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Champagne : Vincent d’Astrée veut faire briller les étoiles du meunier

Auteur

Joëlle
W. Boisson

Date

31.05.2019

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La cave de Pierry réveille la marque Vincent d’Astrée et revendique haut et fort le meunier. Ce cépage prend en effet un caractère étonnant sur le terroir rare de craie à silex caractéristique de ses coteaux.

Elle fait partie du mouvement des coopératives créées dans l’après-guerre (1956). La cave de Pierry revendique fièrement 85 ha sur les coteaux chics de Pierry (terroir classé 1er cru dans la banlieue immédiate d’Épernay, autrefois faubourg aristocratique de la ville).

Peu à peu, la cave a grandi : fusion avec celles voisines de Moussy (2003) et plus récemment avec celle de St-Martin d’Ablois ; création d’un GIE (Groupement d’Intérêt Economique) de commercialisation avec la cave de Mardeuil (marque Beaumont des Crayères) de l’autre côté d’Epernay. Aujourd’hui, la coopérative de Pierry représente 220 adhérents et élabore pour eux 500 000 bouteilles/an.

Autre particularité, elle a souhaité dès les années 80 créer une marque de champagne, baptisée Vincent d’Astrée (35 à 40 000 bouteilles aujourd’hui). Vincent pour le saint patron des vignerons ; d’Astrée pour se mettre sous la protection des étoiles. Là, le pitch marketing est calé : Astrée, déesse de la mythologie grecque, aurait été placée par Zeus dans le ciel sous forme de la constellation de la Vierge. Et, tenez-vous bien, une de ses étoiles se nomme « Vindemiatrix », ce qui signifie « La Vendangeuse ». Autrefois, lorsque l’on voyait à l’équinoxe d’automne cette étoile se lever à l’est peu avant le soleil… c’est qu’il était temps de vendanger. Rien de moins !

Le meunier et le silex : les deux font l’étincelle

La thématique astrale est aujourd’hui largement déclinée dans la gamme, avec l’offre classique baptisée « Céleste » (brut, rosé, millésime) et une gamme « Constellation » de spécialités aux noms évocateurs : Eclipse, un 100 % meunier non dosé ; Novae, son pendant dans les grandes années en millésimé ; Solstice pour un rosé de saignée produit à partir de chardonnay et meunier.
On l’aura compris, Vincent d’Astrée met en avant le cépage meunier, qui couvre les deux tiers de son encépagement et se plaît particulièrement sur le finage. « Le terroir de Pierry est rare car il mêle à la craie champenoise des pierres de silex – « Pierry » vient de « pierreux » – que l’on voit affleurer en surface et qui confèrent des tonalités un peu fumées au vin », explique Sébastien Lapierre, chef de caves et enfant du pays, puisque son grand-père a fait partie des vignerons fondateurs de la coopérative.

Le meunier s’exprime de façon tout à fait originale et plus tendue qu’à l’accoutumée dans ce sol. Arrivé jeune diplômé œnologue en 2003, Sébastien Lapierre a peu à peu affiné le trait en développant des schémas de vinification (fermentations à basses températures, technique « sans malo », pas de filtration…) qui confèrent au meunier fraîcheur, matière, et un plus grand potentiel de garde. Sans surprise, Vincent d’Astrée garde longtemps ses vins en caves avant de les mettre en marché, afin de leur conférer une personnalité vineuse en arômes tout en conservant la fraîcheur en bouche.
Dans les prochaines années et avec les ambitions du nouveau GIE commercial, les champagnes Vincent d’Astrée devraient encore pousser ce trait de personnalité qui les destine clairement à la gastronomie.

Côté production, l’acquisition prochaine de petites cuves devrait permettre à Sébastien Lapierre de cibler encore plus finement ses approvisionnements par lieu-dit et « tracer » le silex. Comme il n’y a pas de fumée sans feu, les vins qui ressortiront de ce travail d’ici quatre ans feront peut-être tutoyer les étoiles !

Terre de vins aime :

Rosé d’assemblage (Gamme Céleste) 33 €. 80 % de chardonnay et 20 % de meunier dont une petite fraction de vin rouge. Un rosé pâle et élégant au nez délicat de petits fruits rouges (groseille) et de cannelle. La bouche est construite sur un registre de finesse et d’élégance, en cohérence avec le nez, et reste sur une note aérienne et fraîche même après plusieurs minutes dans le verre. Il est parfait pour servir à la coupe en terrasse (en faisant attention de protéger la bouteille de verre blanc de la lumière).

Novae (Gamme Constellation) 42 €. Un 100 % meunier « sans malo » issus de la vendange 2009. Ici le vin démontre une personnalité complexe et originale, axée sur le fumé, l’épicé, voire même les notes de pain toasté. On jurerait qu’il est passé en bois, ce qui n’est pas le cas ! La bouche est tendue et saline, mais avec aussi des notes aromatiques de feuillage séché et de nori. La finale est réveillée par de fins amers de type albédo. Une cuvée qui invite à des accords terre-mer : pommes de terre grenaille aux girolles, chips de serrano et dés d’anguille fumée, dans de belles assiettes automnales.