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Crus Bourgeois : le Haut-Médoc en force

Ci-dessus : Château Arnauld, Cru Bourgeois Exceptionnel (Haut-Médoc)

Auteur

Michel
Sarrazin

Date

20.02.2020

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Si l’on regarde dans le détail le nouveau classement des Crus Bourgeois publié ce 20 février 2020, on remarquera la forte proportion de châteaux classés en appellation Médoc et Haut-Médoc. Que sont ces appellations et pourquoi sont-elles fortement représentées dans le classement ?

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L’appellation Haut-Médoc est sans doute la plus difficile à cerner. Comme son nom pourrait le suggérer, elle n’est pas située en haut de la carte (au nord du Médoc) mais occupe plutôt la partie sud du Médoc, entre Blanquefort (tout proche de Bordeaux) et Saint-Seurin-de-Cadourne qui est sa limite nord. Haut-Médoc voulant dire celui qui a la plus haute altitude en suivant le cours du fleuve. Cette appellation circule sur une longue bande terre, le long de la Garonne et de l’estuaire de la Gironde et est entrecoupée par plusieurs appellations prestigieuses qui occupent les plus belles « croupes » de graves garonnaises, celles-ci faisant la réputation des meilleurs crus. Du sud au nord, le long ou enclavées dans cette bande du Haut Médoc, on trouvera tout d’abord Margaux puis Moulis, Listrac, Saint Julien, Pauillac puis Saint-Estèphe. On dira que le Haut-Médoc c’est tout le territoire qui n’est pas l’une de ces 6 appellations. Au-delà au nord, on trouve l’appellation Médoc.
L’appellation Médoc, elle, est la partie viticole située le plus au nord du Médoc. Elle reste assez homogène quant à ses contours et n’a pas tout à fait la même géologie que le Haut Médoc.

La forte représentation du Haut-Médoc

Le nouveau classement des Crus Bourgeois montre forte représentation des Médoc et Haut-Médoc avec une importante proportion de vins en appellation Haut-Médoc lorsqu’on monte dans la hiérarchie (Cru Bourgeois Supérieur puis Cru Bourgeois Exceptionnel).

En outre, si l’on compare le pourcentage de châteaux classés par appellation au pourcentage de surface que ces appellations représentent, les Médoc et Haut-Médoc sont très représentés.
Cette progression du Médoc et Haut-Médoc est confirmés si l’on compare les classements de 2003 et 2020 (bien qu’annulé, le classement de 2003 donne tout de même quelques indications utiles – celui de 1932 est difficile à lire en ce qui concerne les appellations).

Plusieurs explications possibles…

Tout d’abord il convient de considérer que les crus classés sont tous situés sur des appellations communales prestigieuses qui consacrent beaucoup de leur surface à ces crus classés. Cela laisse « moins de place aux crus bourgeois ». Ces crus classés occupent généralement les meilleures coupes de graves.
Seuls cinq crus classés sont en appellation Haut-Médoc sur les 60 que compte le classement de 1855 en Médoc. Il n’existe aucun grand cru classé en appellation Médoc. Cette situation tend à confirmer que les terres du Haut-Médoc sont sans doute de façon générale, « plus qualitatives » que celles du Médoc, ce que n’hésite pas à affirmer un propriétaire.

A cela une explication : l’histoire de la formation de ces sols, assez récente à l’échelle de la Terre, est presque identique entre le Haut-Médoc et le Médoc. Et c’est bien le presque qui fait toute la nuance. Il y a deux millions d’années, faisant suite aux mouvements tectoniques dus à la surrection des Pyrénées, le sud de l’Aquitaine se soulève et le Nord s’affaisse. La Garonne répand alors des nappes d’alluvions caillouteuses arrachés aux montagnes, sur le Bordelais et notamment en Médoc. Le nord de l’estuaire étant plus bas et proche de la mer, cet épandage ne s’est pas fait de manière homogène : on trouvera les plus belles épaisseurs de graves entre Pauillac et Margaux et… en appellation Haut-Médoc, pour celles qui ne portent pas les vignes des châteaux classés en 1855. Ces « croupes » garonnaises (« appellation traditionnelle médocaine désignant ces collines aux courbes très douces, formées de larges nappes d’alluvions déposées au quaternaire par la Garonne » nous dit le château Malescasse), ces croupes de graves donc, sont plus favorables au cabernet sauvignon, « le cépage roi » médocain. Dans l’appellation Médoc, les terrains sont en général plus plats, et les sols sont souvent argilo-calcaire ou argilo-sableux, plus propices au merlot, même si, de-ci de-là, on trouvera quelques croupes de graves mais souvent moins épaisses.
On ajoutera que les sols caillouteux accumulent et réfléchissent mieux la chaleur : c’est un facteur favorable à la maturation du raisin et à sa concentration.
Enfin, sur ces terrains graveleux, le drainage est quasi naturel également, provoquant un léger stress hydrique bienfaiteur pour le développement de la vigne.

Quel est le terroir des châteaux du Haut-Médoc classés Cru Bourgeois Exceptionnels ?

Les vignes du château Arnauld sont sur une croupe « gravelo-argileuse, un sol caillouteux constitués de graves venues des Pyrénées et du Massif central ». Idem pour Belle-Vue.
Agassac, quant à lui, a un vignoble « réparti entre deux croupes graveleuses et une zone de graves sableuses ». Pour Cambon la Pelouse (vainqueur de la coupe des crus bourgeois 2019), « le sol est composé de grosses graves maigres et sableuses ».
Pour Charmail les sols sont « constitués de graves argileuses, sableuses et de colluvions ».
Les vignes du château Malescasse sont sur « ces fameuses croupes graveleuses, composées de sables, de graviers et d’argile en proportions variables ». Malleret est « sur un sol de graves, de sables, d’argile et de calcaire ». On n’oublie pas bien sûr le magnifique terroir du château du Taillan, où la propriétaire Armelle Cruse accomplit un remarquable travail.
Le dénominateur commun de tous ces sols est… la grave : indispensable à la qualité du vin.

8 châteaux de l’appellation Haut-Médoc font leur entrée dans les Crus Bourgeois Exceptionnels sur les 14, et 25 en Crus Bourgeois Supérieur sur les 56. Une évolution marquante due au travail des équipes qui ont su valoriser un terroir à fort potentiel.

https://www.crus-bourgeois.com/classement-2020/