Mardi 15 Octobre 2024
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20.06.2020
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C’est l’histoire d’un Japonais venu s’installer à Pauillac en 2015. Depuis, Osamu Uchida ne cesse de se faire remarquer sur les plateformes des dénicheurs de pépites. Car, si le domaine est petit, les vins sont très grands.
Il faut d’abord imaginer un adolescent du côté d’Hiroshima qui court derrière un scooter. Un cordon les relie pour qu’Osamu coure le plus vite et le plus longtemps possible. Le jeune homme excelle en course d’endurance – surtout le 3000 et 5000 mètres – et son coach qui pilote le deux-roues entend bien en faire un champion. Après les entrainements, le sportif traine son corps chez ses parents qui tiennent une épicerie avec un coin cave. Il rend aussi souvent visite à ses grands-parents qui évoquent une terrible catastrophe survenue le 6 août 1945. Mais Hiroshima mon amour ne dure qu’un temps, Osamu Uchida, né en 1977, rêve de nouveaux horizons.
Il atterrit d’abord à Tokyo où il est livreur de nuit. Dans cette ville-fourmilière, il fait la connaissance d’un compatriote fou de vins allemands. Et, en dégustant, Osamu fait un rêve : « J’avais fait un petit voyage en Europe lorsque j’étais au lycée et là je me dis qu’il faut vraiment que j’y retourne pour travailler dans le vin, c’est la France qui m’attire, l’Allemagne est trop sérieuse, elle me rappelle le Japon, l’Italie est trop dilettante, alors je me mets à apprendre le français et à économiser ». En 1999, Osamu a l’équivalent de 10 000 euros dans sa cassette. Il part. Son choix s’arrête sur Bordeaux et c’est d’abord un choc culturel. Son français est médiocre et il se fait arnaquer en louant un appart du côté de la Place de la Victoire. You’re welcome ! N’empêche, il enchaine la visite de plus de 300 domaines viticoles, de Bordeaux à Banyuls en passant par la Côte-Rôtie. Il court, hume, crache, note.
60 ares à Cussac
En 2001, avec des parents qui rallongent en fins de mois, il s’inscrit pour faire un bac viti-œno. Il devient plus à l’aise avec la langue de Molière et ses stages à Banyuls, Rivesaltes et en Savoie se déroulent à merveille. Il enchaine avec le DUAD pour de nouveaux stages pratiques au Domaine de Chevalier et au Château Larrivet Haut-Brion. « A la sortie en 2006, il faut que je bosse et je trouve un job au Japon en tant qu’importateur de vins même si dans ma tête je voulais devenir vigneron avec une prédilection pour les vins natures », confie Osuma.
En 2010, il revient dans la région bordelaise pour devenir guide touristique – ce qu’il fait toujours. Il fait aussi quelques vinifs à Banyuls et dans les vins du Haut-Poitou, chez Ampelidae. Une occasion se présente dans la commune de Cussac où 60 ares sont à vendre en appellation Haut-Médoc. Il se lance et loue une bicoque à Pauillac pour élaborer son vin. Il travaille désormais deux hectares avec une conversion en bio et en biodynamie. « Mes références sont le Clos du Jaugueyron ou Les Closeries des Moussis » dit-il. On le comprend aisément et sa cuvée de cabernet sauvignon est à la hauteur de ses modèles. Dernièrement, un haut responsable du groupe japonais Suntory (le groupe possède le Château Lagrange et en partie Beychevelle) est venu lui rendre une petite visite, comme une petite reconnaissance… Les 4 à 5000 bouteilles d’Osuma Uchida défrayent de plus en plus la chronique. En bon lecteur de Mishima, l’intéressé reste serein et s’applique même à ses heures perdues à produire une sauce soja bio. Uchida ne court plus derrière un scooter mais à la remorque du bonheur. Kōun o !
Le commentaire de Terre de Vins :
On prend la mesure de la signature d’Osamu Uchida sur le 2018 (45 euros) avec avant tout un travail sur l’architecture, pensée en dentelle pour un touché tannique sur le velours. Les arômes de mûres, de café et de cuir dansent sur cette plateforme. C’est chirurgical.
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