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Que se passe-t-il dans un groupement foncier viticole ?

Ci-dessus : Ludovic Lauzier, de Bacchus Conseil, Dominique et Romain Haverlan

Auteur

Audrey
Marret

Date

10.09.2019

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Le placement dans les groupements fonciers viticole (GFV) a le vent en poupe. Comment sont impliqués les associés investisseurs ? Au château La Prade, en appellation Pessac-Léognan, c’est le plaisir du vin et de se retrouver qui les réunit d’abord.

Organisée le dimanche 8 septembre à Portets, dans le vignoble bordelais des Graves, l’assemblée générale du groupement foncier viticole du château La Prade a réuni près de quatre-vingt personnes venues de toute la France. Classiquement, la réunion débute par le bilan et les prévisions pour la saison 2019. Le public est attentif. Et avant de passer au vote des résolutions, il se permet toutes les questions : impact du réchauffement climatique sur le millésime, technique de greffage ou crise des ventes pour les vins rouges de Bordeaux.

Investir dans du concret

C’est la particularité des groupements fonciers viticoles (GFV). Chaque GFV est une société civile créée pour acheter des terres agricoles, en l’occurrence des vignes. Le capital du GFV est divisé en parts que peuvent acquérir les particuliers. En prenant une ou plusieurs parts, les investisseurs deviennent ainsi indirectement propriétaires d’un vignoble. Et les associés du château La Prade se montrent autant intéressés par les résultats financiers que par la vie de la propriété. « Ici on investit dans du concret. On mise sur des gens que l’on connaît, qui font de la belle ouvrage et qui ne disparaissent pas du jour au lendemain comme les fonds de pension », témoigne un associé.

L’assemblée générale est rondement menée, une heure environ, pour faire place à un apéritif avec dégustation de plusieurs vins et un déjeuner tout aussi convivial au Vieux Château Gaubert. Car c’est Dominique Haverlan, à la tête de plusieurs propriétés dans les Graves, (Vieux Château Gaubert, château de la Brède ou encore château Haut-Pommarède) qui exploite le château La Prade, en appellation Pessac-Léognan. « 70% de mes vignes sont en fermage, explique le viticulteur. Je suis un adepte du statut de locataire. C’est un choix important pour assurer la transmission des exploitations dans de bonnes conditions ».

Dotation en bouteilles

Le GFV fait figure de contrat gagnant-gagnant entre les associés investisseurs et le viticulteur. D’un côté, le viticulteur se dégage des problèmes du coût du foncier et bénéficie d’un bail renouvelable à long terme (9 ou 25 ans) pour se concentrer sur la conduite du vignoble et son outil de production. De l’autre, les associés récupèrent chaque année des rendements en argent comptant ou en dotation de bouteilles de vin. Le rendement des GFV varie généralement entre 1,5 à 4,5%, estime la société Bacchus Conseil, qui réalisé le montage pour le château La Prade.

La majorité des associés -quelque 120 pour le château La Prade- choisissent les bouteilles de vin. « Prendre des parts dans un groupement foncier viticole c’est investir dans un produit de convivialité et d’œnotourisme », assure Jean-Claude Chasson. Le fondateur de Bacchus Conseil va même jusqu’à parler de placement « éco-solidaire » en soutien aux vignerons, face à la montée des prix du foncier viticole (500 000 euros l’hectare en Pessac-Léognan, selon Dominique Haverlan).

Ludovic Lauzier, directeur de Bacchus Conseil, note une demande plus forte des particuliers devant la perte de vitesse des autres produits financiers, en particulier les assurances-vie. « Investissement plaisir », le GFV bénéficie en plus d’avantages fiscaux renforcés en début d’année : exonérations partielles et sous conditions d’impôt sur la fortune immobilière et de droits de succession et de donation.

« On se fait des amis que l’on revoit »

Pour l’heure, à Portets, c’est le plaisir de déguster le travail mené au château qui prime. Amateurs, passionnés ou néophytes amoureux du bon vin, les associés se retrouvent tout sourire pour une photo de groupe puis autour d’un verre dans les chais du Vieux Château Gaubert. Damien et Julie en ont profité pour visiter la région. Le jeune couple venu de Moselle a été séduit par le ticket d’entrée « accessible » à leur budget (entre 3000 et 6000 euros la part dans un GFV, selon l’appellation). Sébastien, 45 ans, a déjà investi dans deux autres GFV en Châteauneuf-du-Pape. « J’avais vu une annonce dans un magazine. Au début j’y allé sans savoir où je mettais les pieds », dit cet ingénieur de la région parisienne, conquis par la convivialité des réunions.

« En plus de découvrir de nouveaux vins, on se fait des amis que l’on revoit », racontent Chantal et Emil, qui possèdent des parts en Champagne et à Saint-Emilion. Le bouche-à-oreille est primordial, aussi bien pour consolider le marché secondaire, où se revendent et se rachètent les parts, que pour assurer la publicité des vins. « Les associés sont autant d’ambassadeurs qui font la promotion du vin, explique Ludovic Lauzier. On espère bien qu’ils vont en parler à leurs amis ! »