Dimanche 13 Octobre 2024
(photo : Michaël Boudot)
Auteur
Date
01.12.2020
Partager
Ce qui fait la force des vignobles français, et qu’aucun vin du Nouveau Monde, de si bonne qualité soit-il, ne pourra jamais leur ravir, c’est leur histoire. Cette prise de conscience a gagné le Médoc, où la découverte des vignobles s’accompagne désormais d’une plongée au cœur du patrimoine architectural des fameux « châteaux ». Un voyage dans le temps en 6 étapes, extrait de notre hors-série Crus Bourgeois.
Épisode 2 : Château Castera
Un vin de cape et d’épée
Si la seigneurie de Castera remonte à l’an 900, les éléments les plus anciens de la bâtisse, la tour et le mur d’enceinte, datent de la guerre de Cent Ans, pendant laquelle la forteresse jouera un rôle stratégique. À l’époque, les Anglais, très amateurs des vins de la région, n’entendent pas lâcher facilement le pays. En 1355, le château est pris d’assaut par le Prince Noir. En 1409, Castera, déjà entouré d’un beau vignoble, est confisqué par une charte spéciale du roi d’Angleterre, à la suite de quoi, pendant près d’un siècle, la famille d’Arsac devra multiplier les procès pour récupérer ses droits.
Au XVIe siècle, le domaine connaît d’illustres propriétaires : le poète Étienne de La Boétie, puis le frère de son ami Michel de Montaigne, Thomas. Au XVIIIe siècle, ce sont les Verthamon, des parlementaires bordelais, qui décident de faire de Castera le centre de vinification des différents châteaux qu’ils possèdent dans le nord du Médoc, dont celui de Loudenne. Ils font aménager un chai et un cuvier d’une étonnante modernité. Adossé aux anciennes douves, il est à moitié enterré et on peut y faire tomber les raisins dans les cuves directement par les fenêtres.
En 1986, deux Allemands, Carl E. Press (père de l’actuel propriétaire, Thomas Press) et Dieter Tondera, tombent amoureux de Castera, qu’ils rachètent à Alexis Lichine. Il leur faudra trente ans pour le rénover. Et pour cause, ils ne se sont appuyés sur aucune subvention. « Les Bâtiments de France nous ont sollicités, mais nous souhaitions conserver notre liberté », confie le directeur du château, Jean-Pierre Darmuzey. Ce qui n’a pas empêché de travailler dans les règles de l’art. Ainsi, la toiture de la tour a été posée par les Compagnons. Elle abrite des trésors d’archives, en particulier un acte de vente de vins de 1616 ! D’autres documents très anciens demeurent encore à la tour de Londres.
Le domaine ne manque pas d’imagination pour faire vivre ce patrimoine : conférences littéraires (la première, intitulée « La table de Montaigne », explorait la gastronomie du XVIe siècle), concerts de rock, escape games…
Visite du château le samedi sur rendez-vous 10 €. Escape game 15 €.
Château Castera – 33340 Saint-Germain-d’Esteuil
05 56 73 20 60 – Site internet
Articles liés