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Saint-Emilion : un promu du classement réagit

Auteur

La
rédaction

Date

15.01.2013

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Suite au recours porté devant la justice par trois châteaux de Saint-Emilion pour faire annuler le classement promulgué à l’automne dernier, le Château Rochebelle, propriété figurant parmi les promus de cette édition (et n°1 de notre dernier palmarès) nous fait partager sa réaction en exclusivité.

Nous l’annoncions hier en exclusivité sur notre site : trois châteaux de Saint-Emilion (Croque-Michotte, Corbin-Michotte et La Tour du Pin Figeac), exclus du dernier classement des grands crus promulgué à l’automne dernier, ont décidé de saisir le tribunal administratif de Bordeaux en vue de faire annuler ce classement, dénonçant un certain nombre de vices de procédure. Une décision qui vient remuer de vieux souvenirs sur la rive droite de Bordeaux – le classement de 2006 avait déjà été annulé – et faire planer une menace sur l’image de toute l’appellation.

Si du côté du Conseil des Vins de Saint-Emilion, on se refuse pour l’instant à tout commentaire officiel, nous avons souhaité recueillir les impressions de l’un des « promus » de ce dernier classement : seize châteaux ont en effet accédé en 2012 au titre de « Grand Cru Classé », et pourraient se voir retirer cette distinction si les trois plaignants obtiennent gain de cause.

Une situation déjà connue

Parmi eux, le Château Rochebelle, sacré n°1 de notre palmarès « Saint-Emilion Grands Crus Classés 2010 » : son propriétaire Philippe Faniest déclare « ne pas savoir exactement les raisons sur lesquelles ces trois châteaux veulent s’appuyer pour faire annuler le classement. Qu’ils fassent un recours pour eux, pour faire réviser leur note ou les critères qui leur ont été appliqués, ça peut se comprendre. Mais qu’ils remettent en question l’ensemble du classement et toutes les propriétés concernées, j’avoue que cela me dépasse. Encore une fois, je ne dispose pas de tous les éléments, donc je m’abstiens de porter tout jugement ».

Philippe Faniest est d’autant mieux placé pour commenter la situation qu’il est à la fois un « nouveau promu », mais aussi l’un des déçus du classement précédent : « en 2006, j’ai rencontré le même souci, je n’avais pas été retenu, sans même avoir vu un seul dossier, reçu une seule visite. Pour moi, l’injustice était flagrante, et pourtant je n’ai pas voulu contester le résultat. Je n’aurais pas pu saluer mes amis à Saint-Emilion si j’avais menacé leur classement. » D’autres s’en sont chargé pour lui…

« Tout ce que je peux vous dire, poursuit Philippe Faniest, c’est que de mon point de vue et par rapport aux classements précédents, le dossier a été monté de manière remarquable. Le système de notation, les critères d’évaluation, la visite de la propriété, la dégustation à l’aveugle, tout cela était très clair et a été fait avec beaucoup de professionnalisme. »

La force d’une marque

Finalement, cette nouvelle remise en cause du classement représente davantage un danger pour l’appellation dans son ensemble, que pour son cas particulier : « si l’idée de classement venait à être abandonnée à Saint-Emilion comme l’INAO l’a laissé entendre, c’est le terroir qui ferait seul la différence, et à cet égard le Château Rochebelle ne serait pas le plus mal loti ».

Lors des dégustations à l’aveugle comme celle réalisée par « Terre de Vins », Rochebelle se place parmi les meilleurs de Saint-Emilion. Il apporte d’ailleurs sur la question un éclairage intéressant : « c’est notre manque de notoriété qui nous empêche d’accéder à l’échelon des premiers grands crus classé, avance Philippe Faniest. A ce niveau j’ai tout à développer, et c’est ce qui m’amène à m’interroger sur une possible disparition du classement : qu’est-ce qui fait vendre un vin ? Est-ce un classement, ou une marque ? Que l’on ne se méprenne pas sur mes propos, être grand cru classé représente une incontestable valeur ajoutée, mais si l’on veut entrer dans la cour des très grands, il faut travailler pour améliorer sans cesse la qualité, et développer une marque forte. Je le constate chaque jour en vendant mes vins à la propriété, les consommateurs s’y perdent souvent dans les classements (1855, crus bourgeois, Saint-Emilion…) Au final, c’est la marque qu’ils vont rechercher, de plus en plus. A nous de faire tous les efforts dans ce sens. »

M.D.