Lundi 6 Octobre 2025
Tony Laithwaite et Jean-Marc Sauboua. ©DR
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06.10.2025
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L’histoire commence de manière banale avec un Anglais qui tombe amoureux de la France. La suite en revanche touche au sublime. Tony Laithwaite reste dans les Côtes de Castillon et conquiert le monde du vin. Success story, en français dans la suite du texte.
En ces vendanges 2025, Tony Laithwaite, qui marche sur sa quatre-vingtième année, est venu d’Angleterre pour inspecter sa récolte du château La Clarière. Il déambule, comme chez lui, sur ces magnifiques terroirs de Castillon. Le millésime se présente bien, quant au déclin de la conjoncture, Tony Laithwaite l’envisage avec la philosophie qui le caractérise.
« Ce n’est pas la fin du monde, du moins pour ce qui concerne le vin. La crise est réelle, il faut s’adapter, se remettre en cause, avancer », prévient celui qui avoue devoir tout à ces Côtes de Castillon. La folle histoire commence au milieu des années 1960, un jeune homme épris de géographie rêve de s’extraire de la brume du nord de l’Angleterre pour venir tâter les vieilles pierres de France.
Il atterrit du côté de Castillon où une célèbre bataille a bouté les Anglais hors du royaume. Il découvre le vin grâce à Jean Cassin, le directeur charismatique de la cave de Puisseguin : « Ce fut mon deuxième père, mon père français, il m’a fait aimer le vin et comprendre que les terroirs de Castillon sont les mêmes que les meilleurs de Saint-Émilion, les découpages d’appellation sont politiques, le curé de Saint-Émilion ne voulait sans doute pas des vignerons qui allaient à la messe à Castillon… »
Suite à cet apprentissage, le jeune Tony se décide à vendre du vin en Angleterre. Il achète une camionnette et l’aventure commence. Il crée Direct Wines, basé à Sainte-Colombe, et sympathise avec le journaliste Hugh Johnson qui préside le Wine Club du Sunday Times. Direct Wines prend alors la gestion de ce club, le premier d’une longue liste : pour ne citer qu’eux, celui de British Airways, du Wall Street Journal, de Virgin, etc. La boîte compte aujourd’hui autour de 900 salariés dans le monde entier, Tony et Barbara rejoints par leurs trois enfants, Henry, Will et Tom : « Dès le départ, je voulais être indépendant et l’argent n’a jamais été un moteur, je voulais être heureux dans ce que je fais, rendre mes amis, mes employés et surtout mes clients heureux, les gens les plus heureux que j’ai rencontrés dans ma vie n’étaient pas riches. »
Dans sa quête du bonheur, Tony Laithwaite a aussi voulu son propre vignoble, là où tout a commencé. Les premiers achats de vignes s’opèrent au début des années 80, au lieu-dit La Clarière. 5 hectares ! Les bouteilles sont naturellement commercialisées par Direct Wines et l’Anglais montre par A + B, dégustations à l’aveugle obligent, que son vin vaut celui des meilleurs Saint-Émilion.
Le Château La Clarière pèse aujourd’hui 50 hectares de merlot, de cabernet franc, de cabernet sauvignon, de sauvignon blanc et de sauvignon gris et les vins s’arrachent. La partie technique est l’œuvre de son bras droit Jean-Marc Sauboua qui rejoint les Laithwaite en 1993. « C’est une histoire dingue, avec Tony une idée pousse l’autre, il a le sens du commerce et la science de la remise en cause permanente, avec le temps, notre style de vin a évolué car nous sommes à l’écoute de nos clients, l’extraction est plus légère qu’avant, l’élevage est moins marqué, La Clarière est un grand vin accessible, lorsque nous commençons les vendanges, le millésime est déjà vendu… », explique l’œnologue qui chapeaute l’élaboration des vins de Tony dans le monde entier, de l’Afrique-du-Sud à La Clarière, du Languedoc à l’Argentine.
Outre la cuvée classique, le château castillonnais élabore un vin ermitagé, La Chimère, avec des lots de la vallée du Rhône méridionale ainsi qu’une cuvée de blanc. Aujourd’hui, la pépite de Castillon a rejoint l’association Castillon Caractères où l’on retrouve le Domaine de l’A de Stéphane Derenoncourt, Ampélia de François Despagne ou encore le Château Le Rey de Jean-Christophe Meyrou et Peter Kwok. Du beau monde, autant de locomotives bordelaises.
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