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[Grande dégustation Primeurs] Master class exclusive La Mission Haut-Brion et Quintus

Auteur

Laura
Bernaulte

Date

05.05.2023

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Hier soir, au Palais de la Bourse de Bordeaux, en marge de la dégustation du millésime 2022 et d’un millésime livrable d’une trentaine de propriétés bordelaises orchestrée par Terre de Vins et La Grande Cave, une poignée d’heureux participants ont pu déguster cinq vins de la galaxie Domaine Clarence Dillon, dont trois 2022 et deux millésimes livrables. Récit comme si vous y étiez.

Châteaux Quintus, La Mission Haut-Brion et La Chapelle de La Mission Haut-Brion 2022, Château Quintus 2016 et Château La Mission Haut-Brion 2006. « On a beaucoup de chance de découvrir les cinq crus qui vous sont servis ce soir », constatait hier en ouverture de cette master class de haut-vol son animateur, Rodolphe Wartel, le directeur de Terre de Vins. A ses côtés, le directeur commercial de Domaine Clarence Dillon, Guillaume-Alexandre Marx confirmait l’exceptionnel de ce moment, rappelant que la dégustation du Château La Mission Haut-Brion en Primeur à des clients particuliers était « une grande première ». Pour compléter ce plateau d’animation de haut-vol, étaient également présents le tout nouveau président de l’Union de la Sommellerie Française et Meilleur Ouvrier de France, Fabrice Sommier, et Frédéric Castéja, directeur général de la maison de négoce Borie Manoux et du site internet La Grande Cave dédié.

Dans la galaxie Domaine Clarence
Situé à Talence, La Mission Haut-Brion est l’un des rares domaines bordelais urbains. Faisant face à son illustre frère pessacais Haut-Brion (dans l’escarcelle de la famille Dillon depuis 1935), ce domaine a quant à lui été acquis par les Dillon en 1983 et compte depuis le départ une surface inchangée de 25 hectares. Bien que non-intégré dans le classement de 1855, ce cru classé de Graves n’en demeure pas moins très prestigieux, « doté du même niveau de qualité qu’Haut-Brion, mais avec une personnalité différente, explique Guillaume-Alexandre Marx. C’est d’ailleurs le seul vin avec Petrus à avoir obtenu la note de 100 par le Wine Advocate », rappelle-t-il. Rien que ça. Depuis 1988, les nectars de ces deux domaines sont créés sous la houlette d’un trio expert emmené par Jean-Philippe Delmas, dont le grand-père et le père avant lui veillaient déjà sur la destinée de Haut-Brion.

En 2011, la famille Dillon a également posé ses valises à Saint-Emilion, au Château Quintus, avec l’ambition d’exploiter « ce beau terroir sur le plateau calcaire et argilo-calcaire pour l’emmener au même niveau qu’Haut-Brion et La Mission Haut-Brion ». Et ce, « afin d’en faire l’un des plus grands vins de la Saint-Emilion et de la rive droite rivalisant avec Angélus, Petrus ou Ausone », explique le directeur commercial. Atypique pour l’appellation, ce vignoble situé sur une colline aux vignes à 360° affiche une surface de 45 ha, « là où la moyenne locale tourne autour de huit hectares », et est mené « dans une esprit bourguignon plus que bordelais. »

2022 en trio
« 2022 est hors normes, rappelle Frédéric Castéja. Sur l’ensemble de Bordeaux, pour l’instant, on n’a jamais vu ça, c’est un grand millésime à la buvablité rapide mais qui pourra aussi être conservé pendant 50-60 ans. »

Premier vin en dégustation pour débuter cette approche du millésime 2022 : La Chapelle de La Mission Haut-Brion, second vin du domaine né de l’approche parcellaire. « Chaque parcelle intègre une cuve, la dégustation déterminant ensuite quelle cuvée chacune constituera », détaille Guillaume-Alexandre Marx. La meilleure cuve sera ainsi affectée à La Mission Haut-Brion, suivie par La Chapelle, les 3e et 4e niveaux vendus à une structure de négoce possédée par le Domaine Clarence Dillon pour confectionner le vin de marque Clarendelle. Sur ce 2022, assemblage à  56 % de merlot, 35 % de cabernet sauvignon et 9 % de cabernet franc, « on cherche la même identité que pour le premier vin, mais sans le volume, la puissance et la longueur », décrit le directeur commercial. Et ce, « pour proposer un point d’entrée dans l’univers du grand vin. » Fabrice Sommier voit d’ores-et-déjà tout le potentiel de ce vin nouveau-né, doté d’un « nez sur un très beau fruit croquant, réglissé, presque sur l’amande, avec des tanins présents en bouche, mais dont la petite touche d’amers permettra beaux accords. La promesse d’une belle complexité », assure-t-il.

