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Laurent Cavaillé veut un jeu collectif pour les Vins de Savoie

Auteur

Frédérique
Hermine

Date

22.06.2021

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Laurent Cavaillé entend offrir à la présidence des Vins de Savoie un jeu collectif et dynamique. Déjà vice-président de l’interprofession, il succède désormais à Pierre Viallet dans le cadre de l’alternance. A 53 ans, le PDG de la maison éponyme d’Aix-les-Bains, représentant du négoce, inaugure son mandat de trois ans avec une campagne de grande ampleur.

Laurent Cavaillé connaît déjà bien l’interprofession puisqu’il en était déjà le vice-président depuis trois ans aux côtés de Pierre Viallet. Ce dynamique dirigeant, négociant-éleveur et bientôt producteur, a intégré l’affaire familiale en 1995 ; il y a créé La Cave, lieu de vente de vins principalement savoyards mais également d’autres contrées pour particuliers et professionnels. Ce sportif souriant, cycliste et rugbyman (il est président du FCAix Rugby) qui sait rassembler et fédérer, est aussi membre du conseil d’administration du Medef et du Casino d’Aix-les-Bains. Nous avons interrogé le président fraîchement élu.

Quel état des lieux faites-vous aujourd’hui des vins de Savoie ?
Nous restons hélas encore trop des vins de saison et quand la saison ne démarre pas comme cet hiver, on se rend compte à quel point nous sommes tributaires de la Savoie et des montagnes environnantes. Il faut essayer de sortir de ce carcan nos vins qui n’ont plus à rougir, des vins plaisir à consommer tous les jours et qui peuvent très bien être proposés pour les apéros et dans les bars à vins de toute la France. Nous avons donc signé avec une nouvelle agence, Clair de Lune, pour travailler sur notre image et séduire les jeunes en milieu urbain avec une communication plus incisive, urbaine et moderne et via un magazine grand public tiré à 100 000 exemplaires. Nos vins restent encore trop sur une image de blancs fruités et gourmands mais les consommateurs connaissent surtout sur l’apremont. Il est vrai que c’est le plus grand cru et qu’il tire les autres blancs mais en GD, il accapare 70 à 80% de la demande. Chez les cavistes et les étoilés, on trouve aussi quelques chignin bergeron et des jongleurs en cru Maretel mais on ne connaît pas assez les mondeuses en rouges qui ont pourtant une vraie identité savoyarde.

Le changement d’image passera par quels outils ?
D’abord en incitant les prescripteurs du CHR à venir goûter ou regoûter nos vins lors de soirées qui seront organisées en Savoie mais aussi à Paris et à Lyon car il y a peu de références sur les cartes lyonnaises. Nous allons aussi rencontrer des sommeliers, dans des bars lounge et des établissements branchés pour ne plus être cantonné à la raclette-tartiflette. Nous devions organiser une grande soirée de dégustation pour les restaurateurs au bord du lac d’Annecy, annulée pendant la crise sanitaire mais ce n’est que partie remise. Il y a moins de souci en revanche chez les cavistes qui jouent leur rôle de prescripteur et prennent souvent le temps de trouver un abymes ou un bergeron. Il faut juste susciter l’impulsion car lorsque les clients achètent une première fois, ils reviennent et les cavistes ont de bons retours. Nous allons lancer également une grande campagne d’affichage avec, comme slogan, la Savoie A(l)titude, en 4X3 à Paris, Lyon et dans les grandes villes savoyardes et un food truck va sillonner la région cet été pour faire découvrir les vins locaux en partenariat avec les fromages. Des journées d’animation sont également prévues en supermarchés. C’est la première campagne de cette ampleur, aidée par la Région.

Quel bilan tirez-vous de la crise Covid ?
Évidemment, nous avons un peu de stocks même si la période de gel qui va générer un petit millésime 2021 va sans doute permettre de les écouler. Les vins de Savoie ont plutôt bien marché en GD et chez les cavistes mais il faut s’attacher à diversifier les marchés. L’export est passé de 2 â 6% avec une présence accrue aux Etats-Unis, surtout sur New York et la Pennsylvanie, au Japon, au Benelux, dans les pays scandinaves et en Grande Bretagne qui commence à repartir mais nous aimerions atteindre les 15% d’ici trois ans.

Comment a évolué le vignoble ces dernières années ? Y a -t-il des conversions en bio, un renouvellement de génération ?

Le bio et la biodynamie sont une vraie tendance et nous surfons aussi sur cette vague, surtout en Chignin Bergeron et en Maretel mais il n’y en a pas encore en Apremont (le domaine Dupraz est en conversion pour 2022). Nous n’avons que 10% des volumes et 12% des surfaces en bio et en conversion, soit 256 hectares, et nous voudrions atteindre 35% d’ici dix ans. Ce n’est pas plus compliqué qu’ailleurs; ici, le vrai challenge, ce sont les fortes pentes qui nécessitent un gros travail humain. Mais cela ne semble pas décourager les jeunes. Nous avons constaté surtout depuis 2-3 ans qu’il y avait beaucoup de rachats et de reprises par les jeunes, ce qui donne un nouvel élan et un dynamisme au vignoble. Quand une exploitation est vendue, elle est souvent reprise par un voisin et les exploitations s’agrandissent et deviennent plus rentables. Aujourd’hui les jeunes peuvent vivre décemment de la vigne et il n’y en a quasiment plus en double activité.

La Maison de la Vigne et du Vin qui a brûlé en janvier 2017 va-t-elle enfin être reconstruite ?
La reconstruction a démarré et elle devrait être livrée au premier trimestre 2022. Elle est reconstruite quasiment à la identique et au même endroit dans la combe de Savoie à Apremont comme nous l’imposait le cahier des charges signé à l’époque. Nous aurions pourtant bien aimé la rapprocher d’un axe plus passant comme la route qui monte sur Bourg Saint Maurice et qui voit passer chaque année des millions de touristes ou près d’une sortie d’autoroute où nous aurions pu y rajouter une œnothèque.

D’autres projets prévus pour ce nouveau mandat ?
Nous allons travaillé avec l’ODG à augmenter la lisibilité de nos vins et nous allons discuter avec tout le monde pour voir si il n’est pas possible de rationaliser les crus car ils sont trop nombreux et le consommateur s’y perd. Après discussions avec tous les présidents, peut-être pourrons nous envisager d’en regrouper certains. Il faudrait aussi plus communiquer global sur les vins de Savoie sans perdre l’identité de chaque cru car avant de vendre de l’apremont, on vend des Vins de Savoie.