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[Sommeliers Dating] « Un vrai contact entre sommeliers et vignerons »

Auteur

Mathieu
Doumenge

Date

09.05.2016

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A mi-chemin du premier Sommeliers Dating, événement professionnel organisé aujourd’hui au Cercle National des Armées (Paris 8ème) par « Terre de Vins », nous avons recueilli les impressions de quelques-uns des sommeliers présents.

40 sommeliers (restaurants, bars à vins, tables étoilées, groupes hôteliers, palaces), 66 propriétés (Bordeaux, Bourgogne, Rhône, Languedoc-Roussillon, Sud-Ouest, Provence). 20 minutes pour échanger, pour (faire) déguster trois vins, pour créer du réseau et du lien. C’est la formule – inédite – de Sommeliers Dating, organisé par « Terre de Vins » dans le cadre du Cercle National des Armées, à Paris. A mi-chemin de cet événement, qu’en pensent les professionnels présents ?

« Rester en éveil »

« C’est une formule vraiment intéressante car on a le temps d’établir un vrai contact entre sommeliers et vignerons, assis, au calme », s’enthousiasme Romain Iltis (Meilleur sommelier de France 2012 et Meilleur Ouvrier de France, Villa René Lalique à Wingen-sur-Moder). « On peut rencontrer des vignerons qui ne sont pas forcément distribuer dans nos régions, comme Pradeaux à Bandol, par exemple. Notre profession ne nous permet pas toujours de parcourir la France, et les vignerons n’en ont pas non plus la possibilité, ‘Sommeliers Dating’ permet donc de faire bouger les lignes. Et de faire des repérages pour la suite : je viens de créer ma carte des vins de zéro, j’ai déjà 2000 références mais une carte vivante est une carte en perpétuelle évolution. Il faut donc rester en éveil ».

Même impression du côté de Baptiste Ross-Bonneau, Chef sommelier au restaurant La Barbacane (Carcassonne) : « à Carcassonne on voit peu de vignerons de Bordeaux ou de Bourgogne, le point positif est de pouvoir les rencontrer en face-à-face. Et l’espace free tasting est une excellente idée, il nous permet de déguster des vins que l’on n’a pas eu en rendez-vous ». Alexandre Morin, Chef sommelier au Point Rouge (Bordeaux), souligne lui aussi l’intérêt de pouvoir échanger en direct avec le vigneron : « trois vins en 20 minutes, c’est parfait. On peut déguster mais aussi avoir l’historique de la propriété. J’aime poser des questions sur l’âge des vignes, la topologie, la climatologie, le format s’y prête très bien. »

« Inverser les rôles »

« Le format du speed dating oblige à la concision », poursuit Patrick Borras, Chef sommelier au Restaurant Pierre Gagnaire (Paris). « On peut faire une mise à jour sur des domaines que l’on connaît déjà, comme Laroche en Bourgogne, par exemple. Mais on fait aussi des découvertes intéressantes, comme Grand Pontet à Saint-Emilion ou Grand Boise en Provence, qui propose des rosés de gastronomie, cela donne des idées ».

Paz Levinson, Meilleur sommelier des Amériques 2015, officiant à La Ferme Saint Simon (Paris), salue le fait que « ces conditions d’échange et de dégustation sont plus confortables que ce dont a l’habitude, sur les salons ou les dégustations professionnelles ».
Gérard Margeon, Chef sommelier du groupe Alain Ducasse, renchérit : « les conditions sont excellentes, même si c’est très sportif, mais surtout, ‘Sommeliers Dating’ permet d’inverser les rôles. D’habitude ce sont les sommeliers qui passent de table en table pour déguster, ici ce sont les vignerons qui se mettent dans notre peau, en quelque sorte. C’est un bel événement qui nous permet de déguster un millésime ou une cuvée que l’on n’avait pas forcément goûté, et surtout d’établir un contact direct. C’est précieux car on n’a pas forcément l’occasion de bouger dans ce beau vignoble de France ». Gérard Margeon, qui reçoit entre 60 et 90 échantillons par semaine, supervise 40 cartes des vins et 6000 références dans le monde pour le groupe Ducasse. « Je peux déguster une vingtaine de vins à la minute et faire mon choix très rapidement, après je fais une demande d’échantillon pour re-déguster plus tranquillement les vins qui ont retenu mon attention. Il me faut une demi-seconde pour savoir ce que j’écarte, et ce que je peux potentiellement re-goûter ». Sa ligne rouge ? « Il faut que l’homme ne se sente pas obligé d’afficher son ego dans la bouteille, et accepte de laisser parler son écosystème. Dans certains domaines, le nom du vigneron est plus gros que l’appellation. Dès que je mets le nez dans le verre, si je ‘sens’ le bonhomme plutôt que son environnement, je sais que ça ne va pas coller ». Gageons que les vignerons présents à Sommeliers Dating auront su mettre leur ego de côté.