Après cette mise en bouche, cap sur le grand vin du domaine, Château La Mission Haut-Brion 2022, assemblage à 45 % de merlot, 45 % de cabernet sauvignon et 10 % de cabernet franc. « Pour réussir ce millésime chaud et sec, il ne fallait rien faire, ni effeuiller, ni rogner, pour conserver le maximum d’ombre », explique Guillaume-Alexandre Marx. Arrivées à maturité sans l’once d’un problème, les baies ont permis la création d’un « vin rond, chaleureux et ample, mais doté d’une belle fraîcheur en rétro-olfaction grâce à la petite chute des températures nocturne, avec une acidité garante de garde. » Pour Fabrice Sommier, impressionné par ce nectar, « ce 2022 est un monstre, dans le bon sens du terme bien sûr ! Frais, élégant, tendu et droit avec ses notes de cassis, menthol et camphre, c’est un vin taillé pour la garde. Il dévoile aussi une épaisseur avec des tanins présents, mais qui se laissent  oublier sous la rondeur et la suavité, confinant presque à la sucrosité. » Assurément « la marque d’un grand vin, bon jeune comme vieux. »

Pour clore cette découverte du millésime, cap enfin sur la rive droite avec Quintus 2022, un vin richement pourvu en cabernet franc (42%), qui lui confère « de la fraîcheur, des notes d’épices et de fleurs, mais aussi du volume et de la tension », selon Guillaume-Alexandre Marx. Une approche que corrobore Fabrice Sommier, décrivant des « notes florales sur la violette et un fruit éclatant en finale. Rond et enrobant, gourmand, ce vin est doté d’une longueur très agréable, avec une finale finement tannique et juste petite pointe amère, sur une touche herbacée noble, qui ne laisse pas indifférent et raconte quelque chose », détaille-t-il.

En deux millésimes livrables
Après ce trio de Primeurs, c’est au tour du millésime 2016 de château Quintus de se dévoiler. Fruit de « vendanges sereines par de bonnes températures, avec une chaleur présente mais non-excessive », ce millésime affiche « une très belle robe, avant un nez solaire nécessitant un apport d’air », selon Fabrice Sommier. En bouche, « le fruit se fait croquant, ouvrant un boulevard sur l’acidité, puis une finale sur la cerise noire, qui le placerait justement comme compagnon idéal d’une forêt noire, décrit-il. Ce vin se goûte déjà bien, mais l’acidité permet une projection pendant longtemps. La bouche est très élégante et présente, les tanins sont là et conduisent discrètement la discussion, sans monopoliser la dégustation. Avec sa belle salinité, ce vin serait également le complice idéal d’anguilles au vin rouge ou d’une entrecôte bordelaise », selon le sommelier.

Clou de cette dégustation, le millésime 2006 de La Mission Haut-Brion. « Je l’ai choisi parce que je l’aime », confie Guillaume-Alexandre Marx en souriant. Issu d’une climatologie contrastée, avec une forte dose de pluie « nécessitant l’intervention de cent personnes dans les vignes », ce 2006 se positionne finalement comme l’un des grands millésimes du domaine. « C’est le seul de La Mission Haut-Brion sorti au même prix qu’un premier cru classé, un vin à la capacité de garde extraordinaire », assure le directeur commercial. Pour Fabrice Sommier, ce château La Mission Haut-Brion 2006 a « la dimension des grands vins, ceux qui amènent une émotion visuelle, aromatique, avec un nez qui bouge à chaque instant, entre le fruit, la truffe et des notes florales. La bouche est en adéquation, droite, saline, fraîche, fine, elle commence son évolution. Sur ce vin, inutile de compliquer les accords gourmands, on optera pour des mets qui accompagnent et équilibrent les côtés salin et gourmand, par exemple une côte de veau à la cocotte avec un beurre clarifié et quelques champignons, ou de jolis plats de gibiers classiques. »

Quel prix en Primeur ?
Dans une invariable succession, après la messe des dégustations Primeurs attirant à Bordeaux les acteurs mondiaux du vin, vient l’heure des sorties des prix, guettées sur la planète entière. Saluant la puissance de frappe de ce système historique, « formidable moyen d’avoir une très forte visibilité sur une très courte période », Guillaume-Alexandre Marx a ensuite expliqué aux participants la politique de Domaine Clarence Dillon en la matière. « Nous ne faisons pas de rétention, nous mettons un maximum de nos vins en Primeurs, avec 98 % sur la Place de Bordeaux. Nous avons la volonté de proposer un produit de consommation, même si les prix sont élevés car la demande augmente », expose-t-il. Pour fixer ce tarif tant attendu, les équipes procèdent à une analyse du millésime, en le rapprochant d’autres millésimes comparables du domaine, en évaluant à combien s’échangent les vins sur les marchés et quels volumes sont encore présents sur différentes places. En fonction de ces critères, « on ajuste le prix pour qu’il soit le plus intéressant possible pour vous, consommateurs », assure Guillaume-Alexandre Marx.