rouge », tempère Loïc Biais, recruté cette année au chai y pour réaliser son premier millésime. A peine un pigeage par jour pour enfoncer le chapeau de marc à l’aide d’un grand pilon en bois, fabriqué sur-mesure par Xavier Perromat. Entre expérimentation délicate et recherche de précision, « nous y sommes allés du bout des doigts », explique Caroline Perromat, pour mener à bien une longue macération de plusieurs semaines avec des pics d’amertume surprenants, complète Loïc Biais.

Très rare dans le vignoble bordelais, l’idée de ce vin orange, soufflée par l’œnologue conseil Julien Belle, a demandé plusieurs recherches et dégustations. Caroline Perromat a notamment puisé des références dans la cave à vins du monde de la Cité du Vin, à Bordeaux. Loin de la rusticité parfois rencontrée dans les échantillons ramenés, c’est vers un profil racé et raffiné que veut tendre ce Coucher de Soleil. « Nous n’avons pas voulu reprendre le côté oxydatif comme en Géorgie, poursuit Loïc Biais. Nous avons choisi de préserver les arômes et la fraîcheur. » « Notre vin orange est un vin de lieu qui fait vraiment le lien entre les liquoreux du domaine, les blancs et les rouges, confirme Caroline Perromat. On y retrouve l’amertume de Cérons, le côté pamplemousse et agrume des sauvignons. »

A première vue, la robe d’un jaune clair brillant ressemble à celle d’un vin blanc sec. Mais l’effet de surprise est immédiat au palais, saisi par des arômes d’écorce d’orange et de noix aux notes fumées, avec une finale saline très fraîche évoquant l’eucalyptus. L’ensemble est très droit, cristallin, tout en verticalité, avec une amertume d’orange incroyablement rémanente. « Tout est à créer au niveau des accords mets et vin », s’enthousiasme Xavier Perromat. Coup d’éclat du millésime 2020, ce Coucher de Soleil, vin de France, sera d’abord confié à des sommeliers et chefs qui sauront le faire rayonner sur leur carte. Le Château de Cérons lance un appel aux audacieux.